Enfants martyrs en vedettes

par La râleuse
mercredi 10 septembre 2008

Une gloire éphémère ou même constante vaut-elle le sacrifice de l’enfance ?

Tous autant que nous sommes partageons un cocktail de réactions unanimes lorsque nous entendons parler du martyre vécu par un enfant. Nous sommes tous choqués, horrifiés, scandalisés.
Et pourtant, que ce soit par bêtise, par inconscience ou par indifférence, nous nous rendons parfois coupables du martyre de certains enfants. Un martyre qui n’existerait pas sans notre complicité même si elle n’est que passive. Je parle du martyre vécu par ces enfants que la volonté seule de leurs parents a médiatisés.
Par exemple, qui se souvient encore de Jordy, ce petit garçon devenu star dès l’âge de 4 ans parce que son papa, producteur, et sa maman auteur en avaient décidé ainsi et que pour son malheur le gamin, outre la pétulance de son âge, avait une mignonne frimousse alliée à un joli filet de voix.
Jordy a 20 ans cette année. Qu’est-il devenu ? Qu’est-il advenu de la fortune que ses parents ont engrangée en livrant leur fils à une éphémère vie de paillettes ?
Après cette brève existence de bête de scène, Jordy n’a même pas eu la possibilité de s’épanouir dans un environnement familial ; comme par hasard, la fin de la carrière de l’enfant prodige a marqué la fin du couple qui a divorcé peu de temps après.
Elles sont trop nombreuses, hélas, ces stars filantes comme celles dont le nom a brillé aux frontons des salles de spectacles, dont le nom revenait comme un leitmotiv dans les statistiques gagnantes du Top 50 : Douchka, les Ministars, Anne, Billy, Mélody… Nouvelles divinités du show-biz qui fascinaient et provoquaient l’admiration et l’envie de milliers d’adolescents pré-pubères.
Quand bien même certains de ces enfants continuent à exercer une profession artistique maintenant qu’ils sont devenus des adultes, comment croire qu’ils n’ont pas gardé des séquelles de ce traumatisme que représente la perte brutale d’une popularité à laquelle on s’habitue si vite ? Comment croire qu’ils ne vivront pas le restant de leur vie avec une certaine frustration mêlée d’amertume sachant qu’ils ne connaîtront plus jamais la célébrité ?
Et ces sportifs que nous admirons sur les courts de tennis ou dans les piscines olympiques, quelle enfance ont-ils vécue ?


Steffi Graf, Monica Seles, les sœurs Vénus et Serena Williams smashaient, dit-on, leurs premières balles dès l’âge de 4/6 ans. Parce qu’elles rêvaient de devenir des championnes de tennis ? Non, plus vraisemblablement parce que c’était le fantasme de leurs pères.
On est même en droit de se demander si la rébellion de Laure Manaudou qui s’est concrétisée par des tentatives d’escapades amoureuses n’est pas le résultat d’une enfance martyrisée.
Le mot vous offusque ?
Pourtant comment définir autrement l’obligation faite à une gamine tout juste âgée de 6 ans de s’inscrire dans un club de natation par un père entraîneur de handball et une mère joueuse de badminton qui lui avaient appris à nager deux ans auparavant.
En quoi ont consisté les loisirs de la fillette Laure Manaudou, de l’adolescente Laure Manaudou ? À subir des entraînements intensifs, participer à des championnats incessants, se livrer à des compétitions frénétiques, s’imposer un régime alimentaire draconien et une discipline de vie spartiate.
Quelle existence jouissive !
Et le libre consentement de ces contraintes excuse-t-il la persécution subie ?
Mais le pire n’avait pas été atteint.
C’est chose faite maintenant avec la nouvelle attraction dans l’arène de Michelito, ce gamin franco-mexicain de 10 ans qui exhibe ses prouesses de toréador principalement en Amérique latine.
Là encore, c’est le père de l’enfant qui est à l’origine du ‘job’ de son fils et qui est outrageusement fier de cette carrière. Comme si on pouvait se glorifier d’avoir créé un assassin !
Parce que la mise à mort des taureaux - qui lui serait interdite en France quand bien même on l’autoriserait à toréer - il l’exerce dans d’autres pays moins pointilleux sur l’éthique.
Eh oui, il a déjà du sang sur les mains le petit Michelito qui, depuis quatre ans déjà, "joue simplement à l’aide d’une cape et d’une muleta comme 300 autres enfants de son âge qui appartiennent aux écoles taurines françaises", comme le déclare le papa ancien torero lui-même qui connut quelques heures de gloire sans doute trop fugitives à son goût.
Nul doute que le papa pompeux sera fier de lui et de son fils quand ce dernier se fera encorner.
Je repose donc la question :
Spectateurs plus ou moins apathiques, ne sommes-nous pas un peu responsables de ces jeunesses sacrifiées, de ces avenirs compromis, au même titre que ces parents qui, oubliant leur mission première qui consiste à veiller au bien-être de leur progéniture, utilisent leurs enfants pour satisfaire leurs ambitions personnelles.
Qui plus est, selon que l’on considère leur parcours de manière optimiste ou pessimiste, les acteurs cités ont connu une période de gloire plus ou moins pérenne, plus ou moins fugace, mais combien sont-ils qui se sont vu voler leur enfance pour un résultat complètement stérile ?


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