Pakistan : la loi anti-blasphème aurait fait près de 1000 victimes

par Catherine Segurane
lundi 26 juillet 2010

 Rien n’est pire que d’avoir des oeillères, et ma qualité de militante laïque ne m’a pas empêchée de signer la pétition diffusée par Aide à l’Eglise en Détresse (AED) et dirigée contre la loi anti-blasphème au Pakistan. J’ai quand même laissé un petit message dans l’espace prévu à cet effet pour préciser que cette signature, dans mon cas, ne me faisait pas rejoindre la chaîne de prières qui va avec.
 
L’Eglise évalue à près de 1000 le nombre de victimes de cette loi. Pour être précis : de 1986 à 2010, la Commission Justice et Paix de la Conférence des Evêques Catholiques avance le chiffre de 993 victimes innocentes, dont 120 chrétiens, 442 musulmans et 417 ahmadis (mouvement issu de l’islam et considéré comme hérétique par la majorité des musulmans), 14 hindous.
 
La Loi anti-blasphème est contenue dans le Code Pénal du Pakistan, explique le Conseil Œcuménique des Eglises (COE) dans une Déclaration sur l’abus de la Loi sur le blasphème et la sécurité des minorités religieuses au Pakistan, le 1er septembre 2009.
 
Il s’agit d’une vieille loi datant de la colonisation britannique qui, avec l’indépendance et l’islamisation du pays, ne cessa de se renforcer et de se durcir dans le cas de prétendus blasphèmes contre l’islam, au point qu’elle prévoit maintenant la peine de mort en cas de blasphème contre Mahomet.
 

Depuis lors, les chrétiens, et d’autres minorités au Pakistan ont subi de manière croissante des humiliations et des persécutions en raison d’allégations mensongères en vertu de la loi anti-blasphème. C’est « un instrument d’oppression très perfide », déclare Marc Fromager, directeur de l’AED-France. Pourquoi ?

- parce qu’elle n’est pas précise dans sa formulation. Elle ne fait pas la différence entre une action délibérée ou pas. Elle ignore l’état psychologique de la personne ou la méconnaissance que peut avoir la personne des conséquences de certaines de ses actions. La loi ne définit pas le comportement attendu des citoyens à l’égard de Mahomet et du Coran.

- parce que sur le simple témoignage d’un plaignant, la personne en cause est immédiatement placée en détention. Une personne peut donc être accusée sans preuve.

- parce que le plaignant jouit d’un statut d’impunité compte tenu de la loi.

- parce qu’on assiste le plus souvent à un simulacre de jugement. Les extrémistes y sont le plus souvent présents afin d’empêcher toute possibilité d’acquittement. Les procès s’éternisent et les amendes se font de plus en plus lourdes. Ces arrestations sont aussi une manière de récupérer la propriété du voisin.

- parce qu’elles sont utilisées pour régler des comptes. 

Les arrestations, assassinats, massacres et pillages vont en s’accroissant depuis la promulgation de ces lois. Des centaines de lieux de culte ont été détruits. Récemment en août 2009, 8 chrétiens étaient brûlés vifs à Gojra. Il faut savoir qu’au Pakistan, les enlèvements, viols, mariages et conversions obligatoires des femmes chrétiennes par des hommes musulmans ne sont pas poursuivis. Si une femme vient se plaindre d’un viol, il n’est pas exclu qu’elle soit accusée d’adultère.

 
Du fait de la loi anti-blasphème, le Pakistan ne cesse de défrayer la chronique des droits de l’homme. Le 19 juillet 2010, deux chrétiens ont été - ô miracle ! - acquittés d’accusations de blasphème contre Mahomet, mais ils ont été assassinés en plein tribunal et la foule en fureur est allée saccager le quartier chrétien.
 
Le 20 mars 2010, un chrétien fut brûlé vif, et sa femme violée par la police, parce qu’ils refusaient de se convertir 
 
Au début de l’année, un couple de chrétiens a été condamné à 25 ans de prison pour avoir touché le Coran sans s’être lavé les mains.
 
On pourrait multiplier les exemples ....
 

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