« Devenez propriétaire de votre vie ! »
par Acid World
samedi 10 mars 2012
Tour d'horizon des rouages d'un esclavage : le consumérisme. Comment sommes-nous façonnés par cette chose, hommes, femmes et enfants ? Eléments de réponse.
"Devenez propriétaire de votre vie", c'est en somme le message que l'on subit plusieurs centaines de fois par jours sous l'arsenal des médias, sur écran, sur papier, dans la rue, sur tous les fronts.
Le droit à la vie semble avoir été oublié. La DDHC dit elle-même que tout homme a droit à la « poursuite du bonheur », une vision individualiste des choses puisque l'idée que notre bonheur puisse venir de la solidarité y est absente. Nous ne vivons plus dans une société qui exalte un culte du chef, d'une communauté guerrière comme les dictatures que nous avons écrasées au siècle dernier. Mais nous vivons sans nous en rendre compte dans une autre forme d'oppression que je ne suis pas le seul à appeler le « totalitarisme marchand ».
Quelle est la place du choix ?
Un totalitarisme est un système de domination qui ne se contente pas de contrôler notre activité, mais tente aussi de s'immiscer dans notre manière de penser. On contrôle les comportements par la contrainte ; on peut contrôler la pensée en grande partie par la propagande.
Nombreux sont nos comportements qui nous sont dictés d'en haut, y compris dans la sphère privée. Je pense en particulier à nos comportements de consommation. Difficile de nier qu'une grande partie des produits que nous achetons (souvent les plus coûteux) sont vendus grâce à une propagande très intense que l'on appelle la publicité. De prime abord la publicité ne sert à rien : après tout, il est largement admis que c'est la nature de l'homme d'être avide de richesses et de biens matériels. Ce qui explique pour les théoriciens du libéralisme que « l'homme a un penchant naturel pour le trafic » (Adam Smith). Mais en analysant nos compulsions d'achat, tantôt débridées, tantôt culpabilisées, on peut se dire qu'un facteur extérieur nous manipule et joue avec nos désirs. Jamais nous n'avons eu un si haut niveau de vie, mais je vais tenter de montrer que la société de consommation est largement forcenée.
On nous force la main pour acheter, acheter pour reprendre le contrôle de notre vie. La voiture pour se déplacer vite, les voyages touristiques pour s'évader vite, le fast-food pour manger vite, un ordinateur pour travailler vite, des vêtements pour changer vite d'apparence. Les totalitarismes se basent sur l'idée d'un homme nouveau, et c'est exactement ce que fait le consumérisme, avec de plus une séparation très sexuée des rôles.
Nos rapports hommes/femmes
Pour l'homme, le mot d'ordre est performance. Professionnelle et sexuelle principalement. Pour l'une ses armes sont son arsenal technologique qu'il achète, ordinateur, portable et bagnole en tête ; pour l'autre ce sont les vêtements, la cosmétique, ses accessoires de sport, ses dopants en tout genre, bref tout ce qui pourra faire de lui une bête d'apparence et de force physique.
Quant à la femme, le mot d'ordre est séduction. L'accent est mis sur le luxe et l'érotisme. Vu comme ça, cela semble un bon programme. Ce luxe consiste à s'affirmer par son mode de vie, son apparence... Des choses rendues entièrement monnayables avec l'industrie de la mode et les produits onéreux qui marquent une distinction (cf le livre de Pierre Bourdieu). Dans notre société qui est huilée par l'argent, le luxe est vu comme une marque d'émancipation. « j'ai acheté ce bibelot, cela montre que je suis à l'abri du besoin ». Cette logique a connu son essor dans la bourgeoisie du XIX° siècle, et dans notre société d'abondance on l'impose au monde entier. Mais tout le monde n'en a pas les moyens. Ainsi, malgré elles ou jouant le jeu, les femmes baignent dans la culture de l'ostentatoire, où au final leur luxe est vu comme le témoin de la performance de l'homme. Ce luxe a une large dimension érotique relayée dans la propagande. Ainsi la relation sexuelle est vue par l'homme comme la récompense de son effort de performance, qui ne passe que par le travail, et par la femme comme la conséquence de son effort de séduction, qui ne passe que par l'achat.
