Se lever de bonheur
par olivier cabanel
vendredi 8 janvier 2016
Le bonheur, ce mot fourre-tout, souhaité si souvent au début de chaque année, ayant pour beaucoup un sens différent, n’est-il pas une quête impossible, ou l’occasion vitale de changer de vie ?
Une vieille prière apache dit : « puisse le soleil t’apporter chaque jour une nouvelle énergie, puisse la lune chaque nuit te ressourcer pleinement, puisse la pluie te laver de tous tes soucis, puisse le vent t’insuffler de nouvelles forces, puisse-tu marcher paisiblement à travers le monde et apprécier tous les jours la beauté de ta vie ».
Mais au-delà de ces souhaits, ne pouvons-nous pas décider de tourner la page d’une vie qui ne nous convient pas ?
Pour en revenir au mot lui-même, et s’il faut en croire le Littré, il s’écrivait auparavant « bon heur », en deux mots donc, heur ayant le sens d’augure, de chance…d’où l’expression « jouer avec bonheur » (avoir de la chance au jeu)… « Ou être favorisé par le hasard ».
Malheur serait donc logiquement une malchance, et bonheur le contraire…et lorsque quelqu’un nous souhaite du bonheur, il nous souhaite sans le savoir « bonne chance »…
Par la suite le mot a pris d’autres connotations, et a été élargi au sens de « pleine satisfaction, de jouissance ». lien
« Longtemps je me suis levé de bonne heure », écrivait l’auteur de « du coté de chez Swann », mais n’avait-il pas orthographié ce « bonne heure » différemment ?
Quoi qu’il en soit, qui n’est pas en quête du bonheur ?…
Les moyens pour parvenir sont plus nombreux qu’on ne le pense, et bien dormir en serait l’une des clefs.
En effet, le bonheur dépend de notre état psychique, et celui-ci en partie de la qualité de notre sommeil. lien
Nos rêves éclairent notre vision du bonheur, et plus nous consacrons de temps à dormir, plus nous avons de chance de multiplier les rêves.
Il ne reste plus ensuite qu’à les concrétiser car sans rêves, sans projets, comment être heureux ?
Il faudrait d’abord s’interroger : la vie que nous menons est-elle bien celle dont nous rêvions ?
Dans le cas contraire, sommes-nous capables d’en changer ?...
Les psychologues affirment que prendre un virage à 180° est le fantasme le mieux partagé par le plus grand nombre.
Et ils sont quelques uns à avoir pris cette décision, celle de changer de vie…
Sauf que, régulièrement, cette décision est prise suite à une situation complexe, une crise, qui, en quelque sorte, nous pousse à tourner la page…
Ainsi Laurence Perceval, suite à un grave accident de cheval, à abandonné sa société de lunetterie newyorkaise pour redonner vie à un petit village médiéval auvergnat…
Dans l’hôtel qu’elle y a ouvert, elle reçoit maintenant des clients qui débourse jusqu’à 500 € la nuit, remplaçant la télévision par une vision paradisiaque, celle d’un paysage sans fil électriques, ni pylônes…
Son accident de cheval ne l’a pas dégoûté pour autant des équidés, et elle s’est lancée dans l’élevage d’une race de pur sang, les Sheykh Obeyd, race arabe particulièrement douce et intelligente, descendant de 66 chevaux de princes et rois d’Egypte, dont il ne resterait qu’un millier d’exemplaires dans le monde. lien
Luc Merenda est passé du statut de star de cinéma, (il a été la vedette d’ « OSS 117 prend des vacances », puis on l’a vu dans Châteauvallon, amant d’une certaine Chantal Nobel), pour devenir finalement antiquaire d’abord à St Ouen, puis à Thoiry, spécialisé dans la statuaire du sud-est asiatique…
Il avoue avoir été un « point de bascule » depuis sa naissance, affirmant « je ne suis aucune règle, je ne suis absolument pas structuré. Plein de certitudes, mais avec encore plus de doutes ». lien
je me souviens aussi d’avoir changé la vie d’un ami, s’il faut en croire ce qu’il m’a dit plus tard, suite à une discussion que nous avions eu…abandonnant du jour au lendemain l’entreprise qu’il avait crée pour devenir musicien, ce qu’il est aujourd’hui avec succès, puisqu’il a eu le privilège de jouer avec l’un des plus grands guitaristes de jazz, John Mc Laughlin. lien
Et puis il y a Matthieu Ricard, qui muni d’un doctorat en génétique cellulaire en 1972, devient moine bouddhiste 7 ans plus tard, puis après sa rencontre avec le Dalaï-lama, en devient son interprète à partir de 1989.
Il fait aujourd’hui partie du Mind and Life Institute qui a pour mission de faciliter les rencontres entre la science et le bouddhisme.
Les accidents de la vie, ou les rencontres, seraient-ils ainsi des signes qui nous sont envoyés, tentant de nous faire comprendre que nous devons changer, afin de tenter de vivre le rêve que nous avions enfoui dans notre cœur ?
