Quand le système de santé est grippé
par Dominique LE HOUEZEC
lundi 7 décembre 2009
Parmi le déferlement d’informations médiatiques concernant l’épidémie grippale en cours, il est bien difficile au citoyen lambda de se faire une opinion sur la nécessité ou non de se faire vacciner contre un virus que l’on présente comme de plus en plus virulent. Ce choix est d’autant plus difficile qu’un climat de peur et de panique se fait jour, rendant tout raisonnement rationnel impossible. Comment en est-on arrivé là et pourquoi la foule se presse-t-elle au sein des centres de vaccination ?
Quasiment tous les professeurs de Médecine que l’on entend sur les ondes ou qui sont invités sur les plateaux télévisés développent une argumentation simple : la maladie grippale est grave, le vaccin est très efficace et sans danger. Ils se font ainsi l’écho des avis officiels gouvernementaux qui centralisent eux-même l’avis d’experts dont l’indépendance par rapport à l’industrie pharmaceutique gagnerait à être précisée (1).
Parallèlement à l’avis dogmatique des médecins hospitaliers, confrontés par essence aux formes les plus graves des maladies infectieuses, il serait intéressant d’entendre le point de vue des médecins de terrain, médecins généralistes et pédiatres libéraux. Il est par exemple très instructif de prendre connaissance des réflexions sérieuses et contrastées des Dr Dominique DUPAGNE (2) et Christian LEHMAN (3) sur leurs sites Internet respectifs. On y voit développés trois aspects importants de cette épidémie, points négligés par les spécialistes hospitaliers et les experts officiels.
1. L’histoire naturelle de la grippe et de la vaccination anti-grippale. Le fait de proposer d’emblée à toute la population une vaccination généralisée pourrait empêcher de facto toute immunité naturelle de se mettre en place chez celle-ci. De ce choix, il découle que l’on s’engage de façon inéluctable, et ceci tous les ans, vers une vaccination généralisée de cette même population. Le "crû vaccinal 2010" inclura donc tout naturellement une souche du virus "mexicain" actuellement actif comme avaient été insérés dans le passé et de façon probabiliste des dérivés de la souche espagnole et du virus de Hong-Kong dans ce qu’il est maintenant convenu d’appeler le vaccin de la "grippe saisonnière". Pourquoi pas ? Mais cet implicite et cet absence de réel débat au sein de la communauté médicale semblent des décisions subjectives et trop précipitées.
2. La décision du Minisitère de la Santé, sous la férule de Roselyne BACHELOT a été prise rapidement en juin dernier. Il faillait élaborer un vaccin "pandémique" selon une procédure d’urgence. Cette même technique, mise au point quelques temps plus tôt pour contrer la prolifération du virus aviaire (H5N1), peu contagieux mais beaucoup plus redoutable puisque pouvant aboutir à un taux important de décès (environ 50%). Dans ce cas de figure, l’adjonction de conservateurs antérieurement abandonnés (thiomersal) ou d’adjuvants de l’immunité pour lesquels des doutes avaient été soulevés (squalène) étaient ici secondaires et acceptables si le besoin d’une vaccination à large échelle s’était fait sentir.
Cela n’est absolument pas le cas pour le virus actuel (H1N1), certes très contagieux mais infiniment moins dangereux si l’on en croit les chiffres de mortalité relevés au sein des pays de l’hémisphère sud où l’épidémie s’est à présent éteinte. On peut accorder l’excuse, qu’à ce moment, en juin dernier, les données clinique n’étaient pas encore très claires pour le nouveau virus mexicain. elle aurait pu se hâter lentement mais l’activisme et l’excitation sont visiblement hautement contagieux dans les sphères actuelles de l’Etat.
3. Ce qui est par conte incompréhensible, c’est l’organisation militaro-administrative de la campagne vaccinale actuelle et des questions qu’elle soulève :
Pourquoi disposer "du meilleur système de santé du monde", avec des praticiens libéraux rompus à vacciner des générations de patients si c’est pour leur opposer une fin de non collaboration ou tout au mieux une réquisition pour les transformer en vulgaires officiers de santé ?
Pourquoi avoir ainsi court-circuité l’accès direct à des praticiens qui connaissent très bien leurs patients et auraient pu ainsi choisir de façon sereine et éclairée qui parmi eux devait ainsi être vacciné et protégé en priorité ?
Pourquoi prendre une prétexte aussi stupide que le risque de rupture de la chaine du froid pour la conservation des vaccins chez les Médecins de ville pour concentrer toutes les séances de vaccination à la chaine dans des gymnases ou des salles communales ?
