Les ruses de Pharma-City
par olivier cabanel
lundi 16 août 2010
L’épisode H1N1 a fait long feu, et il ne reste aux Français qu’a constater les dégâts, et à en payer les conséquences : 700 millions d’euros.
Or, le contrat passé entre l’état et les labos, vient de voir son secret levé.
Roselyne Bachelot prétend dans un communiqué AFP en être à l’origine mais, c’est un gros mensonge. lien
On le doit à la pugnacité de « Rue 89 » et à l’action de Gérard Bapt (député PS)
(Totalité du document sur ce lien).
Aux 700 millions qu’a couté l’achat des vaccins, il faut ajouter la dispendieuse campagne de promotion gouvernementale pour la vaccination. (500 millions) et le prix du « Tamiflu » qui sera périmé dans 15 jours.
Les 30 millions de dose ont dépassé la barre des 500 millions. lien
Total définitif, au moins 1,7 milliards d’euros. lien. Certains ont démissionné pour moins que çà.
La pilule est dure à avaler, même avec cette chanson
A la lecture du contrat dévoilé on apprend que « la « survenance d’effets indésirables attendus ou inattendus ou le manque d’efficacité ne constitueront pas une violation de la garantie ».
Dans un rapport récent, présenté par Alain Milon, la France est soupçonnée au mieux d’incompétence, lien au pire de conflit d’intérêt. lien
Depuis que l’OMS a donné la liste des 15 experts qui ont géré la crise, on sait que 5 d’entre eux ont collaboré étroitement avec les laboratoires. lien
L’OMS est accusée, tout comme la France d’avoir été sous le joug des laboratoires.
François Autain, (sénateur PC), appuyé par Alain Milon (sénateur UMP) déclare : « pour l’industrie pharmaceutique, la déclaration d’une pandémie était vitale (…) le gouvernement à dramatisé la communication et travesti la réalité au lieu de modifier son plan pour l’adapter à la réalité du risque » lien
Il dénonce les liens financiers entres les experts consultés et les laboratoires. vidéo
Après le bonimenteur présidentiel, voici venu le temps des « médicamenteurs ».
C’est le titre d’un film réalisé par Stéphane Horel, Annick Redolfi et Brigitte Rossigneux diffusé sur « la 5 » le 24 juillet 2010 (reprogrammé le 20 août, à 1h25 du matin)
Dans ce documentaire passionnant, on découvre par exemple le « Vioxx » médicament censé combattre l’arthrose, commercialisé en 1999, et retiré de la vente le 30 septembre 2004. lien
Il produisait des effets secondaires graves, voire mortels. vidéo
Pourtant une revue indépendante, « Prescrire » sans sponsors médicaux, avait alerté clairement les consommateurs en juillet 2000 des dangers induits par ce médicament. lien
Le « Vioxx » est responsable aux USA de 140 000 accidents cardio-vasculaires, et de la mort de 60 000 personnes. lien
Pour la France on suppute 1000 cas d’effets indésirables, et la mort de 32 patients, mais la politique du secret semble de rigueur.
En 2001, une étude avait mis en évidence ces risques, mais l’AFSSAPS (agence françaises de sécurité sanitaire des produits de santé) n’en avait pas tenu compte.
La France détient le record du monde de consommation des médicaments, lien et celui des décès dus aux médicaments. lien
Pour comprendre les risques que nous courrons, il faut suivre le parcours du médicament.
Le Professeur Philippe Even, membre de la CAMM (commission d’autorisation de mise sur le marché des médicaments) a découvert avec effarement les coulisses des décisions.
Comme il l’affirme : « je ne crois pas qu’on puisse être libre quand on juge son employeur ».
L’indépendance de cette commission pose en effet problème, puisqu’elle est financée à 80% par les entreprises pharmaceutiques (lien) ce qui a été dénoncé par le Sénat dans un rapport. lien
De plus, les experts consultés par la commission ont des liens d’intérêt avec les laboratoires et ils sont 67% à avoir des liens avec l’industrie pharmaceutique et on comprend mieux pourquoi 95% des médicaments obtiennent le feu vert.
La HAS (haute autorité de santé) a une autre mission, c’est celle d’estimer les performances des médicaments mis sur le marché, sur une grille allant de 1 à 5.
On constate alors que 83% des médicaments disponibles sont peu ou très peu efficaces. lien
Les enjeux du marchés sont importants, puisqu’un médicament peut rapporter jusqu’à 1 milliard de dollars par an, comme par exemple le Plavix, du laboratoire Aventis, qui permet de fluidifier le sang, tout comme l’aspirine, (ou même comme deux verres de vin, dixit le professeur Even) sauf qu’il vaut beaucoup plus cher. (Près de 60 € la boite), soit 27 fois le prix de l’aspirine.
