L’Église de France appelle au sursaut politique
par Charles Le Bourgeois
samedi 15 octobre 2016
À six mois de l’élection présidentielle en France, les évêques du pays tirent la sonnette d’alarme. Ils publient ces jours-ci un document intitulé « Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique ».
Dans ce texte, écrit par le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France, les auteurs expriment sans détour leur préoccupation pour la situation du pays, où « une part importante des habitants » est habitée par « de la lassitude, des frustrations, parfois des peurs et même de la colère […] ». Les évêques y présentent un sombre tableau de la situation politique en France, et regrettent notamment des « paroles non tenues », des « ambitions démesurées » et « l'absence de vision à long terme des politiques ».
L’épiscopat déplore, entre autres, la disparition de la question du sens dans le débat politique depuis une cinquantaine d’années. « Plus que jamais, peut-on lire dans cette lettre adressée aux habitants de notre pays, nous sentons que le vivre ensemble est fragilisé, fracturé, attaqué ». Constatant par ailleurs que « ce qui fonde la vie en société est remis en cause », les prélats estiment que c’est l’autorité de l'État elle-même qui tend à se disqualifier.
Ceci étant dit, plutôt que « d’alimenter la morosité », les évêques préfèrent apporter leur « réflexion au débat » national. L’Église de France veut ainsi redonner un sens à la politique, et invite à redéfinir le contrat social qui « ne semble plus aller de soi, parce que les promesses de ce contrat ne sont plus tenues », explique-t-elle.
Même « nos valeurs républicaines de liberté, égalité, fraternité, souvent brandies de manière incantatoire, semblent sonner creux pour beaucoup de nos contemporains sur le sol national », regrette l’épiscopat qui appelle donc à s’interroger sur « ce que c’est d’être citoyen français, et de promouvoir une manière d’être ensemble qui fasse sens ».
Dans cet ouvrage de 94 pages, les auteurs ne manquent pas non plus de rappeler la définition de la laïcité : « un cadre juridique qui doit permettre à tous, croyants de toutes religions et non croyants, de vivre ensemble ». Ils mettent ainsi en garde contre « un projet de société qui envisagerait une sorte de neutralisation religieuse de cette société en expulsant le religieux de la sphère publique, vers le seul domaine privé où il devrait rester caché ».
L’objectif de ce message, explique le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, « est de s'inscrire en faux contre la sinistrose ambiante ».
Le président de la Conférence des évêques de France, Mgr Georges Pontier, prévient quant à lui : « l’ambition de cette lettre est de fournir des éléments de réflexion », et de voir « comment redonner un souffle, une vision commune, pour que les Français, divers, puissent retrouver des raisons de vivre ensemble ».