Le harcèlement à l’école, symptôme d’une époque
par Laurent Herblay
jeudi 5 novembre 2015
Les chiffres font froid dans le dos : un enfant sur huit serait victime de harcèlement au primaire. Les cours de récréation semblent se transformer en une loi de la jungle de plus en plus dure et cruelle, sous l’influence de plus en plus délétère des réseaux sociaux, sans sortir nos dirigeants de la passivité.
Le seigneur des mouches sur Facebook
Bien sûr, la ministre de l’éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem a déclaré vouloir lutter contre ce fléau et a mis en place aujourd’hui la première journée nationale de lutte contre le harcèlement. Mais, comme le note Le Figaro, les mesures annoncées sont bien timides, entre clips de sensibilisation et numéro vert. Bien sûr, cela vaut mieux que rien. Mais les chiffres sont quand même effrayants : 12% des enfants victimes de harcèlement au primaire, dont 5% de manière « sévère à très sévère ». L’enfance ne devient-elle pas une forme de prison pour un enfant sur vingt au primaire, une horreur inacceptable ? La proportion diminue avec le temps, puisque 10% des adolescents en seraient victimes au collège et 3,4% au lycée, une baisse qui semble indiquer que le temps et l’âge améliorent les choses.
Où l’on voit encore une fois que les technologies modernes ont décidemment un côté obcur, puisque les réseaux sociaux, Facebook et Instagram, seraient des véhicules majeurs du harcèlement, qui ne trouverait ainsi plus de répit, même sous le toit familial. Comme le rapporte le Figaro, « via les téléphones portables, la cyberviolence toucherait environ 20% des jeunes scolarisés et le cyberharcèlement 6% d’entre eux » : entre photos publiées sans autorisation, actes de violence filmés et diffusés. Les téléphones portables et Internet semblent avoir démultiplié, autant pour le bien que pour le mal, les capacités d’action de la jeunesse, dans des cours de récréation qui semblent se rapprocher d’une forme de jungle dérégulée et donc parfois violente et cruelle, en absence de toute régulation de l’Etat.
Faut-il interdire les réseaux sociaux avant le lycée ?
Encore une fois, il est effarant de constater que nos dirigeants semblent vouloir se contenter de traiter les conséquences des problèmes plutôt que leurs causes. Bien sûr, les pseudo-progressistes relativisant de la trempe d’un Cohn-Bendit peuvent dire que les violences n’ont jamais épargné les cours de récréation, mais il est un peu facile d’ignorer qu’elle prend un tour nouveau quand les enfants filment des actes de violence, puis les diffusent. Ici, la révolution technologique se transforme en une nouvelle arme pour les bourreaux. La technologie n’est pas neutre quand elle démultiplie les moyens de faire mal, d’une manière « sévère à très sévère » pour un enfant sur vingt ! Mais on ne peut pas seulement incriminer la technologie, le climat des cours de récréation devant aussi aux bêtises pédagogistes.
En effet, est-il si surprenant de transformer certains enfants en monstre quand on refuse de sanctionner des choses qui l’étaient sans la moindre hésitation il y a quelques décennies. La circulaire Lang a privé les professeurs d’une partie de leur autorité, les mineurs délinquants ne sont plus sanctionnés et il y a toujours mille excuses pour justifier les incivilités ou les délits, comme le rapporte Marc Rameaux dans son livre, et on s’étonne que les cours de récréation deviennent plus durs. Même les Suédois commencent à se demander s’ils ne transforment pas leurs enfants en petits monstres en refusant toute sanction et cédant aux moindres caprices. Abandon de presque toute discipline et nouvelles technologies expliquent sans doute l’envolée de cette violence scolaire pourtant inacceptable.
Outre plus de discipline à l’école, de manière étonnante, personne ne semble se demander s’il ne faudrait pas fortement restreindre l’accès à Internet pour les enfants. Après tout, on ne peut pas conduire seul avant 18 ans. Ne faudrait-il pas attendre 15 ans pour pouvoir aller sur les réseaux sociaux ?