Tout ce qui précède relève bien sûr du stéréotype, mais n'est pas à jeter. Des stéréotypes d'un homme actif et maître de sa vie, d'une femme passive et dépendante. Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts et les revendications féministes semblent rééquilibrer les rapports de force. Même dans l'industrie culturelle l'image des femmes évolue. Mais en y regardant de plus près, je constate que dans la logique du produire plus et consommer plus, l'asservissement est mutuel. L'homme censé défendre becs et ongles sont statut social voit ces images d'homme invincible et sûr de lui, et perd de l'estime de soi s'il ne parvient pas à rehausser le standing de ses biens et de sa femme. Il est si enfermé dans ce rôle que sa vie familiale et sa vie privée sont sacrifiées. L'émancipation des hommes passera par un équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle, libéré de la performance forcenée. L'enchaînement de la femme, lui, est plus visible, et outre ce que j'ai dit plus haut, elles se retrouvent la cible sexuelle des hommes qui ne font que reproduire les modèles qu'ils voient dans les médias. De plus le marché du travail se retrouve ouvert aux femmes, ce qui est en soi une bonne chose. Sauf que le facteur vie personnelle est là aussi sacrifié à la performance économique, d'où la fameuse « double journée des femmes ».
Dépossédés de leur vie privée par les impératifs du travail et de la consommation qui passe pour du temps libre, les hommes et les femmes qui se sont penchés sur la question ont trouvé un drôle de paradoxe. Si le sexe est partout dans les médias et dans les discours (jamais loin de la performance), il n'est pas davantage pratiqué que dans les autres sociétés humaines, parmi lesquelles ont pourrait bien se trouver dans la moyenne basse. De nombreuses pulsions de désir ont été détournées vers des pulsions d'achat, avec ou sans lien avec la chose. De même, la pornographie a toujours existé mais est devenue une institution dans un monde où de nombreuses personnes isolées y voient un simulacre de vie sexuelle. Notez que cela finit souvent par relever aussi de la drogue, utile au système car lucrative. Cette aliénation des deux sexes est pour moi la clé de voûte de la société de consommation.
Notre rapport au temps et au cycle de la vie
Les notions de « perte de temps », de rapidité, d'instantané font partie de cette culture de la performance. Elles s'imposent à nous dès l'enfance. L'idée d'un retard permanent à rattraper est tenace. Un retard sur le voisin (qui a déjà la Clio 3 quand vous roulez en 205), dans votre travail dont le but est de produire plus, sur la marche du progrès technique, sur la marche des machines en général dans notre monde. Regardez les Temps Modernes de Charlie Chaplin. Pour accroître sans cesse les richesses matérielles et le capital, on a du faire appel aux machines quand l'homme ne suffisait plus. Et ces machines, elles sont si améliorées, rapides et intelligentes que l'on vit maintenant à leur rythme, dans l'instantané. Le taylorisme et le fordisme nous font travailler comme des machines. Depuis les années 80, on a franchi un nouveau palier puisqu'Internet permet d'avoir une finance mondiale qui ne dort jamais, et qui exige plus de production tout en détruisant à petit feu l'activité humaine. Ce constant état d'alerte rend malade le corps humain, qui se trouve des dopants et des drogues pour tenir ou s'évader. Nous avons choisi de traiter ces maux non par la prévention, mais par le traitement chimique. Car la prévention remettrait en cause ce productivisme. En période de croissance, les antidépresseurs se vendent bien. Cette fuite en avant nous agresse non seulement mentalement avec la propagande, mais aussi physiquement avec les effets sur notre santé de ce modèle.
Cette angoisse du temps qui passe ne date pas de notre civilisation moderne, mais elle prend chez nous une forme bien particulière. Dans le culte de l'homme et la femme tels qu'ils sont présentés par la propagande, la jeunesse éternelle est la règle. Une jeunesse physique et mentale au service de la logique de performance, pas de place ici outre-mesure à la curiosité et à la créativité. L'âge doit devenir synonyme de richesse accumulée avec le temps chez les hommes, tandis que chez les femmes on le cache comme une tare. Ceci est délibérément sexiste.
