Il faut arrêter la marche du « suicide égoïste »

par ddacoudre
mardi 24 février 2009

Aujourd’hui, insidieusement, l’organisation libérale mondiale du commerce, comme de la finance, qui pourrait être un fabuleux moteur du développement des populations, sert une mécanique hégémonique à laquelle nous participons activement, au travers d’une forme de pensée unique, pseudo libérale.

Je dis pseudo, car dans son application elle constitue un leurre intellectuel, en ce sens que chacun s’imagine être la pièce centrale du puzzle, et nie que les structures induisant sa puissance concurrentielle (le libre marché) impose ses lois à l’accession d’un marché, et transforme en idéal, ce qui n’est qu’un combat de pouvoir entre, l’individuel qui ne veut suivre que ses règles (l’inné), et celui de « l’individuel sociabilisé et collectivisé » en schéma communautaire (ETAT) qui ordonne la société par le fait social (l’inné aussi).

Cela, au travers d’un capitalisme qui se veut libéral, comme si le capitalisme hiérarchiquement despotique pouvait être libéral sans se réformer. (Capitalisme compris au sens commun, pas à celui que souvent je lui donne souvent le passage vers l’industrialisation)

Bien que né d’une volonté de Liberté[1], il a fini par remplacer le despotisme monarchique pour devenir lui-même un capitalisme despote, lequel a certes eu un avantage, celui de nous faire passer de sujets pauvres, à citoyens possédants.

Pourtant, les deux à y réfléchir se référent à des valeurs supérieures à l’homme, pour que celui-ci puisse se justifier de sa condition et de ses actes, et s’y résigner.

Ainsi la monarchie était de « droit Divin », d’en Haut, le capitalisme est des « droits naturels, des lois naturelles », d’en Bas. De manière que celui ou ceux qui se réfèrent de cette origine s’érige en Roi de droit divin ou de droit naturel (la sélection naturelle).

Dans les deux cas nous avons droit au même despotisme.

Cela, alors que ce ne sont que des droits, d’un être ignorant de lui-même qui ne sait pas ou ne peut pas se gouverner sans imiter ce qu’il comprend ou a compris de son monde (la nature), et se réfère à des concepts de lois naturelles, développés par des hommes certes instruits et intelligents, mais qui à leur époque, ne connaissaient de leur monde que l’antiquité et le moyen âge très chrétien.

Ils ne pouvaient donc pas tenir compte de notre préhistoire et protohistoire dont nous avons commencé la conquête de sa connaissance qu’à partir de 1860, et encore moins de celles apportées par la science contemporaine.

Ce raccourcie caricatural ne remet pas en cause l’efficacité attestée du capitalisme, mais se veut souligner que pour être despote, il ne suffit pas d’en avoir le titre, mais les moyens de l’être. C’est ce que fait « Le système capitaliste » dans ses excès d’efficacité, par les moyens dont il s’est doté, la loi du marché financier.

Pourtant nous savons que toute société dominatrice produisant son antidote, y succombe un jour.

J’irais peut-être jusqu’à dire que le capitalisme ou post capitalisme pourrait être le fossoyeur du libéralisme qui s’est identifié au symbole de l’individualisme absolu pour justifier l’accumulation de richesse pour sa seule satisfaction à faire des hommes plus riche que des états sans que cela nous choque et nous émeuvent car par l’information ils nous en font rêver, et le langage courant tend à rendre, à tort, synonyme Capitalisme et Libéralisme.

Choqué que cela explose, moi non. Trouvez-moi donc une société dominatrice qui a perduré. Je ne prends aucun risque, c’est la simple application du principe de la thermodynamique, et de l’évolution biologique d’une cellule, naturellement ceci dépasse un peu la seule durée d’une existence humaine, mais il est inéluctable.

 

Ce phénomène fait partie des régularités observables, mais que nous rejetons quand elles concernent la société dans laquelle nous vivons, sauf peut-être, pour ceux qui ont l’esprit réformiste. Réformisme qui n’est pas celui qu’ont soutenu les faux libéraux qui en son nom font entrer comme réforme la paupérisation que n’a pas su réaliser le communisme quand il l’avait comme moyen d’action.



Le mot liberté est l’arbre qui dans la perspective de notre regard cache la forêt…

 

En cela, le mot liberté sous-entendu dans libéralisme, sert les puissants qui se sont construits et cache à ceux qui ne sont pas clairvoyants, que les richesses produites ne sont destinées qu’à ceux qui sont solvables, et s’organisent entre eux, et que la liberté n’est autre qu’être esclave volontaire de ses propres désirs, limités par les autres ou « l’Holisme ».

Si au mot liberté de nombreuses dictatures s’y soient référées, dans nos démocraties nous nous y référons le plus souvent sous une forme insidieuse, pour dire qu’au nom de la liberté nous avons celle de dominer les autres, pourvu que cela se fasse par un moyen communément admis, la « compétition ».


