L’Iran disqualifie toute défense du port du voile chez nous
par Laurent Herblay
mercredi 19 octobre 2022
La révolte des Iraniennes contre l’oppression religieuse pourrait-elle enfin mettre fin à la lente et insidieuse progression du port du voile dans notre pays ? Il faut l’espérer tant sa défense devient injustifiable, alors que sa dimension oppressive et misogyne est dénoncée au risque de leur vie par les Iraniennes et une grande partie partie de la jeunesse. Merci à eux et tout mon soutien à ses femmes si courageuses, pour reprendre la très belle tribune de Jeannette Bougrab dans le FigaroVox.
Le sens du voilement dévoilé
Dans la bouche de ses défenseurs, le voilement serait un simple choix individuel, lié à une pratique religieuse, qui devrait être respecté par tous les autres. Une partie des médias diffusent cette propagande sans le moindre recul, comme lors de l’interview de Diam’s à Cannes par Augustin Trapenard, remarquablement décryptée par Fatiha Agag-Boudjahlat qui pointe ses innombrables contradictions et angles morts. Le pire est sans doute que les intentions premières ne sont pas mauvaises : on peut déceler une véritable volonté de tolérance et d’ouverture derrière ce refus d’y voir autre chose. Un célèbre rugbyman a même pris publiquement la défense du port du voile de sa sœur. Mais les évènements en Iran viennent rappeler à tous les défenseurs du port du voile que ce bout de tissus est profondément politique, pour le pire, et qu’il est l’instrument de certains des pires régimes totalitaires qui existent sur la planète.
Bien sûr, il sera toujours possible de trouver le cas d’une femme qui dit porter totalement librement son voile, sans la moindre contrainte, et qui affirmera qu’elle n’a aucune volonté prosélyte, que ce morceau de tissus serait pour elle un moyen de vivre sa religion. Mais ce discours a de multiples failles. D’abord, la liberté du port du voile est toute relative : entre celles qui le portent parce que leurs parents ou leur mari qui le souhaitent en réalité, et celles qui le portent pour ne pas être dérangées, quelle est la véritable part de celles qui le portent vraiment sans la moindre contrainte ? Ensuite, dans le pays de la loi de 1905, le port du voile est un acte très militant qui est le moyen d’afficher haut et fort sa religion, d’une manière si militante qu’elle est autant une forme de provocation qu’une remise en cause de nos valeurs.
Le voile n’est pas un accoutrement acceptable dans notre pays. Outre un port qui peut être contraint, directement, ou indirectement, il représente aussi, comme l’Iran le montre, un instrument de ségrégation des femmes, un marqueur d’inégalité entre les sexes, une forme de « féminicide » pour reprendre le mot fort, mais malheureusement illustré, de Kamel Daoud. Et parce qu’il coupe celles qui le portent du reste de la communauté nationale, il nie également la fraternité qui doit lier tous les Français. Bref, le voile, ce n’est ni la liberté, ni l’égalité, ni la fraternité. Ce n’est pas la France, et cela ne devrait pas être un accoutrement acceptable dans des démocraties solides, si ce n’est celles pour lesquelles les 3 mots qui ornent nos bâtiments publics n’ont guère d’importance, et pour qui la société n’existerait pas. Le voile, c’est l’Iran et l’Arabie Saoudite, et celles qui veulent le porter peuvent toujours y vivre.
En outre, le port du voile, par son caractère extrêmement visible, n’est pas seulement une question individuelle, neutre pour le reste de la population, comme le pointait bien un article de Libération de 2003, qui pointait la pression des voilées sur les non voilées. Toute personne qui le porte contribue à sa lente progression dans notre société. Bien sûr, la France résiste, contrairement aux pays anglo-saxons, dont la quasi-totalité des élites ne voient pas le problème, mais l’évolution reste très inquiétante. Jusqu’où cette progression pourrait aller si nous laissions faire ? N’est-il pas temps de faire enfin reculer cette pratique, marqueur d’une ségrégation des femmes, renvoyées à un statut archaïque et inférieur à celui des hommes, et outil de trop nombreux régimes totalitaires, qui ont démontré que le voile est un instrument politique de contrôle de la société pour la laisser aux mains d’hommes rétrogrades et trop souvent criminels.
Un grand merci et tout mon soutien aux Iraniennes et Iraniens qui se révoltent, ainsi qu’aux femmes qui se lèvent en France pour démonter la propagande islamiste, Malika Sorel, Jeannette Bougrab ou Fatiha Agag-Boudjahlat. Espérons que de l’horreur de la répression actuelle surgisse une libération de la société iranienne, et une prise de consciene plus vaste de notre pays.