Le temps semble à la fois domestiqué et intraitable. Les moyens de transports et de communication modernes abolissent les distances, on peut se nourrir sans préparer quoi que ce soit, et obtenir du divertissement en un clin d’œil. Tout cela serait émancipateur sans la logique aliénante de la vitesse à tout prix. Le temps libéré par la simplification des corvées est utilisé pour une chose : consommer, sans même se soucier de savoir si on aura le temps de profiter des choses achetées. C'est le sentiment qu'on typiquement les cadres supérieurs, au fort pouvoir d'achat mais au temps libre limité. L'acte d'acquérir une nouvelle chose « ouvre du bonheur » pour reprendre Coca-Cola, mais ce bonheur ne fait pas plus long feu que ces canettes de trente-trois centilitres. Pour le retrouver, il nous faut repasser à la caisse. Pourquoi ? Pour éviter la sensation de passer à côté d'un plaisir que l'on peut s'offrir. Ne pas consommer est synonyme de frustration, et la frustration est inadmissible si on est convaincu qu'on a le droit de profiter de tout sans limites. Cette absence de limites fait que nous nous comportons comme des enfants.
Tous des gosses ?
Un système basé sur la contrainte infantilise ses sujets. Et la consommation est bel et bien basée sur une contrainte, car c'est une addiction. Dans notre imaginaire, la consommation nous rend socialement connecté aux autres. Les différentes marques l'ont bien compris et ont créé de véritables « tribus ». Elle permet de rejoindre un groupe mais aussi de s'affirmer en-dehors du groupe (le fameux think different d'Apple) en nous invitant à calquer notre personnalité sur celle d'une marque -à moins que ce ne soit la marque qui s'adapte à l'air du temps, à vrai-dire on ne sait plus trop-. Le consumérisme arrive à faire de nous à la fois des moutons et des « êtres suprêmes » qui vont impressionner leur voisin par leur dernier achat. Ce dernier ne manquera pas de nous imiter, pour faire tourner cette vis sans fin. Notre instinct de jouissance égoïste est érigé en institution.
Un culte de la jeunesse en trompe-l’œil
Un enfant est en quête d'identité et a besoin de protecteur(s) pour être à l'abri du besoin. Il est la meilleure cible pour la propagande commerciale, car il a peu de recul et se laisse guider par ses émotions. Quoi de mieux, dans l'idéal, que de maintenir cet état d'enfance pour garder les consommateur sous son aile ? C'est ce qui se produit dans le Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley, qui avait prédit dès 1932 une société de divertissement permanent. Aujourd'hui on n'y parvient pas totalement, puisque la dureté de la vie s'impose tout de même comme une évidence aux jeunes, et parce que l'éducation lutte pour continuer à exister hors de ce cadre. Mais les firmes se partagent tout de même le marché de cette éducation à la consommation.
McDonald's est pour cela emblématique : cette chaîne de fast-food mêle nourriture sucrée et aires de jeux destinées aux enfants des parents pressés.
La culture qui s'imposent par la force des médias aux enfants se veut indépendante du monde des parents, dans le spectacle merveilleux et éloignée des jeux créatifs. Prenons là l'exemple de Disney, à qui l'expression « vendre du rêve » va comme un gant. Un monde féérique aux mille produits dérivés, empreint d'un sentimentalisme qui disparaît de la société réelle. On y retrouve aussi une certaine idée des rôles masculins et féminins, présente aussi dans les jouets.
Le monde de l'adolescence est un point stratégique qui doit faire l'objet d'une attention particulière. Elle représente un tournant où l'enfant prend conscience du temps qui passe, cherche ses valeurs par lui-même et se révolte contre l'autorité. Il met aussi en marche sa vie sexuelle dont l'orientation et les pratiques mettent plus ou moins de temps à se mettre en place. La réponse du consumérisme ? La récupération de la contestation et (mot à rallonge) l'hypersexualisation.
La première est le détournement des contre-cultures adolescentes pour n'en retenir que l'aspect monnayable. On retrouve donc derrière l'industrie de la mode et des accessoires principalement. D'où l'impression légitime que la culture contestataire et libertaire née dans les années 60 a été « aspirée » dans le système. Ce dernier ruine au passage la crédibilité de mouvements qui ont pourtant un message à faire passer (ce procédé vaut aussi pour l'écologie).
La deuxième consiste pour moi à aliéner les sexualités naissantes, pour qu'elles s'inscrivent dans le modèle consumériste. La frustration organise la compétition de l'apparence chez les jeunes, sur des modèles de célébrités.
