Lutte contre le sida : « Agir partout, maintenant »
par hans lefebvre
mardi 5 août 2008
Lundi soir, à Mexico s’ouvrait la 17e conférence mondiale sur le sida (syndrome d’immunodéfiscience acquise) qui, durant six jours, devrait permettre une nouvelle focale sur l’épineux virus dont, à ce jour, 33 millions de personnes sont affectées (42 millions selon certaines sources). C’est le secrétaire général des Nations unies qui ouvraient cette cession, en présence aussi du président mexicain, Felipe Calderon ainsi que de la directrice générale de l’OMS, Margaret Chan. 22 000 convives sont attendus, dont 2 500 personnes séropositves qui témoigneront de leur quotidien commun de malade, mais forcément inégaux devant cette affection tant la situation des soins apparaît disparate, selon la région du monde où l’on se situe.
« Agir partout et maintenant » tel est le mot d’ordre de la conférence de Mexico, et sa pertinence sonne comme une évidence tant la mondialisation de la pandémie est désormais une donnée incontournable avec, toutefois, une surreprésentation sur le continent africain, qui à lui seul représente entre 70 % et 80 % des personnes infectées sur la planète, soit entre 21 et 22 millions de personnes selon le rapport ONUSIDA [1]. Autre indicateur très inquiétant pour les pays de l’Afrique australe, le taux de prévalence chez les adultes qui oscille entre 15 % et 28 %, alors qu’en France, par exemple, ce taux se situe dans une fourchette de 0,1 %à 0,5 %. Enfin, soulignons que 2 millions d’enfants dans le monde vivent avec cette infection !
De fait, le slogan qui avait été déployé lors de la conférence de Durban « les malades sont au sud, les traitements sont au nord » reste parfaitement d’actualité, c’est donc un but fondamental que de pouvoir établir une plus grande équité planétaire dans l’accès aux traitements contre le sida. On sait aujourd’hui que l’objectif, qui devait être atteint en 2010, ne le sera pas avant 2015, l’échéance est donc repoussée, notamment du simple fait des brevets commerciaux qui empêchent toute diffusion massive, les financements dans les pays les plus pauvres étant largement insuffisants : « Le Rapport sur l’épidémie mondiale de sida 2008 paraît à mi-parcours entre la Déclaration d’engagement de 2001 et la date-butoir de 2015 pour l’un des objectifs du Millénaire pour le développement qui vise à inverser l’épidémie d’ici cette date. » Pourtant, le rapport souligne aussi que les financements ont été multipliés par six pour venir en aide aux pays les plus démunis, et les effets concrets pourraient être bientôt apparents.
Mais la prudence reste de mise, les progrès n’étant pas homogènes, l’évolution de la pandémie ne laisse entrevoir aucune certitude en la matière, c’est donc vers l’universalité de l’accès à la prévention, et aux soins, que doit tendre la politique internationale, auquel cas tous les efforts consentis ne pourront porter tous les fruits attendus.
En outre, le rapport nous rappelle aussi que, si le nombre d’infections annuelles est en baisse, il demeure toutefois élevé, puisqu’en moyenne 2,7 millions d’individus supplémentaires sont contaminés chaque année ! La maladie reste donc à un niveau insupportable, et il faut le marteler sans fin afin que la vigilance reste de mise.
Autre aspect, et non des moindres, sur lequel souhaite insister la conférence de Mexico, à savoir la lutte contre les discriminations, mais aussi contre l’homophobie, deux dommages collatéraux de la pandémie. En effet, près de vingt-cinq ans après la découverte du virus, nombre de représentations restent fermement ancrées dans les esprits, générant encore quantité de comportements qu’il faut fermement condamner afin que les malades puissent ne pas avoir à subir, en plus de leur pathologie, les affres de la vindicte populaire.
Les auteurs du rapport de souligner dans ce sens : « Pour riposter à l’épidémie de VIH durablement et avec tout le succès voulu, il va falloir sans relâche travailler et avancer sur les questions relatives aux violations des droits de l’homme, des inégalités entre les sexes, de la stigmatisation et de la discrimination. Ces facteurs sociaux diffèrent de par leurs manifestations, leur intensité et leur impact entre les régions et au sein de ces dernières ; elles sont présentes à divers degrés dans le monde entier, et dans tous les cas font obstacle à une riposte efficace, fondée sur des preuves et sur les droits humains. »
Dans ce sens, un des graphiques du rapport nous indique par exemple que seuls 50 % des pays d’Europe occidentale ont adopté une législation de détection et de protection contre les discriminations à l’endroit des personnes séropositives (derniers du classement), alors que 100 % des pays d’Asie de l’Est et d’Amérique du Nord s’en sont dotés, et 80 % des pays d’Amérique latine.
Sur ce plan, la conférence ne devrait pas manquer de rappeler les grands principes fondamentaux, mais aussi devrait annoncer un plan d’action concret afin de faire évoluer les mentalités et les représentations vers plus de tolérance. Pédro Cahn, président de cette 17e conférence, de marteler « c’est le virus qu’il faut combattre, pas les hommes ». Cette sentence résume parfaitement ce vers quoi il faut tendre, car moins on discrimine, mieux on peut soigner.
Aussi, tous ces éléments démontrent combien le combat n’est pas gagné face à cette pandémie désormais enkystée dans le devenir de l’humanité, mais aussi combien un travail de fond reste d’actualité afin de faire évoluer les représentations et les mentalités, tant au niveau de la perception de la dangerosité de la maladie, que des discriminations induites. La conférence de Mexico devrait permettre de réactualiser l’ensemble des savoirs tout en pointant du doigt l’ensemble des faiblesses du système global de prise en charge de la maladie. Dans ce sens, la lutte contre le sida est aussi fortement corrélée aux progrès en matière de développement humain, cette affection portant un grand préjudice à l’humanité entière. C’est dans la globalité que les solutions pérennes sont envisageables. La maladie concerne autant les pays pauvres que les pays les plus riches, mais aussi tous les individus qui composent un groupe humain. Se croire à l’abri, se penser protégé demeure une erreur d’appréciation gravissime et infondée.
En un sens, le sida doit nous faire prendre conscience [2] combien nos destinées n’ont jamais été aussi fortement imbriquées les unes dans les autres. La lutte contre cette affection doit démontrer toute l’universalité des humains désormais unis dans une communauté de destin.
[1] Rapport sur l’épidémie mondiale du sida.
[2] Les intervenants dans la lutte contre le sida :
- http://www.solidarite-sida.org/index.php3?dossier=sidamst&partie=sidamst_index
- http://www.aides.org/?gclid=CJ7rt82u9JQCFSGzEAodQ1BaqQ
- http://www.vih.org/associations.htm
- http://www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/sida2/