Mourir à Tchernobyl
par olivier cabanel
mercredi 5 mai 2010
24 ans après la catastrophe, on meurt toujours à Tchernobyl.
Morts fatales puisque les sols contaminés ne peuvent que produire des légumes et fruits contaminés. Les animaux étant touchés eux aussi, c’est en fin de chaîne que l’homme récolte les fruits du drame.
Dans le camp nucléaire, on continue de prétendre scandaleusement que seules 56 personnes sont mortes suite à cette catastrophe.
Le rapport 2005 de l’AIEA (agence internationale de l’énergie atomique) évoque 56 morts (47 secouristes et 9 enfants) lors de l’accident, et 4000 morts suite aux rayonnements. lien
Ces chiffres « optimistes » ne plaident pas en faveur de la crédibilité de l’AIEA, ni de son indépendance.
La WHO (World Healthl Organization) se réfère à une étude portant sur 72 000 travailleurs russes dont 212 seraient morts suite aux radiations, mais ne dit rien sur les 600 000 personnes employées sur le site après la catastrophe. lien
Selon une étude scientifique britannique, le nombre de décès liés à Tchernobyl devrait atteindre entre 30 000 et 60 000. lien
En avril 2006, Greenpeace a publié un rapport inédit et réalisé par 60 scientifiques du Belarus, d’Ukraine et de Russie.
Ceux-ci estiment la l’AIEA a largement sous estimé les conséquences de la catastrophe.
Ils concluent que 200 000 décès ont déjà étés constatés ces 15 dernières années, et qu’à l’avenir près de 100 000 cancers mortels découleront de cette catastrophe. lien
Pour Jean Marc Jancovici, les comptes ne sont pas bons. (L’avenir climatique/édition du seuil 2002, page 236)
Il ne limite pas le nombre de morts au pourcentage des 600 000 personnes ayant travaillé sur le site après l’accident. lien
Il évoque les effets stochastiques (effets qui comportent la présence d’une variable aléatoire).
24 200 personnes sur 135 000, dans un rayon de 20 km autour du site a reçu plus de 200 mSv peuvent faire l’objet de la règle dose-effet.
Il évoque un potentiel de 6000 morts par cancer.
Koffi Annan quant à lui évoque un tout autre chiffre : 7 millions de personnes auraient été affectés par le drame.
Il faut se souvenir que l’alerte n’a été donnée que le lendemain en ce qui concerne les 45 000 habitants de Pripyat, lesquels ont été évacués le 27 avril.
Alors que le réacteur explosé de la centrale crachait sa radioactivité, 900 élèves âgés de 10 à 17 ans faisaient un « marathon de la paix » en tournant autour de la centrale.
Dans la semaine qui a suivi l’accident, plus de 135 000 personnes ont été évacuées, et elles avaient déjà été largement irradiées.
Entre le 27 avril et le 7 mai les habitants des villes et villages situés dans un rayon de 30 km autour de la centrale furent évacués, soit environ 250 000 personnes.
Un millier de ces personnes sont revenues vivre dans la région contaminée, bravant le danger.
On se souvient aussi qu’en France, le gouvernement nous avait affirmé que la pollution s’était arrêtée à la frontière.
Sur place, le césium 137 s’est déposé dans un rayon de 100 km autour de la centrale, puis à 200 km au Nord Nord Est de la centrale, et enfin à 500 km au Nord-Est.
Or le césium 137 a une période de 30 ans (il perd la moitié de sa virulence en 30 ans, puis la moitié de cette moitié les 30 ans suivants etc.)
Cela signifie que les terres contaminées le sont pour un bon siècle, et que cette contamination a pu se déplacer au gré des récoltes, de la consommation de produits contaminés, ou des réseaux hydrauliques, et de l’évaporation.
Or 7 millions de personnes résident encore dans les territoires contaminés par le césium 137 de Tchernobyl et tout dépend du fait de leur consommation ou pas de produits contaminés. lien
Combien sur ces 7 millions de personnes vont mourir un jour d’un cancer dû à Tchernobyl ?
Personne ne semble être en mesure de le dire.
Alors, plutôt que de tenter d’exagérer ou de minimiser les effets de Tchernobyl, ne serait-il pas plus sage d’œuvrer en amont pour empêcher qu’une telle catastrophe se reproduise un jour.
La meilleure manière n’est-elle pas de tourner définitivement la page de cette énergie dangereuse, et polluante ?
En effet, on le voit, malgré toutes les précautions, un accident nucléaire est toujours possible.
On sait aujourd’hui que l’EPR dont les nucléocrates nous vantent comme la meilleure technologie nucléaire, ne résisterait pas à la chute d’un avion de ligne. lien
On sait aussi que les exercices de sécurité dans les centrales nucléaires française tournent parfois à la pantalonnade, que les accidents se multiplient, et que le risque d’inondation d’une centrale nucléaire n’est pas écarté. lien
Alors, comme disait mon vieil ami africain :
« Le chameau ne voit pas la bosse qu’il a sur le dos ».