Apocalypse : hier, aujourd’hui, demain ?

par Emile Mourey
vendredi 16 janvier 2009

Faut-il exorciser le passé ? Oui mais comment ? En réfléchissant sur les leçons qu’on peut tirer de l’Histoire ? De l’histoire palestinienne de ce Ier siècle d’où découle une partie de nos problèmes actuels ? Mais bien sûr ! C’est là que tout a commencé. Comment expliquer que des hommes apparemment cultivés aient pu entraîner, en l’an 70, dans un véritable bain de sang, la ville de Jérusalem et toute sa région ? Et cela, comme l’écrit Flavius Josèphe, à la suite d’une prophétie dont j’ai dit que ce ne pouvait être que l’Apocalypse de Jean. Cette folie de l’an 70, n’est-il pas important de mieux la comprendre afin d’éviter qu’elle se reproduise, surtout quand on sait qu’il existe encore des fous qui pensent qu’il faudrait une nouvelle apocalypse pour faire descendre du ciel un nouveau sauveur ?

Je ne vais pas reprendre l’ensemble du texte de l’Apocalypse mais seulement les quelques passages pour lesquels je propose une interprétation nouvelle. Je ne vais pas, non plus, revenir sur mon article du 26/3/08 intitulé "Jésus" dans lequel j’ai donné un résumé de l’aboutissement d’une recherche de plus de trente ans, à savoir que l’évangile de Mathieu, quatrième selon moi, est l’histoire de la vie et de la mort d’un Jésus du ciel qui est venu s’incarner dans le conseil de Dieu des Esséniens... et qui est ressuscité dans le conseil qui lui a succédé.

Les passages en italiques que je cite sont extraits, sans aucune modification de ma part, de la traduction du professeur Claude Tresmontant, la seule traduction que je considère comme fiable car au plus près du texte d’origine (cf. Apocalypse de Jean, Edition F.-X. de Guibert). Les interprétations sont miennes.

1,1. révélation de ieschoua qui a reçu l’onction... L’auteur se désigne sans ambigüité. C’est le conseil de Dieu de la grande communauté essénienne, ou tout au moins, le conseil qui se présente comme tel. Juifs revenus de l’exil de Babylone, réimplantés en Galilée, les membres de ce conseil se considèrent comme l’héritier légitime de David...
pour montrer à ses serviteurs... ces serviteurs que sont les autres communautés esséniennes, communautés de Saints (c’est le nom qu’ils se donnent).
Il a envoyé le message à son serviteur iohanan. En m’appuyant sur le témoignage que donne Flavius Josèphe sur Jean de Gischala, j’ai fait l’hypothèse logique qu’il pouvait s’agir de lui, mais aujourd’hui, je doute. Le mieux est de considérer que Jean est un nom symbole pour proclamer la parole de Dieu et que les véritables auteurs du texte sont les membres du conseil suprême essénien.

1/4. de la part de celui qui est et il était et il vient... il s’agit bien évidemment de Yahvé qui réside, symboliquement, dans son sanctuaire du ciel et dont on attend qu’il se manifeste sur terre... et de la part des sept esprits... les sept étoiles bien visibles de la Petite Ourse qui se trouvent au centre du ciel, en avant de Yahvé que, bien évidemment, le commun des mortels ne voit pas (peut-être parce qu’il se trouve à l’infini).

1/5. le témoin véritable et certain...le premier-né d’entre les morts... lui qui nous a aimés et qui nous a délivrés de nos fautes dans son sang. 1/9. Moi, iohanann votre frère et votre compagnon dans la persécution... et dans l’espérance en ieschoua. La persécution que rappelle ce Jean est celle qui a commencé en l’an 48 - évoquée également en 7/14. Comme je l’ai expliqué par ailleurs, elle est la conséquence logique de la proclamation/bombe de l’évangile de Mathieu. Flavius Josèphe dit que Tibère Alexandre fit crucifier Jacques et Simon. Jacques était le chef de la communauté de Jérusalem, Simon, alias Pierre, une sorte de grand prêtre pour l’ensemble des communautés esséniennes de Galilée. On comprend que Josèphe n’ait cité que les deux têtes du mouvement. Mais il faut deviner qu’en réalité, ce sont les douze membres du conseil suprême qui ont été crucifiés et avec eux un nombre certainement conséquent de Saints. Nous sommes dans la suite logique de l’épître aux Hébreux, je cite : 9,12. Il a pénétré une fois pour toutes dans le sanctuaire, non par le sang de boucs et de veaux, mais par son propre sang, après avoir acquis un éternel rachat. 13,7. Souvenez-vous de vos chefs, eux qui vous ont annoncé la parole de Dieu, et considérant l’issue de leur carrière, imitez leur foi.



