Les sciences mènent-elles à Dieu ?

par Bernard Dugué
vendredi 5 décembre 2014

Dieu et la science, vaste sujet d’interrogation et surtout thème qui ne laisse pas indifférent et se prête à des controverses passionnées, parfois agitées et quelques fois violentes. Il est étrange que le mot Dieu suscite chez quelques uns de nos contemporains une colère intempestive alors qu’ils ne savent rien de ce Dieu excepté ce qu’en ont fait les administrateurs des religions. La science est-elle en relation avec la question de Dieu ? Telle est la question qui se pose depuis que la science moderne est installée. Juste un exemple, le grand architecte des Lumières vénéré dans les loges maçonniques a été imaginé sur la base de la gravitation universelle de Newton. Ce qui a scindé à cette époque la religion en deux, une religion révélée réservée à la tradition et l’Eglise et une religion naturelle réservée aux savants et philosophes. Et puis, dans le courant du 19ème siècle, l’avènement du positivisme.

Un mot sur ce moment déterminant dans l’histoire de la pensée. Auguste Comte a énoncé la loi des trois états comme principe gouvernant la doctrine positiviste. L’individu, l’humanité et chaque science passe par trois stades, théologique, métaphysique, positif. Dans le premier stade, les choses sont expliquées par des origines surnaturelles, avec trois étapes, fétichisme, polythéisme, monothéisme. Ensuite, le stade métaphysique utilise des principes abstraits, ce qui couvre les 17ème et 18ème siècle. Enfin, l’âge positif renonce au pourquoi et se donne comme objectif de trouver des lois, de les utiliser et d’organiser rationnellement la société. Chez Comte, la science éloigne de Dieu, mais soutient un culte de l’humanité et du progrès dans lequel les saints médiévaux et les héros métaphysiques sont remplacés par les savants et les industriels. Ce culte aura un temple, le Panthéon, équivalent du tombeau des papes au Vatican mais destiné aux grands hommes vénérés par la patrie, comme Rousseau et Mirabeau pour la période révolutionnaire et le chimiste Berthelot accompagné par l’écrivain Zola et le politicien Gambetta, les trois émargeant dans le contingent de la Troisième République. Aucun ecclésiastique ne figure dans la liste, excepté l’abbé Grégoire entré tardivement pour sa contribution à l’abolition de l’esclave.

Si la science du 19ème siècle adossée au positivisme paraît éloigner de Dieu, la science du dernier tiers du 20ème siècle paraît rapprocher de Dieu. Efforçons-nous alors de bien distinguer le Dieu de la révélation et celui qui « pourrait transparaître » dans les sciences de la nature et l’univers. Le positivisme n’a plus aucune légitimité et d’ailleurs, il figure comme une spécialité plutôt française, bien que sa devise « ordre et progrès » ait été reprise par le Brésil. En ce 21ème siècle, deux catégories d’individus pensent que la « science moderniste » apporte le progrès et le salut, les transhumanistes (néo-positivistes ?) et les fous !

Je n’adhère pas à la loi positiviste des trois états. J’ai une vision toute autre des trois états. Effectivement, l’humanité a commencé avec le stade théologique et son ancienne alliance. Ensuite, le second stade est celui de la modernité et de la science, avec une nature manipulée, des machines performantes, mais une alliance rompue avec la nature. La nouvelle alliance de Prigogine n’étant qu’une fausse alliance adossée à une vraie science et une ontologie mal ficelée. L’âge métaphysique n’est qu’une transition entre le médiéval et le monde positif contemporain. Le troisième stade va commencer, ce sera celui de l’alliance retrouvée mais sous une autre forme. Et comme dans la version de Comte, toutes les sciences vont y participer, avec les personnes et l’humanité.

