La procréation pour tous et la perversion du soin
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samedi 22 septembre 2012
Au fur et à mesure que progresse le débat sur le « mariage pour tous » se fait jour la vraie revendication de ceux qui le réclament. Comme nous le répète si joliment à l'envi Madame la Ministre de la Famille : il s'agit de « faire famille ». Et il s'agit, en faisant famille de "faire des enfants". Le porte-parole de l'Inter-LGBT, Nicolas Gougain, est en cela cohérent dans son combat. Pour lui la revendication du mariage pour tous est synonyme de la procréation pour tous, par tous les moyens que permet aujourd’hui la médecine (Assistance Médicale à la Procréation – AMP).
Cela ne manque pas de soulever quelques questions.
L’AMP est réservée aujourd’hui* aux couples hétérosexuels stables qui ne peuvent avoir d’enfant du fait d’une maladie : la stérilité.
L’extension de ces techniques médicales à des couples stériles, non par maladie mais par choix de vie, que sont les couples homosexuels, est un retournement. Ethiquement il y a une ligne qui est franchie. La médecine ne sert alors plus à soigner, c’est-à-dire à rétablir la physiologie naturelle altérée par la maladie, mais elle sert alors à modifier la physiologie naturelle pour satisfaire à un autre ordre des choses. Prend forme alors le retournement du sens naturel du soin, qui ne va plus de l’état inhabituel du corps causé par la maladie vers la physiologie naturelle, mais de la physiologie naturelle (un couple homosexuel est stérile) vers un état inhabituel qui ne correspond pas à la physiologie naturelle.
Le même raisonnement pourrait se faire sur l’adoption. Il s’agit avec cette loi d’autoriser l’adoption pour tous, non parce qu’il y a des enfants à adopter, mais parce qu’il y a des adultes en demande d’adoption. La logique de l’adoption (que des enfants, orphelins ou autre puissent tout de même bénéficier d’une famille) est retournée pour que des familles en demande d’enfant, mais ne pouvant en avoir, puisse tout de même en avoir.
Cette organisation retournée des choses et assumée comme tel, porte un nom en psychiatrie : c’est au sens strict la définition de la perversion.
Et alors ? pourrait-on dire. Aller à contre-courant pose-t-il un problème ?
Comme toujours en psychiatrie le problème vient de la souffrance causée par les comportements.
Imaginons que la ministre, faute de réflexion, cède sur ce sujet et accorde la procréation pour tous. Des enfants naîtront alors, dans un couple où un tiers est intervenu dans sa conception (que ce soit un donneur de sperme pour un couple lesbien ou une mère porteuse pour un couple gay).
Quel statut donner à ce tiers ? Aucun ? La psychologie la plus élémentaire nous apprend que l’enfant né ainsi n’aura de cesse de rechercher celui qui est son père ou sa mère. Le lien est biologique entre un père et sa mère, cette barrière, aussi nombreuses et ingénieuses que soient les lois votées, est naturelle et infranchissable. On imagine ce que l’enfant aura hérité biologiquement (la couleur des yeux, une particularité physique, mais aussi malheureusement peut-être une vulnérabilité génétique). Le lien, que la loi l’accorde ou pas, se fera irrémédiablement entre un parent naturel et son enfant naturel. Les pauvres bricolages législatifs n’y pourront rien. Ces situations sont suffisamment difficiles lorsque des êtres humains les subissent du fait de la maladie, pour qu’on évite de les faire subir à d’autres encore, du fait du désir de certains adultes.
L'aboutissement du mariage pour tous est la procréation pour tous.
Ce n'est parfois qu'au bout du chemin qu'on s'aperçoit de la profondeur de son erreur. Au bout de la logique du mariage pour tous il y a la procréation pour tous et la perversion qu’elle signifie.
Il n’y a pas de perversion sans souffrance. Si l’individualisme actuel nous autorise à tolérer la souffrance d’adultes librement consentant, on ne doit certainement pas consentir à ce que des enfants, vulnérables, subissent ce qu’ils n’ont pas choisi.
* dans une autre situation, l’AMP est aussi indiquée pour prévenir la transmission d’une maladie génétique.