Défenseur des enfants, c’est écrit dessus

par Orélien Péréol
samedi 12 juin 2010

Il est des noms qui semblent dire de quoi ce qui est nommé est fait. Des noms qui sonnent comme une évidence. Cela éteint d’emblée la vigilance critique. Le nom « défenseur des enfants » est de ceux-là. Tout le monde veut défendre quelqu’un qui « défend les enfants ». Eh oui ! Qu’en est-il vraiment, de son action, de son utilité ? Mon expérience personnelle, c’est qu’au delà de ce joli nom qui ne mange pas de pain, elle ne défend pas tous les enfants. Elle n’a pas défendu les miens.

Mon expérience personnelle, qui même si elle n’était que personnelle, est une expérience. Elle est vraie, elle est douloureuse, elle dure. Je ne crois pas qu’elle n’appartienne qu’à ma famille. J’ai tendance à penser que des milliers de familles ont vécu ce genre de déni du droit par ce même tribunal. Nous avons les organismes de recherche et d’enquête sociologiques pour voir si mon hypothèse est juste ou fausse : mes enfants et moi n’avons aucune caractéristique qui permettrait de penser que la maltraitance qu’on nous fait vivre est une exception. La défenseure des enfants s’est désintéressée de l’agression que mes enfants ont subie.
 
Il faut dire que cette agression provient des psys-experts, d’une enquêtrice sociale, et des juges aux affaires familiales (un en première instance et trois en appel). Le juge élimine le dossier contradictoire, le déclarant « confus ». Dans ce dossier, une trentaine de citoyens attestent que le père s’occupe des enfants, à la crèche, à l’école, au conservatoire, en vacances, et qu’on n’y voit jamais la mère. Les médecins attestent aussi que le père s’occupe de la santé des trois enfants.
 
Après avoir éliminé le dossier contradictoire, il faut tout de même au juge des éléments pour justifier une décision. Il a donc demandé des expertises et l’avis des enfants. Demander l’avis des enfants, dans cette conjoncture-là (élimination du dossier) c’est un (premier) acte de maltraitance (institutionnel, on pourrait dire, pour parler comme madame Versini). Le second acte de maltraitance sera de refuser de considérer l’avis des enfants alors qu’ils demandent de rester auprès du père. Exactement, deux enfants ont écrit au juge, la troisième n’a pas voulu répondre à la question. En appel, les juges déclarent ne pas pouvoir suivre l’avis de l’enfant car elle est trop jeune (c’est quatre ans auparavant que le juge a voulu recueillir son avis ! elle n’était pas trop jeune quatre ans plus tôt !) et qu’elle aurait demandé, quatre ans auparavant donc, selon le rapport du psychiatre, d’aller chez sa mère ! Ce rapport a déjà été jugé, en première instance, impropre à assoir une décision car trop « elliptique ». La décision d’appel rejuge la chose jugée, ce qui est interdit. La décision d’appel établit que l’enfant est trop jeune pour donner son avis et, en même temps, que l’avis qu’elle a donné quatre plus tôt est opposable à l’avis qu’elle donne, elle n’était donc pas trop jeune quatre ans plus tôt ! La décision d’appel ne fait aucune mention de la lettre du frère, qui demande de ne pas séparer la fratrie et de la garder autour du père. La décision d’appel ne fait aucune mention de sept ou huit attestations qui disent que l’enfant se cache pour ne pas retourner chez sa mère après les week-ends et qu’elle pleure tout le temps du trajet (deux environ de trajet, deux heures de pleurs). De tout cela, résulte la deuxième agression des enfants, après avoir été contraints de prendre parti entre papa et maman, deux sont mis chez le parent qui les délaisse agressivement depuis leur naissance, mais ce parent, c’est la mère.
 
J’ai contacté la défenseure des enfants, qui m’a dit, en substance, qu’elle recevait des récits de pères comme le mien en nombre et qu’il n’y avait qu’une solution : que l’enfant redemande à habiter chez son père ! Ce qu’elle avait fait plusieurs fois sans être respectée.
 
La défenseure des enfants n’a pas défendu mes enfants. Elle a une très haute idée de son action et d’elle-même. Je l’entends à la radio dire tout ce qu’elle fait, ou croit faire, c’est le même déni qui continue.
 
La plupart des discours sur la défenseure des enfants prennent son intitulé au sens propre et direct : la défenseure des enfants défend les enfants et s’il n’y a plus d’institution de ce nom, les enfants ne seront plus défendus. Cet allant-de-soi contient ce qu’il faut penser de l’affaire. Magie du mot : le mot, c’est la chose. La disparition du mot, c’est la disparition de la chose !
 
A la suite de cette identification du nom et de la chose, nombre de discours traitent de l’attachement que l’on a à la défense des enfants. C’est du gâteau... On aime tous les enfants, tout le monde aime les enfants, on les voit faibles, dépendants, tendres... Ils ne peuvent guère désobéir (on peut les forcer à travailler, ils n’ont pas les ressources internes pour échapper à cette contrainte si on les y met) ils n’ont pas l’expérience qui permet de relativiser ce que l’on voit et entend autour de soi, on peut donc les manipuler... et surtout, surtout, ils sont l’avenir du monde. Voilà les grandes lignes du tableau. Pour tout cela, il nous faut une défenseure des enfants qui défend les enfants et sans qui les enfants ne sont pas défendus.
 
Je ne traite pas le fait qu’encore une fois la femme et l’enfant sont indissolublement attachés. Tant dans ma vie que dans l’intitulé défenseure des enfants et les deux magnifiquement médiatiques femmes qui ont pris ce rôle.
 
La défenseure des enfants ne défend pas tous les enfants. Toutes les institutions travaillent à leur maintien, voire à leur extension (extension de leur territoire d’intervention, extension de la profondeur de leur intervention). Avec un nom pareil, la défenseure des enfants dispose d’un avantage indu dont il importe de ne pas être l’objet et qu’il faut analyser aussi.
 
Avant de penser qu’il est absolument nécessaire d’avoir une défenseure des enfants, il faudrait d’abord ne pas laisser les enfants se faire agresser dans une institution fondamentale de la République, le ministère de la justice.
 

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