Cela ne nous dit pas si la science conduit vers Dieu. Et puis de quel Dieu s’agit-il ? En vérité, Dieu se diffracte dans le prisme de l’esprit humain. L’homme n’accède pas à Dieu mais au divin, par des voies multiples et personnelles. Expérience mystique notamment, ou alors réflexion spéculative sur le monde, le cosmos, la nature. L’essentiel n’est pas tant de croire en Dieu que de chercher le divin. La conscience s’agrandit, conscience intellectuelle et pensée spéculative avec le divin transparaissant dans les sciences et la philosophie, conscience éthique avec la transformation liée aux énergies divines, conscience esthétique avec les formes véhiculées par les énergies.

L’histoire de l’humanité est indissociable de la quête spirituelle et de la soif d’espérance liée entre autres choses à la rencontre avec le divin. L’alliance est en fait le résultat de deux domaines qui cherchent à s’entrelacer, à l’image des ouvriers creusant un tunnel de part et d’autre de la montagne et qui finissent par se rencontrer. Mais l’image est souvent trompeuse. La rencontre entre l’esprit humain et le divin répond à cette vision et repose sur deux décisions, Dieu étant libre de participer, conformément à ce qu’en a dit le théologien Barth par exemple. Mais quand il s’agit de la science telle qu’elle est codifiée dans les théories et expériences, c’est l’homme qui décide s’il a trouvé le divin ou pas.

Si la science mène au divin, c’est au savant de faire le chemin et d’interpréter la science en spéculant sur les réalités naturelles et cosmologiques. Le savant a le libre choix de son interprétation et la liberté de dire ce qu’il pense sur la science et le divin. Nul ne peut décréter que la science doive être à l’écart de la quête gnostique et de la recherche du divin. Nul ne peut juger un scientifique qui parle de divin en méditant sur sa discipline. La science a ses propres règles au sens desquelles le divin n’a pas sa place mais l’interprétation des représentations scientifiques a aussi ses règles et participe de la connaissance et de la quête du sens. La science ne permet pas de prouver l’existence de Dieu mais elle permet de chercher la trace du divin dans la nature et le cosmos. Chacun trouve ce qu’il peut ou veut. Puis le partage s’il le veut.

Ces quelques réflexions n’ont rien d’original. Elles ne constituent qu’un tableau d’une situation avec une mise au point sur ces questions intéressantes et légitimes qui hélas, sont utilisées souvent pour ostraciser un scientifique usant de sa discipline pour expliquer quelle est sa conception du divin. Comme si par une étrange inversion, Dieu était devenu le diable dès lors qu’il s’insinue dans la science. C’est plutôt la communauté qui diabolise les gnostiques en les ostracisant. Le substantif diable étant alors utilisé avec son sens originel, le diable, ce qui divise, met de côté.

Dans ce billet, vous ne saurez rien de plus que ce que j’ai évoqué précédemment sur le sujet. J’avoue être perplexe sur la suite de mes investigations. Maintenant que la cosmonadologie quantique est achevée, il faut déterminer une feuille de route. Quand je dis achevée, je précise que la question de la gravitation sur laquelle je butais est maintenant solutionnée. Une présentation est envisagée dans une revue paraissant en kiosque quant à l’essai, il paraît impensable qu’il ne trouve pas d’éditeur. La question divine est à nouveau posée sous un angle inédit avec la cosmonadologie mais je reste prudent et attend les critiques en les espérant. Et maintenant, que vais-je faire ?

(Certainement pas écouter Gilbert Bécaud. J’ai le choix entre rédiger un essai sur l’état de la société, ou alors esquisser un traité de théologie post-moderne ou enfin de poursuivre la recherche sur la vie et l’évolution. Ces trois objectifs ont chacun leur utilité. L’essai sociétal permet aux gens de se comprendre, la théologie donne du sens et permet de comprendre l’univers et la destination de l’homme, la biologie ouvre vers des pistes thérapeutiques inédites ainsi qu’un sens nouveau de la nature et de son évolution. Vous pouvez toujours livrer quelques indices en commentaires mais je vous avoue que je vais suivre Dieu qui est d’un conseil bien plus précieux que les hommes, parfois trop capricieux, facétieux ou insidieux et même odieux. L’homme ostracise, Dieu non ! A bon entendeur !)


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