En quoi la “mondialisation néolibérale” empêche-t-elle un management vertueux ?

par Charles Carpentier
mardi 16 août 2022

La nouvelle philosophie des entreprises - qui consiste à produire plus dans des délais toujours plus courts - transforme nos managers en robots humanoïdes.

Aujourd’hui, ère où une concurrence effrénée entraîne une hérésie justifiée des chiffres, les managers deviennent contraints à se réduire à du management de style Platonicien c’est-à-dire à diriger des personnes travaillant uniquement pour combler un manque : l’argent.

Dû à cela, le management Spinoziste qui prône le fait que les gens travaillent pour une cause qui les met en joie comme l’esprit de leur société, ses valeurs, son but, son ambiance… tend à disparaître.

Dès lors, on ne retrouve plus que des salariés poussés par une logique platonicienne - qui dérive ensuite vers celle de Schopenhauer - après avoir trouver du travail pour combler leur manque d’argent, les salariés éprouvent une frustration d’être là où ils sont : ils s’ennuient.

Même si nous sommes tous forcés de passer par Platon, la mondialisation concurrentielle nous empêche de nous rapprocher de la pensée Spinoziste et nous enlise vers celle de Schopenhauer.

Cette évolution de l'entreprise et du management peut être imagée par le cas de Boeing. Dès sa création (en 1916), le constructeur aéronautique avait recruté des employés fiers de travailler, des employés heureux et soudés grâce un directeur général juste et humain. Leur décision n’était alors pas seulement guidée par une fiche de paie mais par bien plus : une volonté de contribuer à quelque chose de grand : le rêve américain. 

Ils passaient par Platon et atterrissaient chez Spinoza.

Mais, quand la société a été rachetée vers la fin des années quatre-vingt dix et que le concurrent Airbus est arrivé sur le marché, le nouveau directeur général n’a pas hésité à prendre des mesures drastiques excluant tout avis interne. Pour augmenter sa production, les conditions de travail n’étaient plus vérifiées ; pour augmenter le cours de son action, le bonheur des employés n’était plus une priorité ; pour diminuer ses coûts, la sécurité était délaissée… résultat : deux crashs sur le même modèle (Boeing 737 Max) à cinq mois d’intervalle.

La “mondialisation néolibérale” (Les conséquences du capitalisme, Noam Chomsky et Marv Waterstone), qui est le fondement de cette concurrence mondiale, serait donc la cause de l’ennui au travail. Ce système pousse par conséquent à la création de managers interdits de toute émotion, et ne devant réfléchir qu’à travers, chiffres, coûts et bénéfices.

Les salariés sont poussés dans leur retranchements, n'ont plus aucune envie de produire, leur affection pour l'entreprise devient moindre et leur motivation se réduit à une hausse de quelques euros. 

“Au lieu d’être considéré comme un lieu d’épanouissement de la personne, un moyen de conquérir sa liberté, un instrument privilégié de la promotion sociale et d’émancipation, il est devenu au fil des ces trente-cinq dernières années le symbole de l’aliénation, de la marchandisation, de l’exploitation de l’homme par l’homme.” Nicolas Sarkozy (Tout pour la France, Plon)

Les managers esquintés par cette pression concurrentielle, ne pourront qu’avouer à leurs enfants et petits-enfants que ce qu’ils ont créé se résume à un simple tableur Excel.

L’objectif des entreprises dans les prochaines années est donc d’arriver à transformer leurs employés en “météores destinés à brûler pour éclairer leur siècle” : c’est cela qui les emmènera sous le soleil d’Austerlitz.


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