1/18. et j’ai été mort et voici que je suis vivant pour les durées éternelles... Le conseil qui s’exprime est celui qui a succédé au conseil crucifié. Cela signifie que Ieschoua qui animait le conseil disparu est ressuscité dans le nouveau. Cela signifie que le cycle enclenché n’a aucune raison de s’arrêter.

2/2. ceux qui se disent eux-mêmes envoyés mais ils ne le sont pas et tu as trouvé que ce sont des menteurs... Ironie de l’histoire, il s’agit ici de Paul. C’est clair ; le nouveau conseil n’apprécie pas que Paul fasse cavalier seul.

2/6. Tu hais les actions des Nicolaïtes que moi aussi je hais... confirmation de la rupture avec les chrétiens de Nicolas d’Antioche.

2/16. et je vais faire la guerre contre eux... Esséniens contre Chrétiens, incroyable !!!

2/20. la femme iezabel qui se dit prophétesse... trompe mes serviteurs... à manger des viandes de bêtes sacrifiées aux dieux des nations... La femme visée de Thyatire est une disciple de Paul nommée Lydie (Ac 16-14). C’est une nouvelle Jézabel (1Rs).

11/3. et je donnerai à mes deux témoins... Jacques et Simon susnommés... et ils prophétiseront...11/7. alors la bête sauvage qui monte de l’abîme (Rome ?) fera avec eux la guerre et elle les vaincra et les tuera. et leurs cadavres sur la place de la grande ville celle qui est appelée en langage spirituel sodome et égypte (Jérusalem) là où leur seigneur a été cloué sur la croix. Ce seigneur est le Yeschoua qui s’est incarné dans le conseil essénien de Jacques et de Simon et dont l’évangile de Mathieu relate l’histoire.

11/11. et après les trois jours et demi (durée normale pour une résurrection) un esprit de vie de dieu est entré en eux... 11/12. et ils sont montés aux cieux.
 
12/1. et un signe grand s’est fait voir dans les cieux une femme revêtue de soleil (Israël ?)... et sur sa tête une couronne de douze étoiles (l’esprit des douze tribus ?).

Nous abordons maintenant la partie importante du texte de l’Apocalypse, celle où l’auteur prophétise sur le grand combat apocalyptique et eschatologique qui se déroule dans le ciel et qui va se poursuivre sur terre. Si j’en ai encore le courage, et bien évidemment si le présent texte est accepté par la modération, je traiterai l’affaire dans un prochain article. C’est un sujet difficile car dans ce langage incroyablement compliqué de symboles, il s’agit de bien se situer. Si, derrière l’évangile de Jean, premier selon moi, il faut deviner la communauté de Qumrân, si derrière l’évangile de Marc, second, c’est une communauté des bords du lac de Galilée qu’il faut localiser à Bethsaïde, c’est la communauté/mère de Gamala qu’il faut deviner derrière l’évangile de Mathieu, et aussi l’épître aux Hébreux, et aussi l’Apocalypse de Jean.

Force est de constater la difficulté qu’il y a à bien interprêter cette Apocalypse de Jean. Dans la rédaction de mes ouvrages, j’avais suivi l’exégèse traditionnelle qui y voyait une prophétie annonçant la chute de Rome. C’était une grave erreur. Comme l’écrit Claude Tresmontant, c’est Jérusalem que le texte menace de destruction. Cela semble incroyable que des Juifs aient accumulé une telle haine contre leur ville historique et pourtant, c’est ainsi. Il faut rouvrir le débat. Malheureusement, personne ne semble le souhaiter. D’un côté, il y a ceux qui ne veulent comprendre les textes bibliques que dans la lettre ou presque ; de l’autre, ceux qui les considèrent comme totalement inventés. Et quand les médias s’en mêlent... il n’y a de pires sourds que ceux qui ne veulent pas entendre.

Car, manifestement, le Jean de l’Apocalypse se dresse contre le courant paulinien plutôt pro-romain. Il se dresse contre l’évangile tolérant de Luc que prêche Paul et avec lequel l’évangile de Mathieu avait déjà pris quelques distances. Tout cela s’accorde bien avec les Histoires de Flavius Josèphe qui, plus d’une fois, nous a relaté les troubles récurrents qui secouaient la Galilée tout en déplorant la folie des hommes. Et si l’historien juif n’évoque que peu ou pas du tout le "personnage" de Jésus, c’est probablement parce qu’il n’y voyait qu’une image dont se servaient ces hommes pour le bien et pour le pire.

A suivre.


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