Les antiviraux sont-ils efficaces dans le traitement de la grippe ?

par VERCOUTERE
jeudi 27 octobre 2005

Selon un rapport de l’office canadien de coordination de l’évaluation des technologies de la santé (OCCETS), le Tamiflu et le Relenza ne seraient pas plus efficaces qu’un placebo dans les traitements préventif et curatif de la grippe (rapports technologiques de janvier et novembre 2001).

Alors que, depuis deux ans, la grippe aviaire restait circonscrite en Asie du Sud-Est, l’Organisation mondiale de la santé (Oms) multiplie, depuis février 2005, les messages d’alerte auprès de la communauté internationale sur le risque d’une pandémie de grippe aviaire. Bons élèves, les pays riches « préemptent des stocks massifs de vaccins en cours de production », contre un virus qui, par la sélection de virus plus virulents et agressifs, aura toujours une longueur d’avance. Ces mêmes pays constituent également, à prix d’or, des réserves d’un médicament antiviral, « l’oseltamivir (Tamiflu) -qui est, avec le zanamivir (Relenza), le seul antiviral actif sur le virus A/H5N1 »(expérimenté sur quelques dizaines de personnes !) selon la Direction générale de la santé. Les Américains ont ainsi passé une commande pour 1 milliard de dollars, la France ou l’Angleterre se contentant chacune de plus de 20 à 40 millions de traitements individuels en prévention d’une éventuelle pandémie*. « En contact permanent avec l’Oms » et spéculateur avisé, le laboratoire Roche, qui avait acheté en 1999 la licence de cet antiviral, doublera en 2005 sa production, après l’avoir déjà multipliée par deux en 2004. Il prévoit ainsi un chiffre d’affaires de 660 millions de dollars, amputé, il est vrai, d’un don de 3 millions de traitements individuels, consenti à l’Oms le 24 août dernier, c’est-à-dire à la veille de la réunion des services vétérinaires des vingt-cinq États membres de l’Union européenne. Le Tamiflu « n’a pas encore fait pleinement la preuve de son efficacité » dans le traitement de la grippe aviaire ; alors que le premier cas de résistance vient d’être signalé, son efficacité, pourtant reconnue par les instances sanitaires dans le traitement préventif et curatif de la grippe, est totalement remise en cause par un rapport de synthèse d’études réalisé par l’OCCETS. Parmi 117 sources de référence, les auteurs de l’étude ont retenu six essais cliniques, menés durant la période de pointe de la saison grippale entre 1997 et 1999, et qui se conformaient aux critères d’admissibilité. 1735 personnes dont 469 dites « à risques de subir des complications » ont participé à cette étude en double aveugle, placebo contre Tamiflu. Dans le cadre de l’estimation commune de tous les essais cliniques, plus de 70 % des participants étaient âgés de 18 à 65 ans et en bonne santé par ailleurs.


-  Cette méta-analyse ne démontre pas de réduction statistiquement significative des taux d’hospitalisation et de mortalité chez les participants traités par l’oseltamivir, par rapport aux participants sous placebo.
-  Les auteurs sont arrivés aux mêmes conclusions concernant les complications comme l’otite, la sinusite, la bronchite ou la pneumonie.  Seule la reprise de l’activité est légèrement plus rapide avec le Tamiflu, tandis que, à l’inverse, les effets secondaires seraient légèrement plus élevés avec le placebo ! Un seul cas de résistance au Tamiflu avait été signalé sur 175 prélèvements. Un rapport sommaire de la FDA ne laisse cependant aucun doute sur les cas de résistance qui ne seraient pas tous signalés. Pour être complet, tandis que le Relenza est contre-indiqué avant l’âge de seize ans, le Tamiflu l’est avant l’âge d’un an, des études chez le jeune rat ayant montré qu’à des doses importantes, le Tamiflu se retrouve dans le cerveau, source d’une mortalité importante.

Une autre étude, réalisée par l’OCCETS en janvier 2001, concernant le zanamivir, arrive aux mêmes conclusions. « Pour un régime gouvernemental d’assurance-maladie, il coûterait plus cher de distribuer du zanamivir à toute la population que les avantages qui en découleraient », selon l’un des auteurs du rapport, Bruce Brady, économiste de la santé. En se faisant le VRP des laboratoires pharmaceutiques, qui ne sont pas des modèles de vertu, comme en témoignent les affaires récentes du Vioxx, du Prozac « guère plus efficace qu’un placebo » mais responsable de nombreux suicides et homicides... l’Oms serait-elle toujours « le bateau ivre de la santé publique » ?

* En commandant 40 millions de traitements antiviraux individuels, la France aura dépensé autour de 2 milliards d’euros pour un ... médicament guère plus efficace qu’un placebo !


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