Education : Auxerre ou PSG ?

par Geneste
mercredi 28 septembre 2011

Les temps sont durs et les positions idéologiques se crispent. Le terrain de l’éducation est un de ces champs de bataille idéologique privilégiés, tout simplement, car il engage de manière décisive l’avenir. Les deux modèles en « concurrence » sont le système public et « gratuit » d’un côté, le système privé et payant de l’autre.

Commençons par faire une remarque non idéologique, mais pragmatique concernant le système privé (nous cantonnerons dans cet article à l’enseignement supérieur). Si nous observons ce qui se passe dans les pays du monde ayant un système majoritairement privé, nous constatons que les coûts des études ont explosé ces dernières années ; il n’est pas rare aujourd’hui de voir des études à 30 000$/an. Ce phénomène est très sensible aux USA, en Grande Bretagne, mais aussi en Chine…

Essayons de voir pourquoi un tel phénomène. En réalité, les universités privées sont devenues, comme les entreprises, des machines à fric. Certaines gèrent des milliards de dollars. Pour récolter encore plus, elles font donc appel au star system que l’on trouve, entre autre, dans le milieu du football. On achète les meilleurs ! Ceux qui ont connu l’époque de feu Jean-Luc Lagardère et du Matra Racing savent de quoi il en retourne : des salaires exorbitants pour de bien piètres résultats ! C’est aujourd’hui la stratégie adoptée par le PSG (décidément, on ne comprend pas vite à Paris !). Pour les universités, le star système marche comme suit : on embauche les meilleurs chercheurs (qui, bien souvent sont bien meilleurs en cooptation parmi leurs pairs que dans leur discipline de prédilection) et on garantit au « client », sous ce couvert, le meilleur enseignement possible. Mais qui a dit que quand bien même on aurait le meilleur chercheur, ce dernier serait aussi le meilleur enseignant ? Par ailleurs, on promeut « l’enseignement par la recherche », alpha et oméga actuel de l’université. Mais avant de chercher, ne faudrait-il pas en savoir un peu ? On confond donc allègrement enseignement et recherche, on est dans un système de fuite en avant où il faut toujours plus d’argent pour faire, soi-disant, toujours plus d’exploits, mais, en réalité, on a lâché la proie pour l’ombre, on s’est trompé de « core business », celui de former nos jeunes. A l’instar du football, un tel système n’est pas soutenable.

Passons au système public qui, lui aussi, a ses défauts. Vivant bien à l’abri des péripéties du monde réel, le monde universitaire public ne se réforme quasiment jamais. Il a certes bien marché à une époque, c’est-à-dire, principalement, au sortir des deux guerres mondiales, soit à l’issue de deux effondrements de notre pays et où il a fallu que certains prennent conscience de l’abîme qui était sous leur pieds. Puis, comme le moteur qui ronronne, mais n’en vieillit pas moins, avec une gestion publique délétère, la décadence s’installe lentement, mais sûrement. Vous n’êtes pas d’accord ? Regardez l’enseignement secondaire, public s’il en est puisque le coût moyen dans le privé est de 40€/mois (7 paquets de cigarettes !), soit quasiment rien, qui « donne » un BAC qui ne vaut pas plus à quasiment tout le monde. Ce n’est pas une dérive, cela ? Et si nous revenons à l’enseignement supérieur, force est de constater que le privé a le vent en poupe tout simplement parce qu’il y a une crise de confiance dans le public pour des raisons que tout le monde connaît, mais que personne ne veut avouer.

Comment alors se sortir de l’ornière dans laquelle se trouve notre pays et comment éviter l’écueil du système privé qui, avec son inflation des coûts, de facto, interdit aux plus défavorisés, mais aussi, à terme aux classes moyennes, l’accès à l’enseignement supérieur ? La solution me semble assez simple et consiste à mimer ce que fait l’équipe de football d’Auxerre depuis des décennies maintenant avec un certain succès. Remarquons que peu nous importe le classement de Shanghai. La qualité d’une université se juge à ce qui a été inculqué en quantité et en qualité aux étudiants pendant le cursus. Peu importe les publications dans les revues à comité de lecture qui, encore une fois, tiennent plus de la coterie que de l’objectivité. En effet, tout élève entrant à l’université n’a pas vocation à devenir un brillant chercheur, fort heureusement. Par contre, il peut devenir un bon ingénieur, un bon avocat, etc. Et c’est cela que nous voulons, collectivement.

Le juste milieu entre privé et public pourrait se trouver dans le processus suivant. Les études seraient gratuites pour les étudiants qui recevraient chaque année un chèque de l’état correspondant au coût budgété pour un niveau donné. Chaque étudiant irait voir l’université de son choix avec ce chèque, qui ne pourrait servir à autre chose qu’à acheter de l’enseignement et l’université ne pourrait exiger de l’étudiant aucune autre somme. Le choix par l’université, qui n’a bien entendu pas un nombre de places illimité, se ferait alors sur des critères « marchands » d’offre et de demande. Par contre, les universités seraient privées et pourraient, le cas échéant et dans une limite fixée par l’Etat, se faire financer par des sponsors. Par ailleurs, l’Etat exercerait un contrôle strict du service rendu en matière d’enseignement par chacune des universités, en évaluant le niveau d’entrée et le niveau de sortie des étudiants sur des critères objectifs et anonymes (examens…). Chaque université serait ainsi notée. Soyons clair, une université qui n’aurait pas assez de candidats dans ce système et donc pas assez de revenus, pourrait faire faillite, tout simplement, comme une entreprise, ce qui est logique.

Avec un tel système, potentiellement, à l’instar d’Auxerre, on peut même jouer en ligue 1. Et cela en formant ses propres joueurs au lieu d’aller les acheter ailleurs ! Encore faut-il en avoir la volonté. Le système est bien évidemment soutenable et si l’on cherche bien, par rapport au système privé qui se met en place un peu partout dans le monde, le système proposé ici est compétitif à la fois en termes de coût et de qualité.

A bon entendeur…


Lire l'article complet, et les commentaires