Cambriolages : lettre ouverte aux responsables politiques de tous bords
par Laurent CRIADO
mercredi 6 septembre 2017
Pour beaucoup, les cambriolages ne sont qu’un aléa, une tracasserie administrative ou une pensée stressante à chasser au plus vite de son esprit. D’autres estiment que leur mauvaise fortune les fera passer sous les radars des voleurs. Malheureusement, la réalité est bien plus complexe que ça et le profil des malfaiteurs évolue en même temps que leurs modes opératoires. La violence y occupe désormais une place de choix. En nier l’existence ne résout aucunement sa propagation, exponentielle. Gardez ce chiffre en tête : 1 cambriolage sur 3 se déroule en présence des occupants. Ca remet tout de suite les choses en perspective, n’est-ce pas ?
Pour bien comprendre ce qui se cache derrière le mot « violence », le mieux consiste à l’illustrer par des drames humains, pudiquement baptisés « faits divers » par la presse.
Le nouveau visage des cambrioleurs
Limoges : une jeune femme violée à son domicile
La victime, âgée de 19 ans, a été violée à plusieurs reprises par son cambrioleur de 25 ans, confondu par son ADN et localisé grâce au butin emporté après son méfait (une carte bancaire et un téléphone portable). Comme toujours, il est connu des services de police pour des faits mineurs. Il a été placé en détention provisoire pour viol aggravé.
A lui tout seul, ce drame fait voler en éclats toutes les idées reçues sur les cambriolages. Une simple tracasserie administrative ? Allez donc en parler à la victime. Rien à voler ? Peu leur chaut votre bonne ou mauvaise fortune, les voleurs savent que vous possédez probablement une carte bancaire, un chéquier, des clés de voiture ou un appareil électronique de valeur (smartphone, ordinateur portable, tablette). Amplement suffisant pour eux. La vie de cette jeune femme est brisée, son traumatisme indélébile ou presque. Avec beaucoup de courage, et en étant bien entourée, il s’estompera, mais ne disparaîtra jamais totalement. Elle devra vivre avec ce fardeau toute sa vie.
Roubaix : un enfant de 8 ans grièvement blessé par des cambrioleurs en fuite
Ce « fait divers » se déroule à Roubaix. Des cambrioleurs en fuite prennent tous les risques en voiture pour échapper aux forces de l’ordre. Parfois, cela se passe « bien », comprenez, sans faire de victimes. Cette fois, il y a cinq victimes à déplorer, dont un enfant de 8 ans gravement blessé. Trois policiers ont également été blessés, dont l’un fut mordu lors des interpellations.
Là encore, on est loin de l’image d’Epinal des monte-en-l’air, discrets et nobles d’esprit, façon Arsène Lupin. Un enfant de 8 ans est gravement blessé dans cette histoire sordide. Vous attendez tranquillement le bus avec votre gamin et, une seconde après, vous êtes tous deux happés par un véhicule qui vous brise, net. L’horreur.
Ces deux drames illustrent parfaitement le nouveau visage de ces criminels, prêts à toutes les infamies pour voler quelques euros. Ils remontent à quelques jours à peine. Des drames tels que ceux-là frappent des familles, tous les jours, dans toute la France. Pêle-mêle : la nuit de terreur vécue par un couple de retraités du Gers, la séquestration et le tabassage d’un adolescent chez lui par les cambrioleurs, la mort d’un père de famille après l’intrusion en pleine nuit de six faux gendarmes, une grand-mère braquée à domicile alors qu’elle faisait la sieste avec sa petite fille, une nounou et deux nourrissons frappés par un cambrioleur en pleine journée, le meurtre d’un homme de 58 ans chez lui, à Lisieux, pour une carte bancaire et des clés de voitures, etc. Jugez par vous-même de la gravité de cette violence à domicile.
Si constater l’ampleur de ce fléau à travers la lecture de tous ces drames est nécessaire à une prise de conscience, il faut aller plus loin. C’est la raison pour laquelle j’ai envoyé une lettre ouverte aux responsables politiques français afin de les interpeller sur l’urgence de la situation. Il faut agir et vite.
Lettre ouverte aux responsables politiques français
Madame, Monsieur,
Vous exercez vos responsabilités politiques avec tous les droits et les obligations qui en découlent.
J’attire votre attention sur l’épineux problème des cambriolages, éternel absent du débat politique français. Une étude de Budget Maison (mai/juin 2017) révèle pourtant que la crainte d’un cambriolage préoccupe 68% des Français. Malgré les opérations de communication, dont la très surfaite Opération Tranquillité Vacances, l’épidémie ne cesse de s’étendre : 1 délit touchant aux logements toutes les 30 secondes, soit plus d’un million chaque année. Le désastre est même plus conséquent car les entreprises et les commerces de proximité ne sont pas intégrés à cette statistique déjà affolante en soi.
Quant à la nature même des vols, force est de constater que la violence devient monnaie courante lorsqu’on prend la peine de parcourir la rubrique des faits divers de la presse régionale.
Vous m’accorderez que nous sommes loin de l’image romanesque du gentleman cambrioleur.
Nous ne pouvons plus fermer les yeux sur des actes d’une sauvagerie sans précédent qui détruisent des milliers de familles chaque année. Garantir la sécurité de la population est une obligation non négociable dont chaque représentant politique est comptable. Chaque citoyen a le droit de vivre en paix, sans craindre d’être agressé, chez lui, par une bande de malfrats prêts à commettre toutes sortes d’atrocités. Il est nécessaire de mettre un terme à cette criminalité galopante en adoptant une ligne politique sans équivoque : tolérance zéro.
