800 postes d’instituteurs vacants dans le 93 : osons parler des vraies raisons...
par Beauceron
mercredi 7 août 2013
Cela représente 10% des postes de maitres d'école du 93. Le département le plus jeune, le plus populaire et le plus tourmenté de France est donc sinistré dans le domaine de l'enseignement primaire malgré l'embauche de 400 contractuels. Il me parait utile de vous donner quelques éléments qui vous permettront de comprendre les raisons de ce désastre, car j'ai moi-même officié durant onze ans en ZEP dans ce département. Les raisons de cette crise sont d'après moi bien différentes de celles énoncées par les syndicats officiels et les associations de parents d'élèves.
Rassurez-vous je ne vais pas vous raconter ma vie professionnelle, juste quelques éléments pour situer le cadre. J'ai intégré le 9-3 par choix dans les années 90 après réussite au concours externe académique de professeur des écoles. J'habitais près de Pantin, c'était pratique pour le parisien que j'étais alors. Après un an de formatage à l'IUFM de Livry-Gargan j'ai été titularisé ; on ne m'a pas apris à enseigner, juste ce que je devais penser et surtout ne pas dire. Parmi les licenciés de fin d'année on trouvait quelques incapables, quelques rebelles ou tout simplement des esprits libres qui critiquaient en public les saintes écritures de Saint Philippe Meirieu (l'archange de la pédagogie). Cela ne porte pas chance de penser et de se cultiver dans ce milieu professionnel. A l'époque j'étais jeune, je suivais sans broncher... l'instinct de révolte c'est venu plus tard.
Et j'ai pratiqué dans plusieurs niveaux de classe, dans diverses communes. Enfants difficiles et agressifs, cas psychiatriques (3 ou 4 sur 25 élèves en moyenne), tensions au sein des "équipes" enseignantes, égoisme et absence de solidarité... parents immatures, beaucoup de cas sociaux, problèmes de "laicité"... Allez j'ai aussi connu de bons moments sinon je ne serai pas resté. Le fait d'habiter à Paris était un avantage, le soir je pouvais sortir et me changer les idées.
Je pourrais également signaler le manque de soutien de la hiérarchie et les nombreux dysfonctionnement observé à droite et à gauche. Un exemple : ce collègue directeur alcoolique incapable de gérer une classe et une équipe d'enseignants qui malgré une tentative de suicide était maintenu en poste...
Quand j'ai souhaité quitter le 93 au moment de l'explosion des prix du logement j'ai découvert que 2800(!) collègues demandaient à sortir pour... 18 demandes d'entrées ! J'y suis parvenu malgré tout, j'exerce aujourd'hui en province où les difficultés demeurent : autorité non reconnue, beaucoup d'enfants présentant des troubles graves du comportement, parents désocialisés et immatures, absences de repères en matière d'éducation... vous connaissez tous la chanson en observant autour de vous ce qui se passe.
Mais revenons à notre cher 9-3. Les centaines de postes vacants seraient le résultat de la politique de l'infâme M.Sarkozy en matière de suppression de postes... le "droite" aurait saboté l'éducation nationale... fadaises que tout cela ! Les postes sont vacants faute de candidat aux concours de recrutement d'une part et suite aux abandons de postes d'autre part, malgré la revalorisation des débuts de carrière initiées par l'ex-ministre Châtel ! Oui, il y a eu aussi du positif dans l'oeuvre du précédent gouvernement... Car vous l'avez compris (et vous le saviez déjà pour beaucoup d'entre vous) enseigner à Saint-Denis ou à Montfermeil c'est très spartiate. Des rapports de l'IGEN le confirment : enfants violents et associaux, délinquance juvénile etc. ce climat oppressant ne permet pas de travailler en toute sérénité. Autre anecdote : j'ai été muté dans la même fournée qu'une collègue de Sevran qui s'était fait tirer dessus !
Tout cela pour conclure qu'il est incroyable que la langue de bois reste de vigueur. J'écoutais l'autre jour sur une radio FM un débat sur les rythmes scolaires discutés à Clichy-sous-bois. Je vous entends d'ici ricaner. Il y a en permanence deux ou trois instits absents dans les écoles de cette commune : congés maternité, dépressions nerveuses, crampes diverses... dénoncer cette situation n'avancerait à rien : Qui parmi vous souhaite prendre la place de ces "absenteistes" ? le public scolaire de cette commune est "ghetto", la plupart des familles issues du quart monde, sans désir d'intégration pour beaucoup ; les caids font la loi dans les quartiers, les pouvoirs publics dépassés... mais il vaut peut-être mieux parler d'autre chose, de l'école le mercredi-matin... gag ? Non, puisque des ces endroits l'école n'a plus qu'une seule fonction : garder les mômes à l'abri des cages d'escalier. Mains que feront les brebis s'il n'y a pas de berger pour les garder ?
Le politiquement correct contribue à enfoncer notre pays. Seul un débat serein et constructif permettrait de rechercher des solutions à la difficile question de l'éducation en milieu défavorisé. Il ne faut pas compter sur les planqués des syndicats et les assos de parents proche des partis pour cela. Créer des blogs, des réseaux et rassembler les bonnes volontés est la seule voie pour rechercher des solutions...