Encore de fausses solutions pour résoudre la crise du surproductivisme alimentaire

par SaeD
vendredi 4 septembre 2015

Face à la crise du monde agricole qui se poursuit, le gouvernement Hollande tente de la stopper ou au moins de la canaliser avec des mesurettes qui ne répondent pas aux problématiques des agriculteurs Français.

Cet été, les actions du monde agricole se sont multipliées dans toute la France pour dénoncer des prix trop bas, qui découlent de l’embargo russe, de la fin des quotas laitiers européens et du dumping social organisé par les Allemand et les Espagnole.

Au début du mois de juillet, le gouvernement a dû présenter pour y faire face, un « plan de soutien à l’élevage Français » doté d’une enveloppe de 600 millions d’euros. Dans un catalogue de 24 mesures d'urgence, il s’agissait de soulager les trésoreries des éleveurs étranglés par des prix trop bas en annulant certaines charges et cotisations (exonération de taxes foncières) de l’ordre de 100 millions. Le gouvernement s’est aussi engagé à consentir un report de charge de 500 millions (impôts sur les revenus et les sociétés, remboursement anticipé de TVA) et s’est engagé à aider les éleveurs en difficulté à restructurer leur dette. De plus l’état a négocié avec les banques pour que le fonds d'allégement des charges (FAC) passe de 8 à 50 millions d'euros, pour soutenir les éleveurs les plus en difficulté. La Banque publique d'investissement (BPI) a aussi garantie aux entreprises du secteur de l'élevage un fonds de 500 millions d'euros de crédit bancaire de trésorerie. Pour la filière porcine, le ministère de l'agriculture s’est même engagé à faire remonter le prix du kilo de porc, à baisser les cotisations sociales, et à favoriser une meilleur redistribution des marges entre les producteurs, les intermédiaires (abattoirs, transporteurs, négociants…) et la grande distribution. Le gouvernement avait aussi dévoilé des mesures structurelles, comme la promotion de la viande française à l'export, le renforcement des contrôles sur l'étiquetage, l'approvisionnement local des cantines et des exonérations fiscales pour l'installation de méthaniseurs, ainsi qu'un prix de rachat de l'électricité adapté. Suite à ces annonces, la coopérative Cooperl et la société Bigard-Socopa qui sont les deux plus gros acheteurs et transformateurs de viande porcine en France (30% du marché national) ont décidé de boycotter la cotation des produits du Marché du porc breton. Cela a provoqué dans cette filière de nouvelles grognent qui s’est soldé par un statu quo entre industrielles, éleveurs et gouvernement.

Hier, Jeudi 3 Septembre, pour manifester à nouveau leur mécontentement, les agriculteurs ont fortement perturbés la circulation du périphérique parisien avec 1500 tracteurs et ont déversé des tonnes de lisiers. Face à cette crise qui se poursuit, le gouvernement Hollande tente de la stopper ou au moins de la canaliser. Manuel Valls a donc annoncé une « année blanche » en 2015 pour le remboursement des dettes bancaires des agriculteurs en difficulté, la prise en charge des intérêts d'emprunt seront doublées pour atteindre 100 millions d'euros, et les prises en charge des cotisations sociales seront triplées pour atteindre 50 millions. De plus, un alignement de la cotisation maladie sur le régime des indépendants permettra de réduire les charges sociales agricoles de 50 millions d'euros. Le chef de l'Etat, s’est même engagé à rallonger les aides pour les porter à « 3 milliards d'euros en 3 ans » sous formes d’aides étatiques, régionales et européennes.

Pourtant, ces nouvelles mesures ne répondent pas aux problématiques des agriculteurs français qui survivent aujourd’hui grâce aux subventions Françaises et Européens (PAC). La réalité sur le terrain le démontre puisque les prix à la vente ne couvrent pas les coûts de productions, les cotisations sociales, le prix des aliments pour les animaux et autres charges (médicaments, carburant…). D’ailleurs la part des subventions dans les revenus des exploitants spécialisés en céréales, en oléagineux et protéagineux, en production bovine et ovine orientée vers la viande, sont supérieurs à 100% !

Ces crises à répétition révèlent en outre les failles du libéralisme économique qui n’estime plus la production alimentaire comme une activité agricole, mais comme une activité purement industrielle "hors-sol", où les prix s’autorégulent selon la loi de l’offre et de la demande du marché. Dans ce vaste marché du travail d’élimination pure et simple des "petits" au profit des "gros", les financiers oublient de dire que les prix sauf dans les créneaux de qualité reconnue, ne tiennent pas compte des différences réglementations sanitaires, normes environnementales, et autres valeurs monétaires des cotisations sociales en vigueurs quand elles existent pour protéger les salariés. C’est d’ailleurs dans cette même logique que les critères d’ajustements des néo-libéraux à l’internationale se traduisent dans les faits par des écarts de salaires de 1 à plus de 80, l’expansion accrue des monocultures, l’accaparement des terres partout dans les pays pauvres, la destruction de l’agriculture vivrière, des pollutions qui contaminent les nappes phréatiques, et des problèmes de santé publique sont visibles dans bon nombres de pays peu regardant sur leurs législations environnementales. Cette logique agro-business à grande échelle exploite pour un salaire de misère les ouvriers agricoles, maltraite les animaux, méprise l’environnement, détruit plus d’emplois qu’ils n’en créent et permet aux patrons de l’agroalimentaire de faire de larges profits. C’est cette même libéralisation des marchés qui engendre une destruction et un gaspillage du tiers de l’alimentation produites dans le monde chaque année. La surconsommation des pays riches met en effet à la poubelle 670 millions de tonnes de nourriture, et le manque d’infrastructures volontaire des pays pauvres en annihile 630 millions de tonnes. Un tel gâchis provient des politiques marketings elles-mêmes, qui régulent volontairement les quantités de denrées alimentaires végétales et animales mises en vente pour obtenir le maximum de bénéfices. Dans ces conditions, les protagonistes de l’économie du marché qui fonctionnent selon les lois de l’offre et de la demande, détruisent les surplus économiquement non-rentable et spéculent sur le prix des produits agricoles. Cette aberration tue ainsi impunément 5 millions d’enfants chaque année, et fait souffrir 925 millions personnes par jour dans le monde.

Si l’on veut mettre en place une politique agricole internationale ambitieuse au service de l’intérêt général des peuples, il faut d’une part donner les moyens à chaque pays de mettre en place sa souveraineté alimentaire, offrir des emplois et des revenus décents aux salariés du monde agricole, produire une alimentation de qualité nutritive et gustative partout dans le monde, œuvrer à la transition écologique de l’agriculture en produisant de façon agroécologique, et il est primordial d’ériger des normes d’importations drastiques pour éviter le dumping fiscale. D’autre part, il est temps que les citoyens consommateurs se mettent à consommer autrement en privilégiant les produits respectueux du bien-être animal, et qu’ils décident de manière générale à consacrer un pourcentage plus important de leurs revenus à la nourriture, à la santé, et au développement de sa région pour un meilleur vivre ensemble planétaire.
 

 SaeD


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