Autisme : Québec et Belgique au secours de la France
par Julie Dep
lundi 17 novembre 2008
Ce n’est pas qu’en France on affecte peu, ou moins, de crédits aux établissements supposés traiter le syndrome : on le fait à tort et à travers. Un peu comme si, au lieu d’enseigner aux sourds-muets le langage des signes, on persistait à les parquer en psychiatrie - "à l’asile, comme avant l’abbé de l’Epée*.
Alors que les chamailleries du PS occupaient hier le devant de la scène, à Paris se retrouvaient, à l’initiative d’Autisme France, des professionnels décidés, quant à eux, à ne plus perdre de temps à décrier l’ancienne école, mais à agir pour tirer d’affaire ceux qui seraient en France quelques 100 000 atteints par le syndrome - dont un maigre dixième bénéficie des “pratiques innovantes” présentées à cette occasion.
Ceux qui en sortent
Ceux qui en sortent
Canadiens et Belges nous en auront appris, qu’ils enseignent ou aient bénéficié desdites pratiques. Aussi passionnant que dédramatisant, le témoignage d’un informaticien québecois d’une quarantaine d’années atteint du syndrome dit d’Asperger (de haut niveau) aura permis de comprendre les obstacles, phobies, sentiment d’injustice et “surcharges sensorielles” de ceux que leur difficulté à communiquer jette souvent dans des crises de fureur. “Bon, maintenant, j’ai encore envie d’en piquer, a admis Georges Huard, par exemple sur le périph en cas de bouchon… Mais j’ai appris à me contenir.” Plus ou moins “aveugle au contexte”, l’autiste serait attiré, parfois jusqu’à la fascination, par des détails secondaires pour les autres, susceptibles d’entraîner des malentendus, de lui coûter des amitiés : “Quand je regarde l’heure au cours d’une discussion que j’apprécie, dit encore Georges, c’est mal perçu ; alors que je la regarde pour le plaisir d’un temps qui s’écoule aussi agréablement…”
Un exil payé par la France
Faute de places sur notre territoire (!), 3000 jeunes autistes ont été évacués ces dernières années en Belgique, dans des centres payés par la France, et dont certains n’ont peut-être ouvert que pour l’aubaine d’un profit inespéré. D’autres, refusés partout, restent chez leurs parents jusqu’à la mort de ces derniers, sans aucune issue par-delà…
Si les “neurotypiques” (non-autistes, ainsi nommés par les autres, comme les “moldus” par les sorciers d’Harry Potter) comprenaient l’intérêt général qu’il y a à éduquer vers l’autonomie des enfants destinés, sinon, à demeurer une charge pour la société (charge d’autant plus lourde que leur nombre augmente chaque année) ; s’ils savaient que le coût en serait moindre - le “prix de journée” en garderie atteignant des sommets -, il est probable que notre pays cesserait en la matière d’être lanterne rouge. La solution viendra peut-être de cette prise de conscience.
J. de P.
*1712-1789. Inventeur du langage des signes