La grande frayeur de Carlos Ghosn

par Pale Rider
lundi 9 mai 2016

Il ne se passe pas un mois sans qu’on apprenne que les PDG de grandes sociétés se font octroyer par leur Conseil d’Administration des émoluments qui sont à vomir. Trois exemples récents suffiront à alimenter notre nausée.

 * Le PDG de Sanofi, Olivier Brandicourt : plus de 16 millions d’euros pour 2015.

* L’ex-PDG d’Air-France, Alexandre de Juniac : + 65% en 2015, à 1,065 millions d’euros. Rien ne dit que son successeur, Jean-Marc Janaillac, soit revenu au montant antérieur).

* Le PDG de Renault, l’indétrônable Carlos Ghosn : 7,2 millions par an côté Renault, + 8 millions côté Nissan.

Ces chiffres, même le plus petit des trois, ne disent rien aux gens normaux comme vous et moi, sauf quand on fait des comparaisons avec nos revenus. Ainsi, sachez que M. Ghosn s’estime digne de gagner 41 000 euros par jour, soit l’équivalent de 34 Smic par jour. D’après Marianne, les dirigeants du CAC40 gagnent 200 fois le salaire moyen. Dans les années 70, c’était 20 fois. Sait-on qu’Henry Ford, patron pourtant peu sentimental (et sympathisant du IIIe Reich), estimait que son salaire ne devait pas excéder 40 fois celui du dernier de ses ouvriers ? Aujourd’hui, on a dépassé la proportion de 1 à 400.

À force d’entendre valser ces chiffres, on en devient anesthésié. Car c’est irréel, vertigineux, fou - et irrépressible. Mais tous ces patrons ont des arguments en béton pour justifier leur orgie financière : ils font valoir qu’ils méritent ces ponts d’or dont ils ne savent pas quoi faire sous prétexte qu’ils ont redressé la société (ce qui n’est même pas toujours le cas). Les 7 500 salariés de Renault mis au chômage pour prix de ce redressement, les 5 500 personnels virés d’Air France et les pilotes à qui on demande de baisser leur salaire apprécieront. Mais attention : si jamais vous n’êtes pas assez généreux, menacent les super-PDG, on ira se faire payer plus grassement ailleurs. Sans nous, que deviendriez-vous ?

Là-dessus, j’ai un avis très simple : chiche ! Puisque vous pillez à ce point les revenus des entreprises que vous dirigez, allez vous faire engraisser ailleurs. Nous ne perdrons pas au change. Nous avons davantage besoin de PDG talentueux que de PDG cupides. Il y en a plein qui attendent de prendre votre place. Vos revenus sont sans commune mesure avec vos prétendus talents.

Macron très fâché…

Mais le salut pointe à l’horizon. Le Conseil d’Administration de Renault étant passé par-dessus les réticences des actionnaires dont l’État fait partie, Emmanuel Macron, Ministre de l’Économie, a menacé Carlos Ghosn. On aura remarqué à quel point Carlos Ghosn redoute ce jeune ministre à la fibre sociale volant au secours des masses populaires qui commencent à gronder dans les rues et sur les places ; ce jeune ministre qui, il y a quelques mois, fixait comme idéal à la jeunesse de notre pays (je cite) : « Ayez envie d’être milliardaires ! » Trêve de plaisanterie. Ni le Président de la République, ni son gouvernement ne feront rien contre « leur ennemi la finance », pas plus qu’ils n’iront protéger les lanceurs d’alertes dont ils ont pourtant reconnu l’utilité.

…et Dieu encore plus fâché

Il existe un texte de la Bible (pas isolé ; les prophètes en regorgent) qui est une menace très violente adressée aux riches. Ils en feront ce qu’ils voudront, mais l’avertissement est là. Il concerne leur avenir éternel (sujet dont on se soucie peu sous nos latitudes ; mais il n’est pas anodin) et, peut-être, leur avenir immédiat :

 

« Maintenant, faites attention, vous, les riches ! Pleurez ! Criez à cause des malheurs qui vont venir sur vous ! Votre richesse est pourrie, les vers mangent vos vêtements ! Votre or et votre argent rouillent, et leur rouille va vous accuser, elle va dévorer votre corps comme un feu. Le monde va bientôt finir, pourtant vous conservez des richesses en réserve ! Et même, vous gardez pour vous le salaire des ouvriers qui font la récolte dans vos champs ! Alors ils se plaignent, et les cris de ces ouvriers arrivent aux oreilles de Dieu, le Seigneur tout-puissant ! Sur la terre, vous avez vécu au milieu des richesses, vous avez fait ce qui vous plaisait. Vous avez bien mangé pendant que des gens mouraient. Vous avez condamné des innocents et vous les avez tués. Ils ne vous ont pas résisté. »

 

Hélas, la concentration accrue des richesses entre quelques mains rapaces n’est évidemment pas un phénomène français mais un phénomène mondial. Et ce ne sont pas des comités d’éthique ou des instances de régulation fantoches qui y changeront quelque chose. Malheureusement, le changement risque de survenir de manière beaucoup plus brutale…

N° du 6 mai 2016, p. 27.

La Bible, lettre de Jacques 5.1-6 (traduction Parole de Vie).


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