Si la maturité physique est encouragée et « accélérée », l'émancipation au-delà de l'apparence ne va pas de soi. Celle vis-à-vis des parents, bien que nécessaire, n'est utilisée que pour mieux nous placer dans le giron de la propagande, qui nous fait acheter mais échoue à faire de nous des adultes, à la fois responsables et rebelles quand il le faut. L'activité cérébrale culmine à cet âge, et pourtant nous autres les jeunes passons bien souvent pour une génération sans valeurs voire sans valeur auprès de nos aînés.
Dans les faits notre société fait preuve d'un grand cynisme vis-à-vis de ses jeunes troupes, qu'elle stigmatise dans une répression imbécile. A côté de cette exaltation de la jeunesse, le chômage, la précarité et la violence sociale que subissent les jeunes prennent de l'importance et génèrent des exclus qui ont la vie devant eux.
Nous et la Terre, je t'aime moi non plus
L'année 1968 a été un sursaut exceptionnel à plus d'un titre. Loin de la Sorbonne en émeute, des manifestations pacifistes aux USA et du Printemps de Prague, un satellite avec suffisamment de recul a pris la première photo de la Terre dans toute sa rondeur. Pour la première fois les limites de la Terre devenaient clairement visibles. La même année, le mouvement écologiste prenait forme. Et ce fut justement dans les années qui suivirent que la limite de l'empreinte écologique soutenable fut franchie. Non content d'être équipé de la voiture, du frigo et du téléviseur moyen, nous allions maintenant lorgner du côté des produits de luxe, exhibés dans des centres villes à quelques litres de chez nous. L'utilisation du plastique et des produits jetables explosa et notre dépendance au pétrole allait croissante.
Où est l'arnaque ?
Vous êtes peut-être déjà accablé de tous ces constats et vous vous dites, réaliste, que l'homme a besoin de l'économie et continuera à la servir. Mais l'économie, n'est-ce pas la science de l'utilisation intelligente des ressources pour répondre aux besoins humains ? A ce sens, l'ordre du monde actuel est une hérésie car il repose entièrement sur une monnaie à la valeur contestable. Elle est certes nécessaire pour les échanges de produits différents et pour le commerce extérieur. Difficile d'imaginer un monde sans argent. Cependant, chaque crise financière est la preuve que la finance s'est déconnectée de l'économie réelle. En 1971, le président Nixon supprime l'étalon-or sur le dollar, dont le taux de change devient flottant. De même, les Etats se financent de plus en plus sur les marchés financiers, ce qui rend la spéculation sur les finances publiques possible. Les banques sont devenues des casinos de spéculation à renflouer régulièrement, de véritables boulets pour nos sociétés. Elles ne font plus leur travail de simples gardiennes de richesses et de réserves de valeur au service des entreprises utiles et des pays. L'économie telle qu'on nous la présente aujourd'hui n'est pas une économie équilibrée, mais une organisation où la sphère de la finance domine. Ce néolibéralisme qui se veut si rationnel ne voit dans la main-d’œuvre qu'un coût, dans les cotisations sociales que des charges, dans les solidarités que des archaïsmes. Et dans sa logique prédatrice, elle nous invite à participer à cette ruée vers l'or (enfin le dollar !) d'où ressortent de plus en plus d'exclus, ...80% du monde en fait.
Pour cela, la propagande néolibérale doit obtenir notre coopération en donnant à chacun comme objectif l'enrichissement matériel. La consommation ostentatoire et le prestige social constituent la carotte du système, dont se contenteront les riches. Car les ultra-riches, eux, n'en restent pas là et ont un empire de multinationales et d'institutions financières qui leur permet de faire et défaire les politiciens par le lobbying. Le message au gogo moyen peut donc se résumer en « si tu travailles dur, tu deviendras propriétaire de ta vie ». C'est Marx qui disait qu'un prolétaire est un individu qui ne possède rien hormis sa propre force de travail, qu'il est contraint de vendre. Dans ce sens, une part importante de la population mondiale est prolétaire, même en France, qui semble le redécouvrir.
Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette
Et cette utilisation qui est faite de nous relève de l'exploitation. En Chine, au Vietnam, au Mexique... Personne n'ignore l'existence des sweatshops (« ateliers à sueur »), des bagnes de l'électronique à Shenzen ou des usines Dacia en Roumanie. Mais ce qui est nouveau, c'est que la grande braderie de la main d’œuvre frappe maintenant l'Europe, la vieille, la riche. La finance, comme le prolétariat, n'a pas de patrie et se fiche bien de délocaliser aux quatre vents, là où les billets sont plus verts. Non, elle ne nous épargnait pas par amour des occidentaux, mais par volonté d'exploiter d'abord ceux qui étaient déjà dans la pauvreté. Ces contrées lointaines veulent à leur tour consommer ? Nous sommes à notre tour sommés de servir cet « intérêt mondial »...
A priori, la consommation semble la récompense du travail. Mais chaque acte de consommation encourage mécaniquement l'entreprise derrière le produit à augmenter sa production et donc sa pression sur les travailleurs. En soi ce n'est pas l'acte de consommer qui est coupable, mais le fait de cautionner telle ou telle forme d'exploitation sur notre planète. J'ai lu (sur Agoravox justement) un internaute qui a dit à juste titre qu'en anglais, consume voulait aussi dire consumer. Toute consommation est une destruction répondant à un besoin.
D'où vient le besoin ?
Le besoin peut être naturel ou artificiel. Pour les besoins créés de toutes pièces, l'outil indispensable est la publicité. Deux mots sur ce terme. Publicité désigne au départ ce qui relève de l'espace public, de la vie en société. Ses moyens de ciblage : la presse, les affiches, la radio, la TV, internet : les mass medias. Elle est une tentative permanente d'influencer notre comportement, en l'occurrence pour l'achat ; et use pour cela de psychologie et de neurologie, jouant avec nos valeurs et nos émotions. Il est strictement impossible d'échapper à ses messages. Chez soi, on peut la filtrer. Mais dans le monde extérieur, elle est reine. C'est le visage de la propagande dans notre monde. Le principal moyen par lequel le système marchand communique avec nous.
La réciprocité, la logique de feedback est destinée à justifier et à rendre plus sympathique le matraquage en nous laissant donner notre avis sur les produits... Mais pas sur le fond du scandale : la légitimité de ce bourrage de crâne. Elle permet au ciblage de s'améliorer. Depuis le web 2.0, une autre logique semble toutefois l'emporter : celle du cocooning de l'utilisateur passif qui est surveillé en ligne sans être dérangé dans ses comportements sociaux et d'achat, déportés dans le cyberespace.
La plupart d'entre nous trouvent leurs besoins vitaux monnayables (on ne parle pas d'amour ou d'intelligence ici...) satisfaits, et nos nouveaux besoins sont donc provoqués par la publicité et son appel du pied permanent à notre inconscient. La propagande n'est pas magique : elle utilise des fantasmes humains qu'elle n'a qu'à activer. Souvent le désir de puissance, de distinction, le sens de l'esthétique. Cette guerre psychologique pour nous faire digérer de nouveaux besoins est suivie par la guerre économique, qui va lancer la production rentable et forcenée des derniers artefacts à la mode. Et cet appel d'air impérieux des nouveaux marchés va justifier l'exploitation qui se perpétue loin des regards de l'acheteur.
Les consommateurs suivront le « achetez du bonheur dans ce produit » par la contrainte mentale.
Les travailleurs suivront le « vendez-vous pour pouvoir consommer » par la contrainte tout court.
Les deux parties s'exploitent mutuellement, les produits à consommer impérieusement sont légion et font pression. Le tout sous l'oeil du patronnat, gestionnaire des moyens de production. Gestionnaires seulement, certes grassement payés mais tout est financiarisé et sous la tutelle des actionnaires -de la valeur virtuelle-.
Quelques pistes
Si on fait la bilan de ce tour d'horizon, on peut trouver plusieurs qualificatifs à ce système qui nous domine : il est forcené, extrêmement matérialiste, infantilisant et profondément utopique, au sens vil du mot car il agit comme un poison planétaire, une cellule cancéreuse qui s'est déconnectée de la réalité du corps sur lequel elle est née.
La vigilance est de mise, car à défaut d'être logique, le système a d'immenses moyens techniques de persuasions. Pour nous asséner que la croissance verte est possible, que la compétition de tous contre tous peut être de velours.
Devant la complexité de cette usine à gaz, nous pourrions chercher des portes de sortie simples : la solidarité, l'amour, la vie spirituelle, la philosophie, le débat sur ce qui nous concerne tous, comme l'orientation que prend la technologie. La liste est longue et vous avez la vôtre.