Et comme par hasard, le chômage baissa
par Laurent Herblay
mardi 27 octobre 2015
En septembre, le nombre de chômeurs de catégorie A a baissé de 23 800. Heureux hasard pour un président qui a lié son sort à l’évolution du chômage. Sauf que ce chiffre en cache d’autres moins reluisants et que la méthode de comptage a changé cet été. Alors, arnaque ou vraie éclaircie ?
Hollande, le Majax du chômage ?
Cela fait 7 ans que le chômage n’avait pas baissé aussi fortement en un seul mois. Et comme le souligne la ministre du travail « pour la première fois depuis 2011, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie A a reculé sur 4 mois ». Pour un peu, on pourrait y voir une forme de début de succès pour le président. Mais il y a beaucoup de bémols à apporter. D’abord, il faut quand même rappeler que c’est sous ce président que le nombre de chômeurs a battu un nouveau record. D’ailleurs, il reste encore plus de 3,8 millions de chômeurs de catégorie A, un chiffre d’autant plus colossal que si on inclut les personnes exerçant une activité partielle, alors la France compte 5 727 300 chômeurs. Pire, ce nombre continue à grimper (+ 1 800 ce mois-ci), soit une progression de 5,6% sur un an pour tout le territoire.
Autre résultat calamiteux, le nombre de chômeurs de longue durée continue de progresser, à 2 428 100 personnes, une hausse de 1% sur un mois et 10,4% sur un an. Des chiffres qui montrent que l’exclusion du marché du travail est de plus en plus violente et difficile. En outre, il faut rappeler que le gouvernement a changé en plein été la méthode de comptabilisation du nombre de chômeurs, ajustement dont il est difficile d’imaginer qu’il n’était pas sans arrières-pensées. D’ailleurs, pour le mois de juin, le nombre de chômeurs ne progressait que de 1 300 avec la nouvelle méthode, contre 11 300 avec l’ancienne… Difficile donc de ne pas voir dans les résultats du mois de septembre les résultats d’un tripatouillage des chiffres destiné à améliorer artificiellement les chiffres du chômage, souvent oublié.
Et si la conjoncture se retournait ?
Cependant, on peut se demander si ces possibles arrangements avec les statistiques ne font pas qu’aider un mouvement général positif. En effet, les dernières prévisions de croissance de Xerfi parient pour 1,2% cette année et 1,8% en 2016, une vraie amélioration de la conjoncture, même si elle sera faible, illusoire, temporaire, et inégale, comme on pouvait le pressentir il y a deux ans. Tout ceci conforterait les prévisions du gouvernement, qui devrait profiter d’un bon résultat de la croissance au troisième trimestre, qui pourrait expliquer en partie la légère amélioration sur le front du chômage. Il faut dire que les taux d’intérêts sont très bas, ce qui aide l’Etat, les ménages et les entreprises, le prix du pétrole reste bas, et l’euro s’est stabilisé à un niveau acceptable, une première depuis longtemps.
Bref, même si la reprise qui se dessine a toutes les chances d’être limitée, temporaire et très inégale, en revanche, la probabilité qu’elle se réalise semble augmenter avec le temps. Et cela pourrait finir par avoir un effet, même faible sur toutes les courbes du chômage, par-delà les effets du changement de méthodologie annoncé dans la torpeur de l’été. Cela ne signifie pas que la politique menée est la bonne, loin de là. Elle reste tout aussi mauvaise, mais cela fait partie de ses résultats de provoquer des oscillations négatives et positives, Hollande ayant peut-être la chance d’entrer sur un cycle plus positive avant 2017. Sa politique est tout aussi mauvaise, mais la moindre détérioration de la situation, voir les légers progrès dans quelques domaines pourraient apparaître comme une vraie reprise.
On peut donc voir trois choses dans les statistiques annoncées hier : l’effet du tripatouillages de cet été qui fait baisser comme par miracle le chiffre que tout le monde regarde, la persistance, voire l’aggravation du Munich social, mais aussi les prémices d’un léger et superficiel retournement de conjoncture.