Auxiliaire de Vie Scolaire

par C’est Nabum
mercredi 26 novembre 2014

A. V. S.

Le flou scolastique

Bienvenue dans le monde merveilleux du handicap ! Vous ne serez jamais au bout de vos surprises, devant des mesures faites de bric et de broc, des promesses qui n'engagent que ceux qui espèrent s'accrocher à une branche, fût-elle vermoulue. La loi d'intégration est une belle coquille vide, un jolie duperie collective qui s'habille de verroteries.

Parmi celles-ci, il y a la présence aux côtés de l'enfant d'une personne adulte qui lui apportera aide et bienveillance afin qu'il puisse suivre sa scolarité du mieux possible. Si l'idée est généreuse, elle est porteuse de tant de défauts et d'imprécisions qu'elle distille un venin sournois. Je découvre ce phénomène dont j'ignorais tout ; les élèves de Segpa sont, quant à eux, exemptés de cette mesure pour des raisons aussi obscures qu'injustes !

L'auxiliaire de vie scolaire est une personne qui hérite d'un statut précaire dans un milieu, celui de l'école, où les enseignants sont, au contraire, protégés par leur fonction. Ajoutons alors un salaire misérable et la menace permanente de perdre le peu qui a été octroyé et vous devinez déjà que nos volontaires éducatifs sont en équilibre instable.

Cela ne serait qu'une incongruité de plus si ces aidants étaient formés à la délicate mission qui est la leur. Là, ce serait considérer que l'école est encore un lieu important pour notre société, ce qui n'est plus le cas depuis quelques décennies moroses. On balance dans le grand bain des mères de famille pleines de bonne volonté, des jeunes gens sans solution, des gens mis sur le côté du marché de l'emploi.

Leur profil est sans doute le plus conseillé pour préparer le jeune handicapé à l'impasse où il se trouvera en fin de cursus scolaire ; il faut reconnaître là l'astuce du législateur. Mais en attendant la fin des illusions, il est aberrant de demander à des adultes ordinaires de réussir là où les professionnels de l'éducation sont en échec.

Naturellement, c'est à l'inénarrable bon sens qu'il faudra faire appel pour donner du sens à des initiatives qui seront forcément individuelles, au coup par coup, sans support théorique et sans réflexion de fond sur les besoins réels en fonction d'un handicap précis. Chacun faisant alors de son mieux, avec une bonne volonté évidente et une implication bien loin de la considération réelle qui leur est accordée ….

C'est ainsi depuis toujours autour de notre école. Le bénévolat et le système D ont souvent tenu lieu de viatique pour cette belle aventure. La loi sur la réduction du temps scolaire n'a fait qu'amplifier cette impression d'amateurisme qui discrédite toutes les mesures prises au fil des lois successives. C'est ainsi que notre bon président comprend sans doute la priorité donnée à la jeunesse de ce pays !

Les AVS n'échappent pas à la règle. Elles bricolent, elles tâtonnent, elles cherchent une place dans des classes si peu habituées à la présence d'un autre adulte. Elles doivent s'estimer heureuses quand elles ne se trouvent pas installées inconfortablement à une place trop petite pour elles, comme si elles étaient élèves elles-mêmes.

L'enseignant est aussi démuni pour leur préciser la nature d'un rôle si peu défini que personne n'en comprend les contours et les limites. Qu'est-ce qu'une aide ? Quelles sont les limites de cette action ? Bien souvent on voit des AVS qui ne visent que la réussite de leur élève, ne lui laissant plus de place pour l'erreur et la recherche. Elles sont portées par le désir de la réussite quand elles ne devraient être que des truchements.

Qui peut leur reprocher cette attitude quand personne n'est venu fixer le cadre ? Pire même, elles ne savent rien du handicap de l'élève et des mesures d'adaptation qu'il faudrait prendre pour lui faciliter les apprentissages. On voit souvent des personnes adultes démunies devant un ordinateur dont elles ne comprennent pas comment il peut apporter une aide à leur « client » !

Elles n'ont pas plus été informées sur la différence qu'il y a entre un statut de mère et celui d'auxiliaire de vie scolaire. Elles manquent de distance vis-à-vis de cet enfant avec lequel elles peuvent passer jusqu'à 24 heures par semaine dans une proximité incroyable. Qui leur a donné les clefs de cette redoutable tâche ? Qui leur apporte un regard critique pour éviter les dérives inévitables ?

Personne ! vous l'aurez deviné, quand le bricolage est la règle d'un ministère sans gouvernance réelle depuis si longtemps. On prend les AVS quand elles arrivent, on leur dit bonsoir quand le contrat s'achève, sans se soucier le moins du monde de l'enfant. Combien de gamins perdent ainsi en milieu d'année celle qui les a accompagnés parce que les règles de l'administration se contrefichent du temps de l'enfant ?

Je pourrais vous dire bien des dysfonctionnements mais je prendrais le risque de dévoiler des cas particuliers. Sachez que je n'exagère en rien ; que nous vivons une situation ubuesque pour faire croire aux familles à l'égalité des chances. Rien n'est mis sérieusement en œuvre pour justifier d'une telle ambition et le gaspillage est souvent la règle dans cette farce.

Je désespère de trouver un secteur de l'éducation qui ne souffre pas des approximations d'un système qui n'est plus pensé, qui est gouverné au coup par coup, sans logique ni vision d'ensemble. Les ministres se succèdent, font leur petit cinéma, avancent des mesurettes propres à amuser la galerie et la désespérance s'accentue. Au secours, notre école se meurt !

Auxilairement vôtre.


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