Aragon écrivait dans « est-ce ainsi que les hommes vivent » : « changer de vie, changer de corps, à quoi bon puisque c’est encore moi qui moi-même me trahis… » …
Pourtant n’est-il pas nécessaire, voire vital, de décider de « changer de vie », lorsque celle que nous vivons ne nous convient pas ? lien
Le début de chaque année est l’occasion de prendre « de bonnes résolutions », mais chacun sait que la réalité, le pragmatisme, nous ramène vite à la réalité de tous les jours… et pourtant.
Notre bonheur est-il limité à prendre de « bonnes résolutions » sur l’air de « demain j’arrête » ?
Ne faudrait-il pas plutôt à écouter notre intuition qui nous dit parfois que nous ne sommes pas sur la bonne route ?
Mais le bonheur des uns peut-il se construire sur le malheur des autres…ou mieux, si notre bonheur n’était possible que s’il permettait aussi le bonheur de l’autre ?
La question est posée.
Pour beaucoup, le bonheur c’est l’amoncellement de biens, alors que Socrate, se promenant dans le marché d’Athènes, murmurait « tant de choses dont je n’ai pas besoin ».
Un internaute FB écrivait récemment : « le fric ne simplifie rien, il a juste rendu payant ce qui était gratuit, compliqué le partage, divisé les hommes, les a rendu fous… »
Il reste pourtant un pays ou le rêve est différent.
Il s’agit du Bhoutan.
Dans ce pays, au lieu du PNB, (Produit National Brut) c’est le BNB (Bonheur National Brut) qui est choisi, avec au programme : conservation et promotion de la culture, sauvegarde de l’environnement, utilisation durable des ressources naturelles, et gouvernance responsable.
Il faut croire que ce programme marche plutôt bien, puisque selon l’ethnologue Françoise Pommaret, auteure du livre « le Bhoutan, au plus secret de l’Himalaya », la famine n’existe pas au Bhoutan. lien
Dans ce petit pays de 700 000 habitants, haut lieu du Bouddhisme, pas plus grand que la Suisse, coincé entre les 2 géants que sont la Chine et l’Inde, on est passé de la théocratie à la monarchie, et on s’investit dans une politique de développement fondée sur l’équilibre entre valeurs spirituelles et la prospérité matérielle.
Dans cette vidéo, elle raconte ce pays étonnant, dans lequel elle est maintenant totalement intégrée, devenant conseillère en recherche auprès de l’Université royale du Bhoutan.
600 000 Bhoutanais ont leur téléphone portable, sont quasi tous sur Facebook, et ils mâchent du Doma, mélange de noix d’arec, enveloppé dans une feuille de bétel, enveloppé de chaux, mélange euphorisant…lien
On y cuisine au feu de bois, le piment n’est jamais absent… et on y boit de l’alcool de riz, une vie pimentée donc...
Bonheur qu’il faut quand même relativiser : la répression exercée contre la minorité népalaise au Bhoutan entache quelque peu la belle image que ce petit royaume veut donner de lui. lien
Plus près de nous, des scientifiques, des philosophes, des sages, nous encouragent à vivre la vie que nous désirions.
Bien sur, ce changement n’est pas simple, mais celui qui n’a pas essayé ne saura jamais s’il était possible.
Au pire, l’échec éventuel sera constructif, car celui qui l’aura tenté n’aura jamais le regret de n’avoir pas essayé.
Depuis mai 68 une dynamique a été lancée, que l’on le veuille ou pas, et elle continue de porter des fruits.
L’économie du partage, chère à Jeremy Rifkin fait des petits, et de Totness à Feldheim, de NDDL à Sievens, d’autres systèmes de vie sont déjà en route, et le capitalisme va devoir vivre, ou disparaître, avec l’économie collaborative, son Internet, ses objets connectés, et le reste, ont mis sur la touche l’économie du 20ème siècle, amenant la 3ème révolution industrielle. lien
Certains mettent leur voiture à disposition, d’autres leur appartement, d’autres leur imagination, et les paniers paysans deviennent aussi des moyens de rencontre, d’échange de savoir, ou d’amitié.
Une confrérie humaine en quelque sorte, pour faire barrage au pessimisme ambiant.
Ces mêmes pessimistes affirmeront qu’il est trop tard, et ils auront peut-être raison, même s’il n’est jamais trop tard pour avoir raison trop tôt.
Il serait temps de mettre la sagesse dans nos vies, comme l’ont fait les 3 auteurs de ce livre qui paraîtra le 13 janvier prochain. lien
Quand au président français, il n’a comme seul but que la dérisoire volonté de se faire réélire en 2017. Un bonheur égoïste donc…
Comme dit mon vieil ami africain : « chaque marigot a son crocodile ».
L’image illustrant l’article vient de eternelpresent.ch
Merci aux internautes de leur aide précieuse
Olivier Cabanel
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