Il y a 1.000 ans, le Saint-Sépulcre était détruit par le calife Hakim

par Marianne
lundi 19 octobre 2009

Par Jean-Michel CADIOT*

C’était il y a mille ans, le 18 octobre 1009, la basilique du Saint-Sépulcre, à Jérusalem, était rasée sur ordre du calife al-Hakim bi-Amr Allah, événement exceptionnel qui a marqué le début des croisades.


Ce calife d’une dynastie fatimide, chiite, ordonna aussi la destruction de toutes les autres églises de la ville, assassina de nombreux chrétiens, ce qui suscita à Rome et surtout en France l’idée de Croisades.

L’église, ancien temple de Vénus, avait été construite en 326 à la demande d’Hélène, mère de l’empereur romain Constantin, sur le lieu où fut enterré Jésus-Christ, selon la tradition.

Elle avait déjà été gravement endommagée à plusieurs reprises. D’abord par les Perses en 614, qui s’emparèrent de la "Vraie Croix" -reconquise par l’empereur Heraclius, après une guerre parfois appelée "première Croisade"-, puis par deux tremblements de terre, en 746 et 810 et aussi quelques incendies. Elle fut restaurée à plusieurs reprises, et agrandie.
En janvier 638, c’est la victoire des Arabes musulmans à Jérusalem. Le vieux patriarche chrétien Sophrone remet les clés de la ville au calife Omar, sommant ce dernier de se conduire en "pèlerin", non pas en "conquérant".

Les deux hommes se promenèrent longuement ensemble, selon les chroniqueurs de l’époque, et Omar, vainqueur sans combattre, décréta immédiatement la liberté religieuse pour les chrétiens, et pour les juifs.
 
Mais ce n’était pas sans contrepartie. Il fallait que ces fidèles, considérés comme "gens du Livre", se réclamant des mêmes origines abrahamiques, acceptent la "dhimmitude", c’est-à-dire qu’ils payent un impôt. Il leur était interdit de convertir les musulmans, et ils devaient renoncer à faire sonner les cloches.

Les Fatimides, descendants d’Ali, cousin et gendre du Prophète Mahomet, premier imam chiite, avaient conquis l’Egypte en juillet 969. Au départ, ils semblèrent bien disposés à l’égard des chrétiens, les intégrant même dans la haute administration. Un de leurs califes, Nizar el-Aziz Billah, épousa une femme chrétienne, et nomma lui-même le frère de cette dernière, tout simplement son beau-frère, Jérémie, Patriarche de Jérusalem, en 984.

C’est une époque de famine et les Byzantins multiplient les attaques contre les Fatimides en Syrie et Palestine. Hakim, calife en 996, parfois considéré comme un "génie" parfois comme un "fou", se met à persécuter les "dhimmis", accusés de tous les maux, surtout les chrétiens.

En 1002, le premier pape français Sylvestre II, grand mathématicien imprégné des savants musulmans qu’il admirait, lança un premier appel à la croisade : "Soldats du Christ, levez-vous, il faut combattre pour lui !", lança-t-il.

Cela fut sans suite immédiate. Fin août 1009, Hakim renforce la répression anti-chrétienne qui culminera avec la destruction du Saint-Sépulcre, le 18 octobre. Le toit du tombeau, taillé dans la roche, les murs est et ouest furent rasés, les énormes gravats épargnant les murs nord et sud. "Ils (les Fatimides) s’emparèrent de tous les meubles et détruisirent complètement l’église. Ils ne laissèrent que ce qu’ils ne parvenaient pas à détruire", narre l’historien Yahia Ibn Sa’id. Le Saint-Sépulcre fut restauré en 1048.
Le pape Serge IV ne bougea pas. Quant au patriarche de Jérusalem, il eut les yeux crevés et fut emmené prisonnier au Caire, où il mourut.

Il fallut attendre la prise de Jérusalem en 1078 par les Turcs Seldjoukides qui tentèrent d’interdire les pèlerinages des chrétiens occidentaux à Jérusalem pour que les Occidentaux décident de réagir.

Un autre pape français, Urbain II lance en novembre 1095, la première "Croisade", destinée en particulier à "reconquérir les lieux saints", en premier lieu Jérusalem et le Saint-Sépulcre.

A l’issue d’une bataille sans merci, qui vit périr par dizaines de milliers Musulmans, Juifs, mais aussi Croisés chrétiens, les clefs du Saint-Sépulcre furent remises le 15 juillet 1099 à Godefroy de Bouillon, descendant de Charlemagne.

Godefroy, tout comme Urbain II devait mourir peu après. Jérusalem est reconquise en 1187 par les musulmans emmenés par Saladin. Le Saint-Sépulcre, qui avait été presque totalement réaménagé par les Croisés, était épargné.
 
Les Croisades, au nombre de neuf au total, s’achevèrent par une défaite définitive des Croisés avec la prise de Saint-Jean d’Acre en 1291.
 Après le schisme de 0154, le fossé entre catholiques et orthodoxes était agrandi, d’autant que les Croisés avaient saccagé Constantinople en 1204...... 
 
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*Jean-Michel Cadiot est un de mes amis, journaliste et écrivain. Il prépare actuellement un ouvrage sur les chrétiens d’Orient et a publié notamment les ouvrages suivants :
  • Quand l’Irak entra en guerre (L’Harmattan, 1989)
  • Mitterrand et les communistes (Ramsay,1995)
  • Francisque Gay et les démocrates d’inspiration chrétienne (comprenant notamment une histoire du Sillon de Marc Sangnier, Salvator, 2006)

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