La suffisance du banquier pourrait-elle vaciller ?

par Céline Ertalif
lundi 20 juillet 2015

Un cabinet de consultants demande à des non-banquiers d'apporter leur regard pour réfléchir à la banque de demain et à son modèle de management, quel bonheur ! Nous savons notre dépendance aux banquiers, spontanément nous avons un peu plus de mal à imaginer l'inverse.

Le cabinet Athling Management est spécialisé dans les services financiers et organise notamment des rencontres pour les professionnels du secteur bancaire. Pour son prochain rendez-vous avec une centaine de dirigeants du secteur bancaire, en octobre prochain, il a fait un appel à contribution (entre 500 et 1 000 signes).

 

Je me suis donc laissée tenter et voici ma contribution en deux points :

« Notre objectif est de nous appuyer sur 30 à 50 textes de personnalités qui livreraient leur vision de la banque de demain. C’est dans ce cadre que nous nous permettons de vous solliciter. Ce livret sera distribué gratuitement. Il sera disponible sur les réseaux sociaux au format .pdf » lit-on encore sur l'appel. Comme vous l'avez remarqué, j'ai souligné dans ma contribution ci-dessus cette notion de personnalité pour la contester, et ce qui fait un réseau social sur internet c'est notamment la possibilité de s'exprimer sans être un VIP ou un spécialiste coopté. Il m'a semblé d'une part que je n'avais pas besoin d'être une «  personnalité » pour exprimer quelque chose. Les gens autorisés peuvent-ils faire réellement la différence sur la qualité pour contribuer ? Aujourd'hui, le quidam en doute… Et d'autre part, je n'ai évidement besoin de personne pour publier ma contribution sur les réseaux sociaux !

 

Course entre les élites et le public : résultat incertain...

Les GAFSA, les banquiers et les milieux d'affaires ont en réalité de sérieuses difficultés à entrer profondément dans les conséquences d'internet, ils veulent l'ouverture des nouvelles technologies et ses avantages mais garder les privilèges de la centralisation, de la cooptation et bien entendu tous les profits. Les GAFSA surfent sur des nouvelles technologies avec des conceptions sociales du passé, parce que nous n'avons pas encore bien compris toutes les conséquences consubstantiellement décentralisatrices d'internet. C'est vrai du côté du public qui a tendance à s'orienter dans la nouveauté d'internet vers ce qu'il comprend le mieux spontanément, c'est-à-dire vers ce qui correspond le plus au système ancien des médias. Mais pas seulement.

Cet univers en mutation est souvent désespérant. On voit les états se battre pour garder le contrôle centralisé du vieux monde et l'espoir délirant de tout surveiller (aussi bien du côté des infrastructures que du soft) comme cela a été révélé par Snowden à propos des pratiques de la NSA et par le gouvernement français lui-même avec sa loi renseignement.On voit aussi la démesure des grandes entreprises californiennes, les GAFSA, avec le fantastique profit généré par le seul algorithme d'Adwords par exemple, les incroyables ambitions d'Elon Musk ou les délires du transhumanisme. Grandes entreprises et états sont alliés contre la liberté du public en voulant tout faire passer par les mêmes tuyaux par une centralisation artificielle et contre-nature pour contrôler les passages, surveiller et/ou rançonner.

Mais il y a aussi de bonnes nouvelles, et elles ne sont pas moins importantes. La première, c'est que le public s'adapte et progresse, cette question a été remarquablement développée par Benjamin Bayart (voir cette excellente interview - qui part de la question de la surveillance, passe par l'utilisation des données, l'évolution du public et la limite des lois pour aboutir à la nature d'une mutation). La deuxième, c'est que les élites, ou les puissants, comme vous voudrez, ne s'adaptent dans leur ensemble pas forcément beaucoup mieux ou plus vite que le public. Et cela, l'appel à contribution du cabinet Athling Management l'illustre parfaitement.

 


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