Le « melting pot » à la française

par CHALOT
jeudi 21 avril 2011

"Pourquoi n'arrive-t-on pas à discuter sereinement sur Agoravox de toutes les problématiques liées à l'immigration ?"

C'est une question qui revient souvent dans les forums ....

Aujourd'hui je relance le débat, non sur la régularisation des sans papier car c'est un sujet déjà traité, que nous reprendrons certainement mais sur l'intégration des français de toutes origines qui vivent ici dans leur pays.

Il nous faudra d'ailleurs bientôt et je le souhaite avec force que l'on ne parle plus des origines de tel ou tel français mais de notre volonté à tous de faire de ce pays un creuset démocratique et solidaire. Utopie ! me diraient certains !

LE « MELTING POT » A LA FRANCAISE

« 1ère, deuxième, troisième génération, nous sommes tous des enfants d'immigrés » ! C'est un slogan qui a été maintes et maintes fois scandé dans les manifestations...

C'est le reflet de la réalité d'aujourd'hui dans nos banlieues et même ailleurs.

Certains s'effraient devant cette évolution inéluctable, semblant ignorer que déjà l'immigration d'avant hier, polonaise, italienne, belge et portugaise avait permis de brasser la population....

« Oui mais aujourd'hui la population noire et arabe, ce n'est pas pareil, elle n'est pas pas intégrable » nous dit-on parfois !?

A voir ! Aujourd'hui de nombreux français issus d'une immigration datant de la période postérieure aux trente glorieuses vit dans ce pays, leur pays et partagent les valeurs communes et se réclament des principes républicains....

De nombreux écrivains français d'origine algérienne montrent d'ailleurs qu'aujourd'hui toute une génération, imprégnée des deux cultures rejette fortement l'intégrisme et tout repliement communautariste.

« Il était une fois... peut être pas » roman d'Akli Tadjer, Éditions JC Lattès, mars 2011


Des contes à la réalité...

Mohamed a élevé seul sa fille Myriam qui n'a pas connu sa mère...Mais qui est-elle ?

Il a bercé sa chère petite avec des contes qui ressemblent à s'y méprendre à un puzzle généalogique... Le passé n'est pas occulté, même si cet employé artificier de 42 ans s'installe dans la France d'aujourd'hui...

Mohamed est entré dans la modernité, certes mais accueillir chez lui un gaulois tout blanc ce n'est pas si facile que cela, d'autant plus que l'ami de sa fille doit être hébergé sans la présence de sa bien aimée, restée à Toulon pour poursuivre ses études !

Enfin le gus, comme il l'appelle, est là, il faut bien faire avec.

Au début la coexistence est difficile mais peu à peu, des liens se tissent.

Mohamed se rappelle les moment d'intense émotion quand il racontait la vie extraordinaire et dramatique d'une famille.

C'est toute l'histoire de l'Algérie qui nous est contée : la belle Awa qui confectionne des éventails magnifiques est la première de toute la filiation « héroïque ».

Remarquée par Hussein Dey, elle aura de cette union un fils Adam qu'elle élèvera seule....Aimée du Dey elle sera pourtant chassée car la situation s'est dégradée et il n'est plus temps de jouer à la gaudriole .

Ce père biologique est le chef de la milice turque assurant la Régence d'Alger. Après avoir frappé le consul de France Pierre Deval d'un coup de "chasse-Mouche", il refusa de présenter ses excuses ce qui déclencha la rupture des relations diplomatiques, le blocus des côtes et la conquête coloniale.

Le chasse -Mouche aurait été d'après Mohamed, un de ces éventails confectionnés par la merveilleuse Awa....

Il était une fois... peut-être pas comme dit Mohamed qui nous fera découvrir ensuite le décret Crémieux et ses conséquences, la construction de l'Algérie et la première guerre mondiale.

Cette avaleuse d'hommes « frappait désormais aux portes des indigènes. L'armée en raflait tous les jours pour le grand voyage sans retour. »

Tout n'est pas rose, loin de là pour la lignée d'Awa qui connaîtra les affres de la guerre d'Algérie et les évènements tragiques de la fin des années 80... C'est là que le présent rejoint le passé.

Si l'humour et l'humanisme d'Akli Tadjer sont comme dans ses autres romans au rendez vous, la question traitée est sérieuse et grave...

Mohamed ne sait pas comment raconter à sa fille le dernier conte de sa dernière nuit .

Pourvu qu'elle ne s'engage pas sur les sentiers menant à l'enfermement et à l'obscurantisme !

Jean-François Chalot


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