On comprend mieux l’une des raisons du trou de la sécurité sociale, puisqu’elle rembourse un médicament très cher, et quasi inutile.
Une autre aventure est intéressante, c’est celle du Mopral (il soigne les problèmes gastriques, les ulcères).
Il allait tomber dans le domaine public, ce qui permettait la diffusion d’un médicament générique, à bas prix.
Le fabricant eut donc l’idée « géniale » de lancer un nouveau médicament, quasi identique au précédent, l’Inexium, lequel occupa tout le marché, condamnant le médicament générique à l’oubli.
Aujourd’hui, pour augmenter leurs bénéfices, les laboratoires font un marketing de plus en plus assidu, et chaque jour d’une année, un docteur reçoit l’un des 25 000 « visiteur médical ».
Pour être plus efficace, considérant que la plupart des médecins sont des hommes, les entreprises pharmaceutiques choisissent comme représentant des femmes, à 75%. lien
Face à eux, l’UNCAM (union nationale des caisses d’assurance maladie) n’a que 2500 conseillers.
C’est le pot de fer contre le pot de terre.
D’autant que les entreprises pharmaceutiques financent la quasi-totalité de la formation continue des médecins, tout en affirmant leur totale indépendance des uns envers les autres. lien
Hubert Allemand, directeur adjoint de l’UNCAM s’est refusé à tout commentaire sur la convergence d’une campagne gouvernementale contre le tabagisme, avec le lancement d’un produit proposé quasi en même temps, par l’entreprise Pfizer, le Champix.
On découvrit par la suite, qu’il provoquait d’importants effets secondaires, provoquant des dépressions pouvant conduire au suicide. lien
D’autres surprises attendent les patients, tel l’Acomplia, (76 € la boite) médicament destiné à soigner l’obésité et le diabète.
Il permet de perdre des kilos et de les regagner des que l’on arrête le traitement.
Ce « médicament » a connu une campagne promotionnelle exemplaire de 2 mois dans tous les médias, y compris Internet, sauf que le médicament miracle provoque des dépressions en chaîne, voire des suicides. lien
De plus le laboratoire ciblait les USA où le nombre d’obèse impressionnant autorisait tous les espoirs, mais ceux-ci ont refusé le médicament.
On comprend mieux la volonté de Sanofi, et de son directeur de la stratégie, Philippe Tcheng, de neutraliser la presse grand public. lien
Autre scandale à venir : GSK aurait tenté de dissimuler les effets vasculaires négatifs d’un remède contre le diabète, « l’Avandia » menacé d’interdiction. lien
L’opacité est la règle chez GSK. lien
Or l’Avandia a provoqué 83 000 accidents cardiaques aux USA, et l’EMA (agence européenne du médicament) a décidé de « procéder à des compléments d’analyse ». lien
Les mauvaises actions de l’industrie pharmaceutique sont mêmes parfois du domaine du chantage.
En Grèce, par exemple, des labos ont refusé de livrer certains médicaments, dont ils étaient tenus de baisser le prix de 25%. lien
Pour relancer la consommation, on en est aujourd’hui à proposer de nouvelles maladies, (et donc de nouveaux remèdes) comme la « maladie du lundi matin », dénommée pompeusement le TDLM (trouble dysphorique du lundi matin).
Pour faire simple, c’est la déprime de recommencer une semaine de boulot.
Pour cela, Luc Ratif, psychopharmacologue nous explique le plus sérieusement du monde qu’il s’agit « d’un problème majeur de santé publique, caractérisé par un ensemble de symptômes qui ont pour caractéristique de survenir durant la matinée du premier jour de la semaine ».
Il continue, « les symptômes sont les suivants : manque d’énergie, irritabilité, un repli social, une anxiété, un ptosis bilatéral (difficulté à relever les paupières) ( !)… »
En gros, on n’a pas envie de bosser, et on préférerait un weekend end de trois jours, voire d’une semaine.
Et tant pis si Sarkozy n’est pas d’accord, lui qui proposait de « travailler plus pour gagner plus » car si pour travailler plus, il faut dépenser plus, on n’en voit pas l’intérêt.
Aujourd’hui l’industrie pharmaceutique est donc, on l’a bien compris, une industrie avant tout, plus préoccupée par remplir ses caisses, que par nous soigner.
Car comme disait mon vieil ami africain :
« Pas besoin d’atteindre le soleil pour profiter de ses rayons ».