Bertrand Cantat : rebondissement
par hommelibre
mercredi 26 juin 2013
Il y a dix ans Marie Trintignant mourait après avoir été frappée par Bertrand Cantat. L’émotion avait alors été grande du fait de la personnalité du couple. L’affaire avait tourné en une campagne contre les violences faites aux femmes, menée par la mère de Marie et divers groupes féministes.
J’avais été très critique à l’égard de la récupération politique de ce drame et de l’exploitation idéologique du cadavre de Marie Trintignant. Il ne s’agissait pas de minimiser l'acte de Cantat. Mais les harpies de services avaient entonné l’hymne misandre de la violence généralisée des hommes et de la supposée domination masculine. Cette systématisation était inacceptable et insupportable. Il y a des cas où un système est en place comme dans les viols en tournantes. Cela ne touche qu’une très petite minorité d’hommes. De même certaines fausses accusations de viol sont soutenues et structurées par des groupes féministes. Là aussi il ne s’agit que d’une petite minorité de femmes.
J’ai par la suite soutenu le droit du chanteur à reprendre son travail après avoir payé sa dette judiciaire à la société. Là encore des féministes s’y opposaient et voulaient prolonger sa peine par une condamnation morale à perpétuité.
Sept ans après le drame du couple Trintignant-Cantat, peut-être provoqué par un abus de stupéfiants, un autre drame s’est joué. L’ex-femme de Cantat avait plaidé sa cause. Il n’y avait pas d’antécédents de violence. Elle l’avait soutenu. Elle avait accepté de revivre avec lui après sa sortie de prison, malgré sa fugue passionnée avec Marie Trintignant. On imagine l’immensité de l’amour qu’elle portait à Bertrand.
En janvier 2010 Krisztina s’était pendue dans leur maison.
Aujourd’hui sort un livre, « Bertrand Cantat - Marie Trintignant. L’amour à mort ». Dans ce livre les auteurs citent un message téléphonique laissé par Krisztina à ses parents en Hongrie, six mois avant son suicide. Elle se confie sur la violence dont Cantat aurait fait preuve à son encontre (extraits) :
« ... hier j'ai failli y laisser une dent... mon coude est complètement tuméfié et malheureusement un cartilage s'est même cassé... J'ai essayé et j'essaie de vivre de telle manière que je ne sois pas obligée de fuir, car soit il sera déjà trop tard pour fuir faute d'être encore en état pour le faire, soit je réunis mes forces maintenant et je m'enfuis avec Liszka [le diminutif d'Alice, leur fille], mais sans même savoir où. »
Elle continue :
« ...mais des preuves il y en a, les gens dans la rue et nos amis, car ce qu'ils ont vu hier quand Bertrand a tout cassé... Bertrand est fou... »
Elle précise toutefois :
« Mais je n'ai pas voulu vous parler de tout ça, naturellement vous pouviez deviner qu'une série d'événements encore plus regrettables que ceux de 2003 a eu lieu, car à l'époque cela ne m'était pas arrivé à moi, tandis que maintenant cela m'arrive, et déjà à plusieurs reprises j'ai échappé au pire, et puis c'est intenable... »
J’imagine que ce message enregistré sur le répondeur de ses parents est authentique et que les auteurs ont fait leur travail de vérification avant de publier. Ce témoignage est terrible et je ne peux que prendre du recul sur Bertrand Cantat. Cela pose des questions : quelque chose s’est-il cassé dans la tête de Cantat après le décès de Marie Trintignant ? Etait-il prédisposé à cette violence ? On est devant une forme de maladie psychique.
D’autres questions viennent aussi : pourquoi sa compagne Krisztina est-elle restée si longtemps silencieuse ? Si d’autres personnes le savaient comment rien n’a-t-il été fait pour y mettre fin et pousser Cantat à se soigner ? Elle s’explique, à la suite de l’extrait précédent :
« ...et j'ai eu peur que pour une fois cela ne se passe pas chez nous mais chez nos amis, et donc si telle chose devait arriver, ils pourraient témoigner, même si un témoignage n'aurait aucun sens car tel que je connais Bertrand, il se suiciderait, et alors les enfants resteraient là, orphelins. »
C’est peut-être une explication, bien qu’alors il ne soit pas logique qu’elle-même ait mis fin à ses jours.
Il faut attendre ce que dira Bertrand Cantat, ainsi que les témoins que son ex-femme mentionne. Aujourd’hui je suis ébranlé par ce témoignage. Mais, est-ce vraiment le bout de l'histoire ? Quelle est la souffrance qui le ronge, et que peut-être nous devrions connaître pour comprendre enfin cette affaire qui nous a tous touchés ? Pour que les deux morts ne figurent pas aux pertes et profits d'une comptabilité insensée ?
Bertrand Cantat-Marie Trintignant. L'amour à mort, par Stéphane Bouchet et Frédéric Vézard, l'Archipel.