L’affaire Volkswagen, concentré de notre époque

par Laurent Herblay
vendredi 25 septembre 2015

L’immense scandale généré par la révélation du trucage des tests anti-pollution par le constructeur allemand n’est pas seulement un fait divers exceptionnel. On peut également y voir une forme de synthèse de bien des dysfonctionnements de nos sociétés actuelles.

 
La triche, taille XXL
 
L’affaire est incroyable. Aujourd’hui, le groupe allemand, propriétaire d’une pléiade de marques (Audi, Seat, Skoda, Porsche, Bentley, Lamborghini ou Bugatti), a admis avoir mis en place un logiciel sur les moteurs diesel équipant environ 11 millions de ses voitures dans le monde pour contourner les tests antipollution. Il est fort possible que cette tricherie aille bien au-delà des Etats-Unis, même si c’est là que le pot aux roses a été découvert puisque ces moteurs sont d’abord vendus en Europe. D’ailleurs, le ministre des transports d’outre-Rhin a admis avoir été « informé qu’en Europe également des véhicules équipés de moteurs diesel de 1,6 et 2,0 litres sont touchés par les manipulations dont on parle  ». Plusieurs enquêtes ont rapidement été lancées, en Allemagne, en France et au Mexique. 
 
 
Les conséquences pour le constructeur sont désastreuses. Le groupe risque une amende de plus de 10 milliards de dollars aux Etats-Unis. En outre, cela ne prend pas en compte tous les risques légaux dans un pays qui a la poursuite facile et où les clients pourraient bien porter plainte contre le constructeur afin de monnayer ces fausses promesses. Encore pire, ce scandale pourrait teinter l’excellente image du groupe et de ses marques, facteur clé de leurs succès. Ici, les dégâts sont incalculables. La bourse a réagi vivement, avec un recul du titre de 35% en 2 jours. Son patron a été contraint de démissionner, même s’il faut noter qu’il touchera une retraite de 28,5 millions d’euros et qu’il pourrait doubler ce montant dans le cadre d’un départ négocié, le double de sa rémunération de 2014.
 
Le voyou qui en vaut 1000 ?
 
La seule rémunération du patron du groupe est déjà la parfaite illustration de l’explosion des inégalités, étant donné qu’il a gagné, sur la seule année 2014, près de 1000 fois le salaire minimum de son pays  ! En soit, une telle proportion est déjà sans doute totalement indécente. Elle le devient plus encore quand, contraint au départ du fait d’une faute grave de l’entreprise qu’il dirige, son départ s’accompagne de l’équivalent d’un gain à une super-cagnotte de loterie, entre 28 et 60 millions d’euros  ! Ce n’est pas comme s’il n’avait pas eu les moyens de mettre un peu d’argent de côté à son poste, où il gagnait autour de 15 millions d’euros tous les ans ! Cette affaire semble indiquer que pour les grands patrons aujourd’hui, qu’ils réussissent ou pas, de toutes les façons, ils gagnent, et pas des queues de cerise.
 
On peut également voir dans cette affaire le comportement révoltant d’une multinationale qui triche avec des règles pourtant importantes, puisqu’elles touchent à la santé des hommes. Un rappel utile pour tous ceux qui ne veulent pas appliquer un minimum de principes de précaution, notamment avec les OGMs vendues par Monsanto. Même si on pense que Volkswagen n’a que faire de la santé de ses consommateurs, on aurait pu croire que le souci de sa réputation aurait pu le pousser à ne pas faire cela. Alors, pour un groupe qui a déjà une image épouvantable, comme Monsanto… Enfin, cela pose également la question des normes, de leur application, de leur complexité, et des moyens que l’Etat se donne pour s’assurer qu’elles sont suivies. Ici, il semble que protocoles et contrôles n’étaient pas les bons.
 
L’affaire Volkswagen en dit long sur les excès de notre époque, les comportements effarants qu’elle peut parfois susciter, que ce soit la rémunération pharaonique des dirigeants ou les pratiques malhonnêtes que suscite la quête déraisonnée du profit. En somme, l’oubli du collectif.
 

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