1815

par Malraux
vendredi 30 janvier 2009

Date fatidique, Waterloo morne plaine etc… En fait cette date comme 1914 au siècle suivant, marque la fin d’une ère et le début d’une autre, la fin des Lumières et le retour de la pensée religieuse. Ce ne sont pas seulement quelques aristocrates en fin de race et bien incapables de rejouer le moindre rôle économique qui arrivent dans les bagages de Louis XVIII, c’est surtout une idéologie, qui après les 60 « glorieuses » du siècle des Lumières voit la France en particulier et l’Europe en général sombrer dans 90 ans de bigoterie.
 
Il faudra attendre 1905, les radicaux socialistes et la séparation de l’Eglise et de l’Etat pour que la religion catholique commence son inexorable dégringolade dans notre pays. Aujourd’hui laminée, n’exerçant plus ni pouvoir temporel ni même autorité morale, en proie à une hémorragie inéluctable de ses cadres et de ses forces vives, le catholicisme n’est plus qu’un repoussoir commode pour quelques extrémistes en mal de bouc émissaire.
A plus de 50 ans, je suis de la génération qui a connu sur le plan de la philosophie le triomphe du «  hasard et la nécessité  », ce texte fondamental de la pensée scientifique, qui réfute définitivement l’existence de la divinité et donne à l’homme les outils intellectuels nécessaires à l’acceptation de son autonomie et de sa capacité à prendre en main son propre destin, avec tout ce que ça comporte, notamment le fait d’assumer totalement les conséquences de ses choix et de ses actions.
 
Je suis de la génération qui a vu les formidables avancées des techniques, de la médecine, et malheureusement aussi le début du questionnement écologique. J’ai vu le recul de la Religion (on disait de l’Obscurantisme dans les milieux marxistes), l’accès au confort de toute une classe moyenne (le moindre couple d’employés aujourd’hui bénéficie d’un confort dont seule la très haute bourgeoisie bénéficiait il y a à peine 50 ans), la reconnaissance de l’égalité des sexes et ses corollaires (contraception, avortement, combat pour l’égalité des salaires), la liberté de se déplacer et les moyens pour ça, la liberté de penser et de s’exprimer, surtout la liberté de ne pas croire en Dieu et de l’assumer sans être un paria.
 
Et puis… Depuis une dizaine d’années, de lourds nuages arrivent de tous les horizons. Les idées développées par Jacques Monod sont tous les jours bafouées, dénigrées, sans pour autant qu’une véritable réfutation ne puisse leur être opposé.
 
On ne se soigne plus, on « croit » à l’homéopathie, on « croit » à l’allopathie. Comme si se soigner était seulement une affaire de croyance…
 
L’effondrement du catholicisme fait le terreau de nouvelles religions, encore plus obscurantistes. L’Islam, le fondamentalisme chrétien américain, ces cancers de la pensée, se développent sans qu’un seul grand intellectuel ne se lève en disant « Non, il n’y a pas un bon islam et des mauvais fondamentalistes. Dieu n’existe pas et tous ceux qui voudraient nous faire croire le contraire sont au mieux des escrocs et au pire des imbéciles dangereux. Pas plus le Dieu des musulmans que celui des juifs ou des chrétiens »
 
Qui aujourd’hui peut dire cela de manière forte et sans ambigüité ? Sans être traité de raciste ?
 
Oui, on peut être islamophobe, non pas parce que l’islam vient d’ailleurs, mais parce que l’islam est comme le christianisme ou le judaisme une religion qui a une vision totalitaire du monde dont est exclu l’homme et son libre arbitre. Voilà ce que le siècle des Lumières nous a enseigné, et que 90 ans d’obscurantisme chrétien nous avait fait presqu’oublier. L’Islam ou les Evangélistes vont-ils nous repousser dans cette voie ?
 
Je vous renvoie à l’excellent article du Nouvel Observateur sur le « créationnisme » qui souligne les convergences et les complicités entre extrémistes chrétiens américains et musulmans.
Là encore alors qu’il y a 20 ans les créationnistes n’étaient considérés que comme de doux dingues on trouve aujourd’hui des débats violents tentant de mettre sur le même plan croyance religieuse et démarche scientifique.
 
A travers le déluge d’informations que nous apporte Internet il devient de plus en plus difficile pour les jeunes de faire la part des choses entre ce qui est le produit d’une pensée construite et cohérente, discutable et réfutable et les innombrables déguisements du paradigme religieux et de la pensée totalitaire.
 
Alors, je me retourne, je vois ce que fut le monde il y a 20 ans, je vois ce qu’il devient aujourd’hui, et je me dis… 1815 à nouveau ?

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