Euthanasie ou suicide assisté : les mots pour le dire

par Nemrod
vendredi 28 décembre 2012

Avertissement : je propose cet article non pas pour qu'il fasse polémique mais pour créer une véritable réflexion autour de ce sujet. Il y a les pro, il y a les anti, il y a des références aux églises, nous avons nos propres croyances (ou pas). Je souhaite que toutes les opinions soient respectées et n'aborder ici le débat que pour les réflexions qu'il soulève. Je précise que, bien entendu, cet article n'a en aucune façon la prétention d'être exhaustif.

(Photo Benoit Tessier. Reuters).

Le professeur Didier Sicard, mandaté par François Hollande peu après son élection, lui a remis son rapport mardi 18 décembre.

Il reste « très prudent concernant l’aide active à mourir », nous dit Libération.

Mais la loi dite « Leonetti » d’avril 2005 a interdit l’acharnement thérapeutique et instauré le droit de laisser mourir : les médecins peuvent administrer des traitements anti-douleur pour soulager la souffrance au point d’avoir comme effet secondaire d’abréger la vie. Il se situe à ce titre contre la culture du tout-curatif.

En revanche il ne recommande pas de prendre de nouvelles dispositions législatives en urgence sur les situations de fin de vie, même si, souligne la Croix l’autorisation du suicide assisté nécessiterait une révision de la loi.

Toujours d'après Libération, le président de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) Jean-Luc Romero (élu apparenté socialiste) a appelé à dépasser la loi Leonetti « totalement insuffisante » et à remettre le patient « au centre » pour que s’il le souhaite « il puisse y avoir un geste qui permette de s’endormir sans souffrance ».

À l’inverse, le délégué général d’Alliance Vita, association anti-euthanasie, Tugdual Derville, ne veut pas que ce rapport « ouvre la boîte de pandore » de l’euthanasie mais qu’il « creuse la question complexe de la mort ». (AFP)

http://www.liberation.fr/societe/2012/12/18/debat-sur-l-euthanasie-le-suicide-assiste-preconise_868396

Un certain nombre de points concerne le lexique utilisé pour aborder ce sujet.

Euthanasie

En grec, l'euthanasie signifie la "belle mort", de Eu, bien, bon et Thanatos, mort. Aujourd'hui, le terme euthanasie désigne un geste actif entraînant un décès, commis sur un patient souhaitant mourir. Trois pays ont dépénalisé l'euthanasie : la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. On entend parfois parler d'euthanasie active ou passive, certains qualifiant le laisser mourir du protocole Leonetti d'euthanasie passive. Le terme euthanasie passive semble un non-sens car l'euthanasie nécessite une action.

Exception d'euthanasie

Les demandes d'euthanasie ne concerneraient que quelques cas chaque année en France. En 2000, le comité consultatif national d'éthique avait formulé des recommandations en faveur de la mise en place d'une "exception juridique d'euthanasie" qui ne remettrait pas en cause l'interdit pénal inscrit dans la loi. Cette disposition pose toutefois la question de savoir qui déciderait et selon quels critères d'accorder une exception à une demande d'euthanasie ?

Suicide assisté

Dans le suicide assisté, c'est le suicidant lui-même qui agit avec l'aide d’un tiers. En France, si le suicide n'est pas pénalement condamnable, la provocation au suicide si et la non-assistance à personne en danger passible de poursuites. En Suisse, il est autorisé ainsi que les associations qui le pratiquent. Elles parlent d'auto-délivrance. Il est légal dans quelques Etats américains – en Oregon depuis 1997, dans l'Etat de Washington et dans le Montana depuis 2009 – mais les associations sont interdites. Le 6 novembre, les électeurs du Massachusetts se prononceront à leur tour sur la légalisation du suicide assisté.

 

J'ai pris ici quelques exemples, mais vous trouverez des définitions plus complètes grâce à ce lien.

http://www.lemonde.fr/sante/article/2012/11/01/les-mots-cles-du-debat-sur-la-fin-de-vie_1784625_1651302.html

QUELS SONT LES POINTS SUR LESQUELS NOUS POUVONS RÉFLÉCHIR concernant cette grave et difficile question ? Il est bien certain que toutes les questions ne peuvent être évoquées dans un seul article tant le sujet est difficile et en fin de compte personnel. Le pathos et l'émotion qu'il suscite sont trop souvent l'objet d'une récupération médiatique mal conduite, objet même de sondages qui resteront toujours schématiques et donc superficiels.