Par libéralisme, certains entendent le droit qu’ont quelques groupes d’amasser des richesses (capitaliser) s’en rétrocéder sous quelques formes que se soit le coût collectif de l’existence humaine qui a était nécessaire, c’est les discours sur les charges qui en sont l’élixir, quitte à s’y auto régénérer par des circuits financiers spéculatifs (analogie au dopage sportif), et structurer le marché mondial dans un féodalisme[2] au sein duquel les pouvoirs politiques (celui des citoyens) n’ont qu’à se soumettre ou se démettre.

 

D’autres y voient le développement individuel comme une extorsion sans limite de la société. Une société à laquelle il faut tout prendre, de laquelle il faut tout attendre sans rien rétrocéder. Durkheim a appelé cette forme d’égoïsme le « suicide égoïste » « La société ne peut se désintégrer sans que, dans la même mesure, l’individu ne soit dégagé de la vie sociale, sans que ses fins propres ne deviennent prépondérantes sur les fins communes, sans que sa personnalité en un mot ne tende à se mettre au-dessus de la personnalité collective. Plus les groupes auxquels il appartient sont affaiblis, moins il en dépend, plus par la suite, il ne relève de lui-même pour reconnaître d’autres règles de conduite que celles qui sont fondées dans ses intérêts privés. Si donc on convient d’appeler égoïsme cet état où le moi individuel s’affirme avec excès en face du moi social et au dépens de ce dernier, nous pourrons donner le nom d’égoïsme au type particulier de suicide qui résulte d’une individuation démesurée »[3].

En ce sens sont suicidaires les discours qui prônent le désengagement de l’État en tant que garant et représentant de cette fonction « Holistique » au sein du groupe, de la société, de l’espèce, et de l’existence, suivant la manière dont nous nous structurons, car un État peut être despotique nous le savons.

Ce qui donne également la possibilité à l’État citoyen d’être propriétaire, dans le secteur industriel ou non, pour sauvegarder ses intérêts de la communauté.

Je vais prendre un exemple par l’absurde. Quelle différence il y a entre 60 millions de français qui détiennent les actions d’une société, et 60 millions de français propriétaires de la même société par l’État du fait de leur statut de citoyens. Je n’en vois aucune. Dans le premier cas les actionnaires éliront un PDG, dans l’autre un Président de la république. Ainsi la différence ne se fait pas dans le titre de propriété, mais dans la gestion, l’usage et l’image que nous nous en faisons, cela au travers des relations socio-économiques historiques que nous avons développées, et de leurs lisibilités au travers des circuits économiques. A l’inverse, par les phénomènes de concentration (capitalisme), des groupes financiers peuvent devenir propriétaires de secteurs complets ou « pluri-sectoriels ».

A quand ? Une société multinationale qui devient propriétaire d’un État ?

Cette remarque n’est pas anodine, par les groupes de pression financiers ou de grands groupes, nous pourrons bientôt affirmer que ce sont eux qui choisissent les chefs d’États, que béatement les citoyens élisent. De sorte qu’au nom de la liberté nous nous construisons également les moyens de nous en priver.

Nous construisons nos dominants, et eux aussi s’insurgent au nom de la liberté contre toutes les réglementations qui limitent leur pouvoir de dominer. Ainsi, cet arbre qu’est la Liberté, cache une forêt de relations complexes dans lequel il suffit aujourd’hui de prononcer le mot Liberté, comme la clé d’ouverture de la caverne d’Ali Baba, pour que sans discernement tous les hommes s’y précipitent.


Sauf, que seulement un certain nombre s’y servent, et expliquent aux autres qu’ils sont libres parce qu’ils ont la liberté, l’illusion d’y rêver. Cette voie est devenue suicidaire.



[1] Au XII ième siècle son sens usuel signifié « généreux » emprunté au latin Libéralis, au XIII ième siècle son sens est « digne d’un homme libre. Le XVIII ième siècle ne connaît pas l’adjectif libéral, considéré employé pour la première fois le 19 brumaire par Bonaparte dans sa proclamation : Français vous reconnaîtrez sans doute à cette conduite, le zèle d’un soldat de la liberté, d’un citoyen dévoué à la république. Amusant de la part d’ quelqu’un qui allait s’assoir dessus

[2] Aujourd’hui il nous serait possible de dresser une carte géographie avec des frontières de marchés commerciaux dépendant de divers groupes financiers. Il nous apparaîtrait alors une stratification d’espace qui se recouvre au-delà des limites des États qui exige que les États abandonnent leurs prérogatives spécifiques (qui apparaît alors comme de l’auto résistance) pour satisfaire aux règles des groupes financiers. Avec un peu d’imagination nous pouvons spéculer que s’opéreraient des échanges territoriaux d’influence mercantile, comme le faisaient avant les seigneurs et les rois par alliances ou mariages, qui dessineraient les frontières d’États financiers sous l’autorité d’un conseil d’administration ou autres, dont le président serait celui qui détient la majorité. Est-ce illusoire ?

[3] Philippe Steiner. La sociologie de Durkheim. Éditeur La découverte. 1998. P. 51.

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