De la nécessité du féminisme dans notre société : l’égalité entre les sexes, un combat toujours actuel
par Mandine Pichon-Paulard
jeudi 9 mars 2017
La journée internationale des droits des femmes, qui a été instaurée en 1977 par l'ONU, est l'occasion d'expliquer pourquoi le féminisme est toujours d'actualité dans notre société. En France, le principe d'égalité entre les femmes et les hommes est inscrit dans la Constitution depuis 1946. Toutefois, cette égalité de droits est loin d'être une égalité de faits. Présenté parfois à tort comme dépassé, le mouvement égalitaire qu'est le féminisme a pour but une égalité effective entre les deux sexes qui est loin d'être atteinte, comme nous allons le voir.
Le principe d'égalité homme-femme est en effet loin d'être entré dans tous les esprits. Malgré la loi, en France, l'écart de salaire entre les hommes et les femmes et de 19,3% en faveur des premiers parmi les travailleurs à temps complet. Et cela n'est pas près de changer : selon un rapport du Forum Economique Mondial, l'égalité en la matière devrait être atteinte dans 170 ans au niveau mondial. L'évolution des mentalités est longue. En témoigne la déclaration du 1er mars du député européen polonais Janusz Korwin-Mikke, pour qui "les femmes doivent gagner moins que les hommes" car elles sont "plus petites et moins intelligentes". Aucune sanction n'a à ce jour été prise contre lui, même si une piétition le réclame. En outre, la question de la parité en politique est un réel problème. En effet, les femmes ne représentent aujourd'hui que 26,8% des membres l'Assemblée Nationale malgré la loi sur la parité votée en 2001. Celle-ci a d'ailleurs fait débat, y compris du côté de féministes comme Elisabeth Badinter ; n'existe-t-il pas un risque que les femmes soient choisies en fonction de leur sexe et non de leurs compétences ? Pour beaucoup, ce dispositif semble être un mal nécessaire, pour un temps en tout cas. Il est en tout cas révélateur d'un problème réel dans la sphère politique
En outre, le corps de la femme est toujours au cœur de nombreux débats. Entre autres exemples, le recours à l'Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) est difficile, y compris dans des pays qui l'autorisent. En Italie, les médecins peuvent ainsi refuser de pratiquer cet acte médical. Problème : 70% de ceux qui sont habilités à pratiquer l'IVG sont « objecteurs de conscience ». La question des règles est aussi un tabou. Toutefois, la parole se libère peu à peu, la batteuse du groupe MIA Kiran Gandhi ayant par exemple couru le marathon de Londres sans protection hygiénique alors qu'elle avait ses règles. Par ailleurs, le corps des femmes est trop souvent vu comme un objet sexuel et les publicités comme celles d'Yves Saint-Laurent véhiculent ce message. A l'autre extrême, le port du voile, de la burqa (interdit en 2010) et du burkini fait débat. Le collectif « Femmes sans voile », souligne que le voile, patriarcal, est souvent imposé par la pression sociale. Il peut également être vu comme une manière de cacher le corps de la femme.
De même, les préjugés sur le viol perdurent. Ainsi, un sondage d'Ipsos révélait en mars 2016 que 17% des français pensent que forcer sa conjointe pour avoir un rapport sexuel qu'elle refuse n'est pas un viol. Selon ce même sondage, 30,7% des français de 18-24 ans pensent qu'une femme peut prendre du plaisir à être forcée lors de l'acte sexuel. Dans le même esprit, l'homme d'affaires Warren Buffet expliquait la semaine dernière que selon lui, une femme qui dit « non » peut vouloir dire « peut-être ». Le harcèlement sexuel reste lui aussi un enjeu majeur dans nos sociétés, comme en témoigne l'affaire Baupin. Le député d'Europe Écologie les Verts a en effet été accusé par quatre femmes de harcèlement sexuel, mais si la véracité des faits a été reconnue par la justice, l'affaire est classée sans suite car les faits sont prescrits. Denis Baupin a par la suite annoncé son intention de porter plainte contre elles pour « dénonciation calomnieuses » et « diffamations ».
Face à tout cela, que faire ? Eh bien, agir. Continuer à informer son entourage de ces inégalités qui persistent. Expliquer aux autres que non, le féminisme ne vise pas à ce que les femmes prennent le pouvoir sur les hommes, mais qu'il est bien un mouvement aux revendications égalitaires pour les deux sexes. L’incompréhension qui l'entoure est en effet dangereuse. En témoigne la polémique qui a entouré la parution des images d'Emma Watson dans le Vanity Fair de mars 2017. La plus jeune ambassadrice de bonne volonté de l'ONU pour la campagne féministe « HeforShe » s'est vue reprocher d'être les seins à demi-nus, ce qui selon la journaliste Julia Hartley-Brewer, la décrédibilise. Emma Watson a mis les choses au point, déclarant que « le féminisme, c’est donner le choix aux femmes. […] C’est un combat pour la liberté, pour la libération. Pour l’égalité. Je ne vois pas ce que mes seins ont à voir là-dedans. ». Ce combat est un combat de tous les jours qu'il nous appartient à toutes et à tous de mener.