La mobilisation contre Uber se poursuit

par Laurent Herblay
mercredi 24 août 2016

Le jour où je revenais sur les dernières nouvelles des abus de la nouvelle économie, deux infos montraient que les autorités peuvent les contester : aux Etats-Unis, un juge a refusé l’accord à l’amiable passé entre Uber et ses chauffeurs sur la contestation de leur statut de travailleur indépendant, et à Londres, l’entreprise cherche à remettre en cause les nouvelles règles qui la concernent.

Refus de la concurrence déloyale et du moins-disant social

A défaut de posséder des véhicules ou d’employer des chauffeurs, Uber fait d’importants investissements judiciaires, tant l’entreprise sait jouer des failles de nos législations et affronte des initiatives réglementaires locales. En France, après la dérisoire interdiction du service Pop, c’est l’URSAAF, qui l’attaque pour travail dissimulé. Etonnament pour certains, cela est venu un an après une initiative similaire en Californie où des collectifs de chauffeurs demandaient à être requalifiés comme salariés de l’entreprise. A défaut d’être riche de l’argent qu’elle génère, Uber est immensément riche du soutien des marchés, ce qui lui avait alors permis de leur offrir la bagatelle de 100 millions de dollars pour acheter les contestataires et ainsi éviter toute remise en cause de son modèle d’affaire aux actifs si légers.

Mais un juge a refusé l’accord à l’amiable, arguant que « l’accord dans l’ensemble n’est pas juste, adéquat et raisonnable  », Uber ayant « un contrôle important sur la capacité d’un conducteur à accepter ou rejeter une demande de course  ». Outre-Manche, c’est l’organisme de régulation des compagnies de transport à Londres qui perturbe les plans d’Uber. Il faut dire que les VTC y sont bien plus nombreux que les taxis. De nouvelles règles ont été imposées aux VTC : un test d’anglais, un contrôle des modifications de l’application et l’ouverture d’un centre d’appel, et d’autres sont encore au stade de propositions, qui réduiraient certains des atouts de l’entreprise. La licorne a riposté sur deux fronts, en dépêchant sa flotte d’avocats à Londres, mais en agissant également auprès de ses clients, par une pétition.

Ce qui est intéressant, c’est de constater que la contestation des modes de fonctionnement d’Uber & co n’est pas isolée à la Hongrie, qui a bouté l’entreprise hors du pays, mais a également lieu dans les temples de l’ultralibéralisme et du laisser-faire, outre-Manche comme outre-Atlantique. Ceci montre que le modèle d’affaires de ces entreprises est loin d’être anodin et pose des questions cruciales sur l’organisation de nos sociétés. En revanche, il est malheureux de constater que cette contestation vient plutôt de l’administration, chez nous comme ailleurs, alors que leur importance justifierait sans aucun doute une prise de parole plus politique, ce qui explique mes nombreux papiers consacrés au sujet. Même l’Asie est assez timide, Uber ayant quitté la Chine contre la prise de 20% dans le leader local.

Ce qui est frappant aussi, c’est de constater le relatif laisser-faire de notre pays, pourtant toujours présenté comme si résistant au changement, par rapport aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, face à des entreprises qui bouleversent l’organisation de nos sociétés. Et si, contrairement aux fables ultralibérales, la France manquait au contraire de résistance face à tous ces changements ?


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