Femmes détestables sans circonstances atténuantes

par Georges Yang
jeudi 26 mai 2011

Quelles sont ces femmes que l’on peut détester au premier regard, sans même qu’elles aient dit le moindre mot ?En lisant le titre de cet article, vous pensez probablement aux mères indignes, incapables d’élever correctement leurs enfants, celles qui laissent un gamin en bas âge fermentant dans ses matières fécales seul à la maison, pour aller boire ou danser toute la nuit. Pire, vous envisagez l’infanticide avec effroi, le congélateur ou le sac poubelle, ou bien encore la mère toxicomane qui laisse crever son bébé dans l’indifférence apathique des accros à l’héroïne. Vous en êtes loin, ces femmes pour monstrueuses qu’elles puissent paraitre ont encore une dimension humaine, même s’il faut y regarder de près avant de la trouver.

D’autre part, si vous avez déjà été trompé, bafoué, vous pensez aux femmes adultères ; mais là encore, pour être cocu, il faut être au moins trois dans l’affaire et à moins d’être tombé sur une nymphomane insatiable, demandez-vous quel est votre part de responsabilité dans l’échec de votre couple, avant de conspuer votre épouse ou votre compagne. Alors, que reste t-il de si détestable, haïssable parmi la gens féminine pire que les dépensières invétérées qui courent au surendettement à pas de géantes ou celles qui vous imposent leur mère à table, à domicile, pendant les vacances et mêmes au téléphone. Et bien, cette catégorie de femmes que l’on identifie au premier coup d’œil sans avoir besoin de leur parler ou de les écouter, c’est celle qui se promène sans vergogne avec une bouteille d’eau minérale dans le sac à main.

La France est un pays tempéré et même en été, donc toute personne entre 15 et 65 ans, non atteinte de diabète insipide, peut facilement rester 12 heures sans boire une goutte d’eau. Toutes les femmes qui s’équipent de la petite bouteille salvatrice ne s’entrainent pas pour le Marathon de Paris, loin de là et ce n’est que les nourrissons, les petits enfants et les grands vieillards qu’il faut abreuver régulièrement, on a tous en mémoire la canicule de 2003. Et puis la traversée de Paris, de Toulouse ou de Limoges à pied n’est pas celle du Ténéré ou de la Vallée de la Mort, on n’y risque pas sa peau sous un soleil de plomb. On fait rarement du trekking entre la plaine Monceau et la Butte Montmartre et l’insolation est rare dans la banlieue de Lille. Et puis, en cas de soif intense, on peut toujours trouver un bistro, dorénavant, ils sont devenus non-fumeurs. La mode de l’eau minérale consommée dans la rue est apparue insidieusement vers le milieu des années 80 et touche un public quasi exclusivement féminin et relativement jeune. Remarquez qu’une fois ménopausée, malgré les bouffées de chaleur, la femme ne transporte plus d’eau minérale dans son sac. Comptez les petites vieilles qui se trimballent un litre d’Evian dans leur cabas ou dans la poche de leur imperméable couleur mastic  ! Question d’éducation et de génération, de plus une vieille ne boit pas au goulot.

Donc, même s’il existe, ce fameux réchauffement climatique, la France n’est pourtant pas devenue le Niger entre De Gaulle et Mitterrand. Alors, que c’est-il passé pour en être arrivé là ? D’abord apanage de la Parisienne active des années Mitterrand, la mode s’est désormais étendue à la province et aux banlieues. Dans le monde rural par contre, la bouteille se retrouve plus volontiers sur le siège arrière du véhicule. Tant qu’elle est dans la rue ou dans les transports en commun, une femme ne peut boire autre chose que de l’eau. Le vin rouge c’est pour les clochardes et la bière pour les punks. Au mieux tolère-t-on le Coca light ou zéro.

En ville, elles sont de plus en plus nombreuses dans le métro, dans le bus ou dans la rue à laisser apparaitre de leur sac à main une petite bouteille d’eau d’un demi-litre quand elles ne la tiennent pas carrément à la main. Mais qui leur a fait croire qu’elles iraient mieux, seraient en bonne santé et en meilleure forme si elles buvaient de l’eau minérale ? D’abord la presse féminine avec ses pages de publicité, mais aussi ses publireportages plus ou moins déguisés en rubrique santé et puis bien-sûr, les spots à la télévision. L’eau élimine les toxines, lesquelles, mystère ! En tout cas pas celles du botulisme, car si l’on soignait cette intoxication alimentaire avec uniquement de l’eau, la totalité des patients serait au cimetière. La dimension femme active, bien dans sa peau, à l’aise dans la société est véhiculée en permanence par la publicité. Une femme respectable est svelte, utilise un déodorant, des protège-slips invisibles et… boit de l’eau. Il faut dire que les entreprises s’y sont mises elles aussi au grand bénéfice des sociétés qui commercialisent les fontaines de bureau avec leurs grosses bouteilles distributrices dans les salles d’attente ou près de la machine à café. Et là, même les hommes peuvent s’adonner à ce vice puisque c’est gratis et financé par le patronat.

