La crise, le benchmarking et le déficit ontologique
par Eric de Trévarez
lundi 27 mai 2013
Nous évoluons, dans le monde fictif des modèles économiques les plus cartésiens, et le nouveau paradis du benchmarquer, qui est le règne arrivé, de notre mère la statistique et de sa sœur, l'évaluation normative. Le fil conducteur de ce nouveau paradigme, est la logique marchande, l'allocation des ressources, l'optimisation rationnelle, la sophistication, l'écran de fumée qui dissimule les paramètres, le tout, dans un audit de la qualité qui se veut généralisé et interconnecté. Débarrassée de la psychanalyse, la raison pure le serait aussi de ses impuretés. L’ego, l'homme au centre de la société et la fameuse satisfaction optimale, pourraient ainsi régner sans la moindre contestation, et sans fauteur de trouble, dans un hédonisme absolu, pour le plus grand profit du marché. Ce marché, qui lui aussi privilégie la forme sur le fond, pour des raisons commerciales évidentes, et qui s'est auto proclamé, moteur unique de notre civilisation.
Le déficit ontologique de l’Être est au centre de la problématique de l’Homme moderne, qui vit mal la crise. Le marché avait su exploiter ce déficit, en proposant de le combler par l'univers de tous les avoirs possibles, celui d'un consumérisme effréné. Ce marché, lieu de rencontre de toutes les marchandises, était lui aussi, supposé sans limite, et se perpétuer éternellement dans l'innovation, moteur divin d'une illusion perpétuellement renouvelée. C’est ce qui a fait la force du matérialisme et du consumérisme, mais c'est aussi le talon d'Achille de l'homme. Et si le matérialisme et le consumérisme étaient une régression mentale, dans le monde des objets et des choses. Et ne pourrait-il pas s'agir d'une régression de type infantile dans le palpable, quelque retour dans le monde du pipi caca, celui des immondices et des ordures, comme la pollution semble nous l'indiquer. L’abandon de l’Être, alors, rabaisse effectivement l'homme à la choses et au neutre qui caractérise la chose. Le genre est inexistant et sans importance dans l’objet. Vous avez compris la chose pour tous, destination finale de l'égalitarisme. La psychanalyse était la seule discipline à analyser nos comportements, contre une prétendue raison, si chère aux rationalistes. Voilà pourquoi la psychanalyse semble maintenant gêner. En effet, elle introduit une suspicion, dans le paradigme scientiste moderne, par le biais de nos motivations profondes, qui elles n’ont rien de rationnelles. La conséquence serait maintenant un vide que la baisse du pouvoir d'achat contribue à creuser et un mal être général, dont la frustration nous fait mesurer la profondeur.
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Concernant Freud, il est le seul à avoir sondé les abîmes de la psyché humaine, où rien n’est à l’aplomb, la perpendiculaire inconnue, la ligne droite impossible et j’en passe. Voila pourquoi, il gène les cartésiens et les rationalistes, qui ne parient que sur les lignes droites et les angles droits, sur le scientisme et la liberté, et qui nous auront conduits, en fin de compte, à l’économie libérale et à la suprématie des marchés, dans une imposture maintenant générale. Tout cela évolue, dans le monde fictif des modèles économiques les plus cartésiens, et le nouveau paradis du benchmarquer, qui est le règne arrivé, de notre mère la statistique et de sa sœur, l'évaluation normative. Le fil conducteur de ce nouveau paradigme, est la logique marchande, l'allocation des ressources, l'optimisation rationnelle, la sophistication, l'écran de fumée où baignent les paramètres, le tout, dans un audit qui se veut généralisé et interconnecté. Débarrassée de la psychanalyse, la pure raison le serait aussi de ses impuretés. L’ego, l'homme au centre de la société et la fameuse satisfaction optimale, pourraient ainsi régner sans la moindre contestation, et sans fauteur de trouble, dans un hédonisme absolu, pour le plus grand profit du marché. Ce marché, qui lui aussi privilégie la forme sur le fond, pour des raisons commerciales évidentes, et qui s'est auto proclamé, moteur unique de notre civilisation. Le marché serait ainsi le pourvoyeur du sens. Le symbole ne serait plus qu'une valeur résiduelle mercantile, une polysémie marchande qui ne relèverait plus que du marketing. Le signifiant et le signifié seraient une question d’offre et de demande. Les modèles économétriques tourneraient comme des galaxies autour d’un axe central nommé, benchmarquer, à la façon des cornes d’abondance, dans un monde entièrement connecté et conrôlé !
Débarrassé de tous les esclavages et de tous les obscurantismes, la grande peur irraisonnée des rationalistes, l’Homme idéal du siècle des Lumières, parfaitement toisé, évalué et normé, serait-il en passe d'être réalisé, guidé par la raison pure, le marché, les modèles économétriques et maintenant les statistiques normatives ! Voila où nous aura mené, non sans ironie mais avec enthousiasme, le paradigme rationaliste. Cependant la méthode constante pour nous conduire vers cette destination très rationnelle, a été, effectivement, de tout jeter de notre héritage et de faire table rase : bébé, eau du bain et bassine. Destination inconnue basée sur la foi rationaliste, dont le credo s’inscrit dans un politiquement des plus corrects.
Le seul problème, c'est que cela ne marche pas. Le nouveau pauvre, le laisser pour compte, sans Être et sans avoir, se trouve complètement prolétarisé, sans culture et sans racine. Il est vrai qu'il est, Fils des Lumières, mais se sera désormais basse consommation ! On peut se demander avec inquiétude, quel sera le dernier endroit où on pourra le connecter. Vous avez dit régression annale ?
Eric de Trévarez