L’addictature

par Voris : compte fermé
vendredi 17 août 2007

Sommes-nous tous des « accros » ? L’addiction serait-elle le mal du siècle ? Du jeune « cyber addict » (accro aux jeux vidéo), en passant par les adultes « sex-addict » (addictés sexuels) et jusqu’à la personne âgée qui n’est pas épargnée non plus. Une spécialité, l’addictologie, est née, preuve que le mal est grandissant.

Qu’est-ce que l’addiction, comment la reconnaît-on ? Quelles sont ses formes ? Comment lutter contre ? Plusieurs de ces questions n’ont pas encore obtenu de réponses satisfaisantes. Nous allons donc nous contenter d’un tour d’horizon et de quelques explications sommaires. Dressons tout d’abord un petit lexique des termes employés.

L’addictionnaire

- Addiction et assuétude : le mot addiction vient de l’anglais. L’équivalent français serait assuétude ou dépendance. Seulement le mot "dépendance" est plus limité dans son champ de définition ; il évoque la dépendance à une substance. Le mot assuétude pourrait convenir, mais on lui préfère addiction dont le sens latin rappelle l’idée de dette et d’esclavage. L’addiction est bien une forme d’esclavage à un produit, une activité, une personne...

- Homéostasie et allostasie : l’homéostasie est la capacité à conserver l’équilibre de fonctionnement en dépit des contraintes extérieures. Par l’exercice d’une activité agréable, nous activons les circuits cérébraux de la récompense. Une fois le plaisir disparu, notre cerveau retrouve son état initial. Ce mécanisme d’équilibre est l’homéostastie. L’allostasie s’applique aux cas d’utilisation de drogues. Celles-ci agissent comme des leurres de nos mécanismes naturels de récompense. Elles dérèglent le fonctionnement normal du cerveau.

- Craving : le craving vient de l’anglais « désir ardent, appétit insatiable ». Il désigne le désir compulsif de reproduire le comportement addictogène malgré plusieurs années de sevrage.

La table d’addictions

Il semble que les addictions se multiplient et qu’il est de plus en plus difficile de s’y soustraire ! Voici une lite de pathologies parmi lesquelles vous reconnaîtrez peut-être la vôtre :

- l’alcool : "Garçon, un café et l’addiction !"


- le tabac : "Dépendant ? ça dépend..."
- les médicaments psychotropes : "Pour vivre heureux, vivons cachets !"
- les drogues : "Accro qu’aux deals ?"
- les jeux d’argent : "L’argent ne fait pas le bonheur, mais il fait le plaisir."
- le sport intensif : "L’assuétude attitude."
- la cyberaddiction : "Le PC était fermé de l’intérieur, son utilisateur aussi."
- le sexe : "Accroc qu’est la pomme."
- le travail : "L’addictaphone par exemple..."
- l’achat compulsif : "La fièvre acheteuse."
- l’obsession du respect de l’orthographe : "L’addicté de Pivot."

Liste non exhaustive à laquelle on pourrait ajouter l’"addictionnaVox", l’addiction à Agoravox.

Le mécanisme de l’addiction

L’addiction s’installe en trois étapes : 1 / L’usage normal : la découverte 2 / L’abus, la quête insatiable du plaisir 3 / La dépendance.

Pour s’en sortir : le sevrage et le travail sur soi sont nécessaires, mais dans cet ordre seulement, car le travail sur soi n’est possible qu’une fois sorti de la tyrannie de la dépendance. Pour les toxicomanes, le sevrage peut se faire grâce à l’emploi de produits de substitution. Ceux-ci ne suppriment pas la dépendance cérébrale à la substance, mais permettent de retrouver une vie normale.

Dans certains cas extrêmes, l’hospitalisation psychiatrique est la seule solution. Ainsi, en France, en 2006, deux jeunes hommes ont été hospitalisés en service psychiatrique pour avoir abusé des jeux vidéo. Ils s’étaient progressivement déconnectés de toute vie familiale et sociale et engloutis dans l’univers parallèle d’un jeu de rôle en ligne massivement multi-joueurs.

"Je reçois un nombre croissant de jeunes accros aux jeux vidéo", confirme Michaël Stora, psychologue clinicien et psychanalyste, à l’origine de l’hospitalisation des deux jeunes "cyber addicts". Il est aussi le fondateur de l’Observatoire des mondes numériques en sciences humaines (OMNSH). Il classe les joueurs en trois catégories : les occasionnels, les excessifs et les dépendants véritables. Ces derniers - qui se désignent entre eux comme des "no-life" - passent de dix à quinze heures par jour devant leur écran durant des semaines, puis des mois.

En 1975, quand le psychosociologue Stanton Peele écrivit "Love and Addiction" et fit pour la première fois le lien entre le phénomène de dépendance et l’expérience en dehors de toute utilisation de substances chimiques, il n’avait pas anticipé le développement des nouvelles technologies et les nouvelles dépendances afférentes. Aujourd’hui, le mobile, l’ordinateur, la console de jeu sont autant d’addictions en puissance pour chacun de nous et surtout chez les plus jeunes.

J’addictionne, tu addictionnes, il addictionne...

Un cinéaste prépare un film sur la cyberdépendance et recherche des témoignages sérieux : Voir ici.

A lire sur Agoravox cet article sur le phénomène de la "no life".


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