La PMA autorisée, et un pas vers la GPA…

par Taverne
mardi 23 septembre 2014

La PMA est la procréation médicalement assistée. Elle est légale en France en tant que traitement contre la stérilité du couple (donc circonscrite aux couples hétérosexuels). La GPA (gestation pour autrui) renvoie au phénomène des « mères porteuses. Cette pratique désavouée par l’appellation de « location des ventres » est interdite en France pour tous les couples. La Cour de cassation vient de rendre un avis qui permet la PMA pour tous. Ce n’est que l’effet d’une loi qui laissait la porte grande ouverte. Applaudie par les uns, décriée par les autres, cette décision n’est que le prolongement de la loi Taubira de 2013.

Plus inquiétante est l’avancée progressive vers l’autorisation de la GPA, l’achat d’enfants…

La PMA « pour tous »

La PMA (procréation médicalement assistée) est un traitement contre la stérilité pour les couples hétérosexuels. Cela est autorisé depuis 1994. La question s'est posée de la pertinence de l'étendre aux couples homosexuels mariés, lors du vote de la loi Taubira du 17 mai 2013 (dite aussi improprement « loi mariage pour tous »).

Mais le législateur, en limitant ce recours aux cas médicaux (cas de stérilité) n'a pas prévu cette ouverture.

Pas prévu ? Ce n'est pas si clair. En effet, la loi de mai 2013 autorise l’adoption par un couple homosexuel dès lors qu’il est marié. Mais le texte, qui n’a ni autorisé ni interdit la PMA, laisse le juge trancher seul…

François Hollande n’avait pas contribué à la clarté des débats en se prononçant, au préalable, d’abord pour la PMA (interview pour le magazine Têtu en avril 2012) puis contre (« Si j'y avais été favorable, je l'aurais intégrée dans le projet de loi », déclare-t-il le 12 décembre 2012).

Face à l’incertitude juridique, que doit faire le juge ?

- Doit-il alors accorder l’adoption par un couple homosexuel d’un enfant né à l’étranger par PMA, puisque la loi de 2013 ouvre le mariage et l’adoption aux couples de même sexe dans les mêmes conditions que pour un couple hétérosexuel  ?

- Doit-il, au contraire, s’en tenir strictement à la loi française qui ne permet pas le recours à la PMA aux couples de femmes en France et, par conséquent, trancher dans le sens d’une répression au motif qu’il y fraude à la loi et que la justice ne peut donc pas valider les conséquences de cette fraude  ?

Dans la pratique, 295 jugements ont déjà été rendus par les tribunaux français, dont seulement neuf ont rejeté l’adoption d’enfants nés par PMA. Les juges se fondent sur l’esprit de la loi Taubira et sur la notion d’intérêt supérieure de l’enfant (« la possibilité d’une sécurisation juridique du lien avec les deux adultes de même sexe participant à son éducation »).

Le tribunal de Versailles a récemment tranché en sens inverse sur le fondement de la fraude à la loi : « le procédé qui consiste à bénéficier d'une assistance médicale à la procréation interdite en France, puis à demander l'adoption de l'enfant, conçu conformément à la loi étrangère mais en violation de la loi française, constitue une fraude (…) et interdit donc l'adoption de l'enfant illégalement conçu ». Il se réfère à la décision du Conseil constitutionnel du 17 mai 2013 qui rappelle que la PMA n'est pas ouverte aux couples de femmes en France. Les juges sont tenus de vérifier « que la situation juridique qui leur est soumise ne consacre pas une fraude à la loi ».

La question est désormais tranchée

Les sages de la Cour de cassation s’étaient réunis lundi à huis clos, saisis par deux tribunaux de grande instance (TGI), l’un à Poitiers, l’autre à Avignon.

Le recours à la procréation médicalement assistée (PMA) « ne fait pas obstacle » à ce que l'épouse d'une mère puisse adopter son enfant, a estimé la Cour de cassation dans un avis rendu public mardi 23 septembre. La haute juridiction écarte ainsi la notion de "fraude à la loi".

La décision de la Cour de cassation est un avis consultatif, non contraignant, même s’il devrait influencer très fortement les décisions à venir.

Lien vers l'avis (Avis n° 15010 du 22 septembre 2014 (Demande n° 1470007) - ECLI:FR:CCASS:2014:AV015010)

La GPA (gestation pour autrui)

La circulaire du Ministère de la Justice, datée du 25 janvier 2013, constituait déjà un précédent. Elle demandait aux greffiers des tribunaux d'instance de « ne plus refuser la délivrance de certificats de nationalité française au seul motif qu'ils concernent des enfants nés de mère porteuse à l'étranger ».

Mais voilà qu’un juge pour enfant vient entériner un achat d’enfant ! (lien)

Dans cette affaire, une mère d’origine roumaine vend son 6ème enfant dès sa naissance à un couple de jeunes Lorrains. Mais l'enfant de quelques mois - privé de ses "parents", dont les capacités éducatives ne sont pas en cause dans cette affaire - dépérit et se renferme, au point d'inquiéter les professionnels de la protection de l'enfance. Le juge des enfants finit par confier l'enfant à plein temps, dans le cadre d'un "hébergement long" à ses "acheteurs". La décision n'est pas illégale au regard des dispositions du Code civil sur l'assistance éducative. Même si à peu près tout le contexte de cette affaire est illégal : la plupart des protagonistes sont mis en examen et certains incarcérés.

L'affaire fait grand bruit et pourrait poser problème à l'avenir en ouvrant une boîte de Pandore. Qu'est-ce qui empêcherait d'autres couples de s'en inspirer et d'obtenir par ce biais habile l'adoption d'enfants conçus par des mères porteuses ?


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