Pourquoi devant le mécontentement du corps médical, annonce-t-on que finalement le relais sera assuré au Printemps prochain par ces mêmes praticiens libéraux, c’est-à-dire lorsque la bataille sera terminée et que les virus grippaux auront gagné d’autres cieux ?
Pourquoi avoir cédé aux exigences des laboratoires producteurs qui, par mesure de facilité et d’économie, ont imposé de livrer des conditionnements de vaccins en flacons multi-doses ?
Pourquoi ces mêmes industriels ont-ils demandé contractuellement à être libérés de leur responsabilité en cas de problèmes si les adjuvants ou les conservateurs sont vraiment considérés comme sûrs par nos autorités sanitaires ?
Pourquoi recommander une vaccination sans adjuvants chez les enfants, les femmes enceintes et les personnes atteintes de maladies auto-immunes si cet adjuvant à base de squalène ne présente vraiment aucun risque ? Pourquoi les autorités sanitaires américaines ont-elles choisi de n’utiliser que des vaccins sans adjuvants ?
Le pouvoir gouverne par et avec les médias. La politique de santé se fait par conférences de presse. Notre Ministre de la Santé se croit obligée de se faire piquer le bras devant les caméras afin de montrer l’exemple. Au sein de cet engouement médiatique incontournable, en l’an de grâce 2009, l’infectiologie et l’épidémiologie se font désormais à TF1 et France Info.
Les esprits sont bien sûr frappés par les annonces de décès, notamment d’enfants, médiatisés en temps réel. Le fait que ces décès ne soient pas plus nombreux que ceux attendus pour une grippe saisonnière ne parait pas évident pour le grand public qui réagit dans l’émotion plus au choc des photos qu’au poids des mots.
Comment faire pour expliquer que le nombre de décès actuellement attribués à ce virus dit pandémique (111 morts au 4.12.09 pour 3.824.000 cas estimés de grippe A (4) soit 0,3 morts pour 10.000) soit inférieur aux taux observés lors des grippes saisonnières (estimé à 1 cas pour 10.000 lors de l’hiver 2004-2005) (5). Comment rappeler que nous sommes encore heureusement très loin des estimations pessimistes des experts du HCSP (Haut conseil de santé publique) qui nous prédisaient entre 6400 et 96.000 décès attendus pour cette grippe (6), synonyme de filme catastrophe. La décision de la commande des 94 millions de doses vaccinales était alors devenue urgente.
Pour le Médecin , l’existence de formes graves des maladies infectieuses n’est certes pas une découverte et le décès,surtout d’une enfant, est un drame que chacun redoute au plus haut point. On reste cependant stupéfait des méthodes d’incitation vaccinale de notre Ministre de la Santé qui vise plus à terroriser qu’à informer la population. Lorsqu’une journaliste l’interroge sur les réticences des collégiens à se faire vacciner, elle déclare qu’elle aimerait amener les récalcitrants dans les services de réanimation afin qu’ils puissent voir des jeunes de leur âge avec les poumons définitivement détruits, ce qui ne produit jamais (dit-elle) avec le virus de la grippe saisonnière.
La dramatisation monte en puissance au fil des jours. tous les Médecins reçoivent de multiples coups de fils de parents affolés et désemparés qui se trouvent dans une double contrainte. Nombre d’entre eux ne souhaitent pas faire vacciner leur enfant, mais une fois le "bon de vaccination" reçu, ils se sentent coupables de ne pas s’exécuter. Ils comptent donc sur leur Médecin pour les aider à se déterminer.
La majorité des Médecins n’est pas contre le principe de la vaccination. ils en déplorent cependant notablement les modalités actuelles et leur utilisation systématique et irraisonnée. ils déplorent tous le spectacle de la mort et de la souffrance mis en scène au journal de 20 heures.
Ce climat artificiel de pseudo guerre bactériologique n’est pas justifié et risque de nous "distraire" (au sens Pascalien du terme) de l’essentiel. La crise, le chômage, le lien social, la mondialisation, les risques climatiques sont toujours là et bien là. une épidémie de grippe n’est pas synonyme de fin du monde. Il n’est point besoin de se bousculer aux portes d’entrée des centres de vaccinations. Peut-être ne s’agit-il en fait que d’une histoire d’audimat , d’un "kriegspiel" inédit, d’un mauvais jeu vidéo dans sa version virologique où chaque joueur achèterait pour détruire l’autre des stocks de masques de protection, des caisses de vaccins et des Jéroboams de solutés hydro-alcooliques ?