Election européenne : enseignement politique ou sociétal ?
par Stéphane GELY
mercredi 10 juin 2009
Les experts de tous poils s’étonnent des faibles résultats des socialistes et à l’inverse de la performance de l’UMP. Le tout dans une période où les conséquences sociales de la crise et son impact psychologique sur l’opinion auraient de quoi stimuler un parti de gauche.
Plusieurs raisons expliquent sans doute cet échec comme par exemple une sanction vis-à-vis d’un PS incapable d’incarner un véritable projet.
Mais soulignons que d’autres écologistes siègeront au Parlement Européen comme Corinne LEPAGE et Jean-Luc BENNAUMIAS.
Dans ce contexte, cette vague verte ne dépasse-t-elle donc pas de pures considérations politiciennes ? Au lieu de cela, ne traduit-elle pas réelle une mutation sociétale ?
Une véritable offre
Les Français seraient prêt à se mobiliser à partir du moment où on leur apporte un discours cohérent et un réel projet ? C’est en tous les cas ce que semble confirmer ce scrutin. Il ne s’agit plus de s’opposer à tout prix à une politique Franco-Française, mais de proposer une vision sociétale. Europe-Ecologie (E.E), d’abord par son nom s’est positionné sur la scène européenne. Ensuite, il a développé un réel projet de société. Enfin, ces leaders ont su faire abstraction de leurs individualismes et trouver l’unité autour d’une seule et même offre.
Un succès purement écologiste ?
Cette réussite électorale s’inscrit à la suite d’événements ayant déjà eu un réel impact dans l’opinion du point de vue écologique. Citons le film d’Al Gore, le Grenelle de l’Environnement (depuis controversé quant à son application) ou encore le succès de la Fondation Nicolas HULOT.
Mais ne dépasse-t-elle pas la seule demande d’écologie ?
Le bouclier social européen, le respect des droits fondamentaux, la solidarité Europe/monde sont des thèmes sociaux.
Ce qui expliquerait, à la grande satisfaction de certains analystes un report de voix du PS vers les Verts.
L’avènement d’un nouveau modèle socio-économique
Thomas LEGRAND se demandait hier matin sur France Inter, si nous n’étions pas à l’aube d’une profonde modification de notre société, notamment en termes de consommation. Et il prenait l’exemple de Condorcet qui se prononçait pour l’abolition de l’esclavage tout en étant encore profondément ancré dans la pensée de l’époque. En d’autre termes, nous pourrions être à l’aube d’une rupture idéologique tout en étant encore dans le modèle qui prévaut depuis de nombreuses années.
Quoique que controversé quant à son application, le Grenelle de l’environnement marque un tournant. De même que la volonté de Barack OBAMA de faire de la croissance verte l’un des axes prioritaires de son plan de relance.
Enfin, jamais autant d’argent public n’aura été investi dans les énergies renouvelables. Selon le site web "Enerzine" s’appuyant sur une analyse du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), ces investissements auraient progressé de 60% entre 2006 et 2008.
Un mouvement déjà initié au niveau de nos habitudes de consommation
Jamais n’a-t-on vu autant de produits bio dans les linéaires de la grande distribution ; 44% des Français ont consommé bio au moins une fois par mois en 2008 (source : CSA/Agence-bio).
Parallèlement, on constate un fort développement des énergies renouvelables. On estime à 27% le taux de croissance annuel du marché des panneaux solaires jusqu’en 2012 (source : Swissinfo).
Et le marché de l’éolien double tous les 4 ans (source : Global Wind Energy Council).
Enfin, l’habitat écologique marque ici encore un tournant tant au niveau individuel que collectif. Quoique n’étant que 5% à avoir franchi le pas, l’intérêt du grand public pour l’habitat est constant (source : Sauramps). Et les bâtiments à faible consommation se développent, notamment grâce aux labels (HQE, BBC...).
Parallèlement, le commerce équitable maintient une croissance à deux chiffres malgré une crise économique majeure.
Ces modes de consommation ne traduisent-ils pas à eux seuls cette aspiration à l’écologie et à la solidarité ?
En conclusion
Les prévisionnistes parlent souvent de signaux faibles pour parler de phénomène pouvant entraîner un profond changement, voire une rupture. Or, il semblerait que nous soyons au delà de simples signaux. La question est de savoir si l’ampleur sera de nature à modifier notre modèle ou simplement le "colorer".