Pour que cet objectif se réalise, il doit devenir une priorité nationale. Il ne dépend que d’une chose : la volonté politique. Fini les demi-mesures et autres gadgets politiques chers aux communicants de tous bords. Place aux mesures efficaces et, surtout, aux résultats.
Dans mon dernier ouvrage, je dresse une liste de 13 mesures, concrètes, destinées à enrayer le mal. En voici quelques unes résumées dans les grandes lignes :
- Incitation fiscale
Les ménages allemands bénéficient d’incitations fiscales afin de s’équiper en matériel de sécurité. En France, c’est le néant. Pourquoi ?
- Certification sécuritaire des logements
Une telle mesure est déjà en vigueur au Royaume-Uni et en Belgique. Pourquoi ne pas mettre à profit l’expérience des référents sûreté de la Police nationale et de la Gendarmerie afin de créer un label sécurité des logements ?
- Lutte active contre le recel
Il est sidérant de retrouver quantité d’objets volés sur des sites internet de petites annonces. Pourquoi ne pas compliquer la tâche des voleurs en responsabilisant lesdits sites internet de petites annonces, en créant un grand fichier national des objets volés et en généralisant le marquage des objets ? Cette pratique de marquage préventif se développe au Royaume-Uni et en Belgique, pourquoi ne pas s’en inspirer ?
- Muscler les conséquences judiciaires
Aux Pays-Bas, la condamnation est systématique et les peines sont aggravées en cas de récidive. Chez nous, les peines prononcées sont si peu dissuasives que les réseaux mafieux ont lourdement investi ce créneau au grand dam de nos concitoyens. Que proposez-vous pour dissuader les primo-délinquants et les multirécidivistes ?
- Rendre des comptes aux victimes
3 victimes sur 4 n’ont plus aucune nouvelle après avoir porté plainte. Trouvez-vous normal qu’on s’intéresse plus au sort des auteurs de délits qu’à celui des victimes ?
- Eradiquer les actes de violence
La violence de certains cambriolages dépasse l’entendement. Si vous lisez la revue hebdomadaire que je tiens sur le site leguideimmobilier.com, vous savez déjà que nombre de victimes sont séquestrées, ligotées, frappées… Les voleurs ne reculent devant rien pour extorquer argent liquide, bijoux, cartes bancaires et codes secrets à leurs malheureuses victimes : déluge de coups, menaces de mutilations, noyades, essence, chalumeau, fer à souder, viols, meurtres de membres de la famille… Ils n’ont plus aucune limite à leur imagination maléfique. Que proposez-vous pour protéger les honnêtes citoyens de ces horreurs perpétrées au quotidien ?
Finalement, êtes-vous disposé à déployer une politique de lutte contre les cambriolages ferme et sans concession ? Si oui, quels sont les grands axes de votre programme ?
Comme beaucoup de mes concitoyens, j’ai hâte de lire vos réponses et de prendre acte des suites que vous comptez donner à ce dossier brûlant. Je ne manquerai pas de relayer vos réponses partout autour de moi, notamment aux victimes, de plus en plus nombreuses, qui ne peuvent plus accepter que leurs élus détournent le regard tandis que cette criminalité prospère comme jamais.
Si vous souhaitez me rencontrer pour en discuter en privé, ou publiquement, j’accepterai votre invitation avec grand plaisir.
Cordialement,
Laurent Criado
--------------------------------------------------------
Il existe fort heureusement des solutions efficaces pour se protéger contre les cambriolages, que ce soit au niveau individuel ou collectif. Mais les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités et montrer l’exemple en assurant une protection inconditionnelle des citoyens. Une volonté politique doit émerger et, considérant l’ampleur des dégâts, la lutte contre les cambriolages doit devenir une priorité nationale. Les pouvoirs publics doivent déclarer une guerre sans merci aux cambrioleurs.
Augmenter les effectifs des forces de l’ordre peut, certes, s’avérer utile. Mais ce n’est pas suffisant. Les forces de l’ordre sont efficaces dans cette lutte quotidienne, le problème vient plutôt de ce qu’on nomme le laxisme judiciaire... Il n’existe pas une activité criminelle aussi lucrative et pratiquement sans risques que les cambriolages. Les risques sont minimes, tant sur le plan physique que judiciaire.
Cette lettre ouverte a pour objectif de mettre le dossier des cambriolages sur la place publique, puisque c’est l’éternel absent des programmes politiques des uns et des autres. Quel meilleur site qu’Agoravox pour relayer une démarche citoyenne ? Si vous souhaitez accompagner cette démarche, venez débattre dans les commentaires et/ou partagez cet article. Plus nous aurons de poids, moins les responsables politiques pourront continuer à détourner le regard de ce fléau.
Laurent CRIADO
Site internet : leguideimmobilier.com
Cet article peut volontiers être repris, sans coupures, pour informer le plus de monde possible. La photo illustrant l’article doit rester la même. Le nom de l’auteur doit figurer distinctement en début d’article, un lien doit renvoyer sur la page Agoravox de l’article. Merci à toutes et à tous.
Merci aux journalistes de respecter la déontologie de la profession en mentionnant clairement la source et en évitant toute forme de plagiat.
Si vous avez des attentes sur des thématiques liées à l’immobilier, prévenez-moi directement dans les commentaires ou via mon site.