Sommes-nous réellement condamnés à revoir l’assurance-maladie à la baisse ?

par Michoko
jeudi 7 décembre 2006

Les Etats généraux de la santé et de l’assurance-maladie ont eu lieu les 21 et 22 octobre derniers à Bobigny. Bernard Teper, organisateur et président de l’UFAL, Union des familles laïques, nous aide à répondre à une question : la France n’a-t-elle réellement plus les moyens de mettre en application le principe de solidarité ?

Les Etats généraux de la santé ont réuni 150 participants (syndicats, associations, professionnels de la santé). Ils participent d’une dynamique plus large de débats publics sur ce thème. Bernard Teper est un expert du sujet, ses explications sont limpides.

Le constat

Le constat de départ : un trou de la Sécu, toutes branches confondues, de 10 à 15 milliards d’euros par an. Le déficit de la branche santé s’explique notamment par l’allongement de la durée de vie ainsi que par le développement de traitements technologiques et coûteux.


Actuellement, la façon de faire face à cette situation est toujours la même : c’est l’assuré qui paie (diminution des remboursements, augmentation des listes de médicaments non remboursés...). Ainsi les remboursements sont de plus en plus assurés par les assurances complémentaires et de moins en moins par la Sécu. Cette situation équivaut à une remise en question complète du principe de solidarité : chacun paie selon ses moyens et bénéficie selon ses besoins. Au contraire, notre système de soin devient de plus en plus inégalitaire :

Comment faire face ?

De fait, on assiste à une privatisation progressive de l’assurance-maladie, imposée à coup de matraquage idéologique : "la France n’a plus les moyens". Est-ce réellement le cas ?
Les richesses produite par le pays (mesurées par le PIB) augmentent et sont bien supérieures à ce qu’elles étaient il y a trente ans. Par quel miracle notre pays de plus en plus riche a-t-il de moins en moins de moyens ?

Les richesses, générées par le travail des hommes, rémunèrent de plus en plus les revenus financiers et de moins en moins le travail. L’impression selon laquelle les revenus des entreprises sont de plus en plus captés par les actionnaires (sous forme de dividendes) et par les banquiers (sous forme d’intérêts) est largement confortée par les chiffres : ce n’est pas qu’une impression ! Ainsi, depuis vingt-cinq ans, 10% du PIB (environ 170 milliards d’euros par an) ne vont plus aux salaires mais aux profits. Les revenus des entreprises ne sont pas réinvestis, soit pour augmenter les salaires, soit pour développer les activités. Or les cotisations sociales sont bien sûr indexées sur les salaires.

Bernard Teper nous livre cette analyse, basée sur les chiffres publiés par l’Union européenne.
Si on partage cette analyse, les propositions faites par les Etats généraux coulent de source : taxer les profits financiers non réinvestis dans l’appareil productif. Cela aurait le double avantage de rééquilibrer le rapport entre travail et capital et de fournir de nouvelles sources de financement pour garantir l’application du principe de solidarité.

Bien sûr, le système de santé ne se réduit pas à une question de financement. Les Etats généraux abordent d’ailleurs de nombreux autres sujets, mais ça, c’est une autre histoire... En attendant, soyons conscients que le financement de la protection sociale est avant tout un choix politique. Il y a des priorités, pas de fatalité...


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