Et puis, si l’on compare le nombre de femmes circulant avec une bouteille et celles que l’on voit effectivement boire au goulot, on peut se demander si la bouteille n’est pas là pour désaltérer mais pour plutôt rassurer au cas où. Un peu comme les Tampax ou les serviettes hygiéniques qui trainent dans les sacs en cas de nécessité et seront utilisés au moment opportun. La majorité des buveuses d’eau se contentent du demi-litre, facile à enfourner dans un petit sac. Celles qui déambulent avec la maxi Vittel ou Contrex d’un litre et demi sont plus rares. Il faut pour cela un sac-cabas et souvent des allures de femme de gauche en sandales ou d’enseignante syndiquée au cheveu filasse et au mollet non épilé. La jeune en short au fessier rebondi se satisfait par contre bien souvent du petit format. La bourgeoise un peu snob du VIIème arrondissement, elle aussi aura sa petite bouteille, mais elle dépassera d’un sac en cuir de marque, pas de quoi pour autant pour la rendre plus sympathique. Il ne faut pas confondre toutes ces buveuses invétérées et ostentatoires avec les mères de familles avec marmaille et poussettes qui ne se la jouent pas, préoccupées par des bambins braillards et hyperactifs. Pour elles, la bouteille n’est pas un accessoire de mode, mais fait partie d’une panoplie incluant les couches jetables, les goûters et autres jouets et sucreries pour les gosses quand elles vont au square.

Il se dégage une arrogance mesquine de ces femmes qui se déplacent avec de l’eau minérale. Un côté sain et écologique comme si toutes ces bouteilles en plastique non dégradable n’augmentaient pas la pollution, la masse des ordures ménagères et la consommation d’énergie non renouvelable pour les fabriquer. Quel est le coût carbone d’un jogging ? Personne n’a encore osé le calculer. Mais pas question pour ces égéries de la vie saine d’en revenir à la gourde en aluminium des écoliers de jadis, remplie d’eau du robinet teinte de sirop, oh horreur, riche en saccharose et colorants autorisés. Le côté suffisant de la femme avec sa bouteille d’eau la rend encore plus insupportable que celle qui téléphone pour dire des banalités. Il faut dire qu’à ce niveau, beaucoup d’hommes ne valent guère mieux et se comportent aussi comme d’insupportables pies. La seule différence est la manière de toucher, de regarder, de caresser le téléphone, même quand on ne l’utilise pas. Pour la femme jeune, ce petit objet prend souvent l’aspect intermédiaire entre l’ours en peluche et le godemiché.

En dehors de quelques métrosexuels épilés, quasiment aucun homme ne se promène avec une bouteille d’eau. Peut-être du fait de l’absence de sac à main et par désir d’avoir les mains libres, mais aussi parce que l’homme n’a pas les mêmes schémas comportementaux et que la publicité s’adresse à lui sue d’autres créneaux. L’homme qui a soif se réfrène ou va tout simplement au bistro. Paradoxalement, ce ne sont que quelques ados qui osent la bouteille dans la rue, mais il s’agit plus souvent de sodas sucrés que d’eau minérale.

Une bonne éducation nous interdit de battre une femme. Cependant, il faut énormément de maitrise de soi pour ne pas en gifler une ou lui enfoncer le flacon dans la glotte ou même et surtout ailleurs quand elle s’exhibe avec arrogance arrimée à sa bouteille dans les rues de la ville. L’homme est lâche hélas. Au premier rendez-vous avec une femme qui arrive avec sa bouteille d’eau, il devrait tourner les talons et s’en aller sans un mot. Mais comme il est souvent naïf et optimiste, il peut aussi laisser sa chance à sa future compagne en lui faisant remarquer que la prochaine fois, il vaudrait mieux qu’elle vienne sans bouteille d’eau. Illusion, car elle ne va pas s’amender, le plus souvent elle n’en fera rien, au contraire elle insistera pour avancer ses pièces dans le jeu de la séduction et de la domination. Un dernier conseil, pour éviter bien des déboires, Messieurs, fuyez les buveuses d’eau pendant qu’il en est encore temps ! Vous n’imaginez pas encore le coût d’un divorce !


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