Duménil à Alincourt : la vie de château sans les charges
par Julie Dep
samedi 9 mai 2009
Qu’est-ce qui manque à un parvenu pourvu de Rolex, de yacht et boîtes de luxe, de résidences dont la principale en Suisse, et de tous les signes de la « réussite » du quinqua 2009 ? Un château du terroir ! Alain Duménil, 57 ans, spécimen de patron voyou*, a donc acquis celui d’Alincourt (Oise), sans le mode d’emploi du gentilhomme. Alors que l’ancienne propriétaire, optimiste, se défaisait à bas prix de la demeure et du parc afin que continuent d’y camper à l’année la vingtaine de familles y résidant depuis 30 ans, tous les moyens sont bons au PDG pour les faire déguerpir.
Cadenas, bâches, molosses des deux genres - canin et humain - bouclent depuis janvier les dix hectares et protègent les tableaux du milliardaire d’un tout-venant qui se risquerait à moins de 5 mètres des remparts. Pour déloger les campeurs, dont les droits ne tiennent qu’à l’usage, mais qui en trente ans ont investi dans des chalets, voire touchent l’APL, l’apprenti hobereau a trouvé mieux que l’indemnité qu’ils demandent : il a loué les services d’une milice, une équipe de "sécurité" spécialisée dans la guerre à l’usure, et lui a abandonné le parc.
Les méthodes du patron reprises par le châtelain
L’équipe alors se transforme en bruyants fêtards, semant la panique en 4x4, à coups de klaxon et de pétards, cassant des portails, activant les décibels en pleine nuit... Le harcèlement a payé puisqu’il ne resterait qu’une quinzaine de campeurs, dont certains, soutenus par le Secours catholique et le DAL, ont cessé de s’alimenter ou porté plainte. Mais, pas plus que Duménil - résidant d’ordinaire en Suisse - ne peut légalement expulser sans avis préfectoral, les plaintes n’aboutiront. Le jugement d’expulsion aura lieu le 11 mai au tribunal d’instance de Beauvais.
L’ex-propriétaire, qui contre un petit loyer cédait une partie de son parc, témoignera-t-elle au procès contre un acheteur acceptant le rabais, mais pas la contrainte qu’il induit ? Un méchant comme on les aime au cinéma, introverti, collectionneur, indifférent à la misère (quel rôle pour Michael Lonsdale !), et dont on ne serait pas étonnée qu’il fît un jour les frais de l’exaspération populaire ? Pour peu que les expulsables trouvent des catapultes, de l’huile bouillante, des renforts... et que l’homme y soit - car il n’est pas à une maison près -, le spectacle pourrait valoir celui du Puy-du-Fou.
Source : Rue89