Phtalates et Augmentin : le profit avant la vie

par Pharmafox
mercredi 27 juillet 2011

GlaxoSmithKline est contraint de rappeler des lots d'Augmentin destiné aux enfants, suite à la présence de phtalates découverts par les autorités chinoises.

On pensait se méfier suffisamment des phtalates. Cette famille de produits est utilisée comme plastifiant, c’est-à-dire comme produit qui rend les plastiques plus souples (ils font la même chose que ce fameux bisphénol A que tous les fabricants de biberons assurent ne plus utiliser). Les plus toxiques ont été interdits dans les jouets pour enfants et articles de puériculture. Dans l’Union Européenne, le DEHP (di-2-éthylhexyle phtalate) est interdit dans les produits cosmétiques.

 

Que reproche-t-on aux phalates ? Les phtalates font passer le plastique dans le corps humain. Les effets les plus connus sont tératogéniques (ils affectent notre capacité à nous reproduire) : stérilité, réduction de la taille des organes sexuels, malformation et anomalies chez les enfants qui ont été exposés avant leur naissance. Ajoutons à cela des effets sur les reins et le foie (1).

 

Les industriels ont donc entrepris de bannir ces composés nocifs de leurs produits quand le risque d’exposition est réel. Ce n’est pas la peine par exemple, de supprimer les phtalates des gaines de câbles électriques, à moins que vous n’ayez gardé des séquelles de votre précédente (ré)incarnation en rat.

 

On peut donc être légitimement inquiet d’apprendre que GlaxoSmithKline (ou GSK) vend en Chine de l’Augmentin (Amoxicilline, un antibiotique), contenant du DIDP (diisodécyl phthalate), du DEHP et du DINP (diisononyl phthalate). Le laboratoire répond, laconique, que les quantités de phtalates sont trop faible pour constituer un risque d’accumulation. Les standards européens sont respectés (2). Seulement, c’est une chose qu’un standard pour un produit que l’on touche (un jouet), c’en est une autre pour un produit qu’on s’applique sur le corps (cosmétique), et plus encore pour un produit que l’on ingère. Si l’argument est reconnu comme en partie recevable par les chinois, ceux-ci préparent néanmoins une action en justice.

 

Un premier rappel de produit avait été imposé en juin, mais limité : seule la forme sous sirop était rappelée. Un laboratoire responsable se serait dépêché d’enquêter pour savoir s’il fallait en faire plus, mais un rappel coûte cher et GSK a préféré jouer la chance… et a perdu : les autorités chinoises viennent d’imposer le rappel de l’Augmentin sous forme de sachet, après y avoir également trouvé des traces de phtalates.

 

Au fait, le sirop est prescrit aux enfants… C’est beau de voir qu’on les protège en leur retirant des cubes en plastiques pour mieux les empoisonner directement. Cocorico ! Le produit incriminé est fabriqué en France. On ne dira plus que notre pays est complice de la situation au Tibet, puisque nous voilà en première ligne pour limiter la démographie chinoise (d’accord, cette phrase-là, c’est de pure provocation). Plus sérieusement, on voit encore une fois éclater tout le sérieux et le professionnalisme des instances sanitaires chargées de nous protéger.

 

L’affaire du lait pour bébé empoisonné à la Mélamine avait fait tomber quelques têtes, (presque) au sens propre (3). Même s’il n’y a pas eu de mort avec cet Augmentin « enrichi », comment s’en sortira GSK ?

 

1. Phtalate, Wikipedia

2. Recall of GSK's Augmentin tablet ordered due to plasticizer, Shan Juan, China Daily, 19 Juillet 2011

3. Chine : Peines de mort dans le scandale du lait à la Mélamine, Euronews, 22 Janvier 2009


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