L'éventail des termes utilisés montre bien combien les pratiques peuvent être différentes. Le public aussi bien que les professionnels de la santé ont parfois du mal à s'y retrouver.

  1.  C'est là justement que l'on s'aperçoit qu'une réflexion sur cette question ne concerne pas seulement la personne revendiquant le droit à mourir mais également son entourage, la société et les institutions. Il est évident que le rôle des religions monothéistes a fait reculer ce débat, et l'évolution éthique de notre culture a dû attendre des siècles afin de lever le tabou qui pesait sur lui.
  2. Un autre aspect de l'évolution de notre société qui est à prendre en compte est la médicalisation de la population et de sa fin de vie. Aujourd'hui les trois quarts d'entre nous meurent à l'hôpital. C'est un nouveau tabou qui est né avec l'évolution de la famille. Les personnes âgées sont déplacées vers des centres spécialisés car la famille à évolué. Par voie de conséquence le regard sur la mort a changé en se diluant. Mais ce déplacement du mourant vers des centres spécialisés vise aussi à épargner la souffrance dont la vue est devenue intolérable d'autant plus que les proches assistent rarement à l'agonie.
  3. Parallèlement la montée de l'individualisme nous pousse à accepter de moins en moins la fatalité, le naturel et nous entendons décider de tout, du choix de la grossesse, parfois du sexe de l'enfant et pour ce qui nous concerne aujourd'hui de l'heure et des conditions de notre mort. Nous sommes d'abord libres et nous voulons le montrer jusqu'au bout. Mais ces choix sont historiquement marqués et nous pouvons nous demander quel regard aura demain la société sur le rôle qu'auront joué sur nos choix notre cadre socioculturel, éducatif, historique ? Il est légitime également de se demander quel est le regard des professionnels de santé et comment seront jugés leurs actes dans le futur ?
  4. On rappelle souvent que la deuxième cause de mortalité des adolescents, après les accidents est le suicide. Il est nécessaire de nous souvenir aussi que le tiers des suicides elle fait de personnes ayant atteint le troisième voire quatrième âge. Mais ceci est perçu de façon moins choquante, révoltante que le suicide du jeune. La Fontaine disait : « plutôt souffrir que mourir, c'est la devise des hommes ». On peut donc se demander ce qui a changé aujourd'hui pour nous fait dire « plutôt mourir que souffrir » ? Les progrès de la médecine et de la biologie nous ont resitués davantage dans notre condition animale. La souffrance n'est plus une fatalité et l'allongement de la vieillesse l’a rendue chronique. Nos valeurs morales ont évolué et nous acceptons plus difficilement, de manière existentielle la perte d'autonomie la solitude.
  5. On peut se demander également si la volonté de mettre fin à ses jours est systématiquement considérée comme pathologique ? La réponse est non, mais il faut d'abord que l'euthanasie, le suicide assisté ou toute autre fin décidée par la personne prenant cette décision n'est pas victime d'une maladie mentale, d'une dépression etc. Ceci d'ailleurs pourrait-il constituer un critère d'empêchement à cet acte puisque celui-ci est là pour soulager la souffrance ? Pourquoi la souffrance mentale voudrait-elle moins que la souffrance physique ?
  6. Ne nous débarrassons-nous pas d'une question essentielle en légiférant sur des pratiques qui ont lieu depuis longtemps dans certaines institutions hospitalières ? Comment reconnaître le désespoir sans l'écoute et la tentative d’y répondre par le soulagement. Je serais tenté de me poser la question avant de faire un choix personnel : qu'en pensent mes proches et que souhaite-t-il ? Ma présence est-elle importante à leurs yeux ? Comment ressentent-ils ma souffrance ?
  7. Alors que doit faire le législateur qui ne pourra satisfaire tout le monde et son pair ? Il me semble comme sur beaucoup d'autres sujets que trop de lois tue la loi. Se contenter de ce qui existe en la matière, accepter la responsabilité de l'acte commis et en répondre devant la justice, considérant que chaque cas est unique me semble la seule solution. L'évolution des mentalités et la jurisprudence parlent dans ce sens.

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