Epidémiologie : l’Académie des sciences interpelle les pouvoirs publics

par citoyen
mardi 11 juillet 2006

Le Dr John Snow est devenu célèbre pour avoir endigué en 1854 une épidémie de choléra dans le district de Soho, à Londres. Il a identifié une pompe à eau publique de Broad Street comme étant la cause de l’épidémie, et en supprima le manche, ce qui mit fin à l’épidémie. Cela constitue un événement majeur de l’histoire de la santé publique, et peut être considéré comme l’acte fondateur de la science de l’épidémiologie. En France, l’épidémiologie reste la parente pauvre de la santé, même si elle constitue le fondement des actions ciblées et efficientes.

Face à la carence d’investissements dans le domaine de l’épidémiologie, L’Académie des sciences suggère la création d’observatoires épidémiologiques, dans un rapport consacré à l’épidémiologie humaine.

Ce rapport de plus de 400 pages, intitulé « L’épidémiologie humaine, conditions de son développement en France et rôle des mathématiques », a été rédigé sous la direction du Pr. Alain-Jacques Valleron, membre de l’Académie des sciences et chercheur à l’unité Inserm U707 « Epidémiologie, systèmes d’informations, modélisation » à Paris.

« Si la France peut se targuer d’avoir été un berceau de l’épidémiologie, l’analyse objective des effectifs des chercheurs et des laboratoires montre qu’elle est actuellement sous-dimensionnée par rapport aux pays comparables », peut-on lire sur le site de l’Académie. Nous voilà prévenus. Ce rapport n’est pas fait pour faire plaisir. Et d’ajouter : « Pourtant, la demande en épidémiologie, aussi bien scientifique que sociale, grandit sans cesse. » Le secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences, Jean Dercourt annonce d’emblée dans son avant propos : « L’Etat consacre chaque année plus de 10% du produit intérieur brut à la santé... pourtant l’épidémiologie, l’une des disciplines fondant la politique de santé, n’est pas assez développée en France. »

Pour remédier à cette situation, d’autant plus désastreuse que la France se veut exemplaire en matière de santé publique, l’Académie des sciences recommande donc la mise en œuvre, dans les établissements publics de recherche et/ou les universités, d’une « politique de recrutement sur emplois fixes. » Dans le contexte de marasme que connaît tout à la fois le monde de la santé et celui de la recherche, il est à parier que cette suggestion ne fera pas le bonheur des responsables politiques.

Autre suggestion : la création de puissants observatoires épidémiologiques pour mettre fin au déficit d’information, alors que dans le même temps, il est souligné qu’il existe de gigantesques bases de données construites dans des buts gestionnaires. Ces bases de données « pourraient être utilisées pour la recherche ».

Un groupe de travail pourrait être mis en place dans le cadre de l’Agence nationale de la recherche (ANR) pour décider de l’opportunité de la création et du financement d’un « petit nombre » de ces structures et des liens qu’elles auraient avec les génopôles et cancéropôles existants.


Elle préconise également la création d’équipes de recherche épidémiologique en réseau, car le défi est d’organiser dans ce domaine la multidisciplinarité.

Enfin le rapport met en exergue l’absence cruelle de formation à l’épidémiologie, et ceci du collège jusqu’à l’université.

Alors, disons-le, la mise en place d’un véritable politique de santé publique implique des moyens ; ceux-ci ne doivent pas être tant vus comme une dépense, mais au contraire comme un investissement.


Pour aller plus loin :

Vous pouvez prendre connaissance ici du communiqué de presse de l’Académie des sciences.


Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire

L’Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement - Université de Bordeaux

Épidémiologie, systèmes d’information, modélisation - Jussieu

Epidémiologie et veille sanitaire





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