Les chaises musicales
par C’est Nabum
vendredi 22 février 2013
En direct de nos collèges ...
L'engrenage fatal
Le premier trimestre passé, les enseignants ont usé des trésors de patience, de mansuétude et de compréhension. Ils se sont cassés les dents sur des agissements qui dépassent l'entendement. Ils ont fait des rapports, obtenu enfin que la direction réagisse et sanctionne ces incurables qui détruisent une classe plus sûrement qu'une mauvaise réforme. Les parents ont été convoqués, ils ne sont pas toujours venus et un jour, de guerre lasse, ils se sont retrouvés à témoigner leur impuissance devant un conseil de discipline.
C'est le début de la fin, le fatal engrenage qui va se mettre en branle pour ceux dont personne ne veut, ceux qui refusent l'école et qui la mettent en échec avec d'autant plus de force que rien, vraiment, ne peut leur fournir une réponse à la hauteur de leur désarroi. Ceux qui finissent par être exclus vont s'échanger les places laissées vacantes du fait de l'exclusion d'un de leurs semblables.
C'est une nouvelle chance nous dit-on. C'est un nouveau désastre à venir dans la majeure partie des cas. Le plus souvent, rien ne change fondamentalement et le nouvel élément vient prendre le relais de celui qui est parti. Le temps de prendre ses marques, de trouver les failles de l'endroit, de se faire quelques complices à malice et le cirque recommence de plus belle.
Les enseignants découvrent alors avec stupeur qu'ils ont réalisé un marché de dupe. Ils pensaient souffler un peu, retrouver le calme dans la classe. Ils découvrent un nouveau cas désespérant, un de ces mômes sur lesquels plus rien n'a de prise. Ils avaient avec son prédécesseur trouvé quelques parades, des astuces qui cette fois ne fonctionnent plus. C'est pire encore et ils s'en mordent les doigts.
Combien d'élèves irréductibles s'échangent ainsi les fauteuils d'orchestre dans nos classes ? Plus de deux cents conseils de discipline chaque année dans notre agglomération. Les mêmes vedettes qui d'année en année vont saborder la vie d'un nouveau groupe. Passé un temps d'adaptation, le calme avant la tempête ou bien l'œil du cyclone, c'est pire encore car ils ont compris depuis longtemps que nous sommes totalement impuissants.
Nous subissons ainsi la tyrannie impunie de petits monstres impitoyables qui nous rendent la vie impossible. Aucune réponse institutionnelle, bien au contraire, car les consignes sont formelles, il faut taire la vérité sordide, dissimuler l'échec d'un système rongé par ceux qui le réfutent. Les enseignants serrent les dents, avalent leur fierté, ferment la porte et subissent sans rien dire. Réagir, réclamer des actions tangibles c'est admettre leur échec, il vaut mieux n'en rien dire et punir par la-même tous les autres élèves qui auraient souhaité travailler.
Il y a dans nos classes des gamins qui font ce qu'ils veulent chez eux et à l'école, qui n'ont plus peur de rien, qui détestent l'école, méprisent leurs camarades, usent leurs professeurs. Ils sont une infime minorité et pourtant, les professeurs ne parlent, ne pensent, ne s'occupent que de ces incurables. Quelle énergie perdue ! Quelle désespérance ! Quel massacre !
Ne peut-on pas ouvrir les yeux, penser enfin des solutions adaptées pour ceux qui veulent travailler, se tiennent comme des élèves ordinaires, désirent ne pas avoir peur en classe ? Ne va-t-on pas un jour, enfin, ouvrir les yeux de nos dirigeants, pour mettre en place des moyens et des structures d'exception. Continuer ainsi est pure folie. L'école sombre, l'échec est de plus en plus patent, par la faute à quelques ingérables dont on ne veut pas admettre l'existence.
Je n'ai pas de réponse appropriée. Je ne suis pas ministre, la démagogie et le mensonge ne sont pas mes compagnons. La vérité est celle que je vous décris. Ne croyez pas les vendeurs de rêve, les enjoliveurs du réel, les marchands d'illusion. Le monde des bisounours implose et ce ne sont pas de réformettes dont nous avons besoin. C'est un immense chantier qui s'impose et personne n'en a le courage. Sans paix scolaire, sans discipline, rien n'est possible ! Le collège unique est devenu une hérésie à laquelle bien des enseignants s'accrochent désespérément alors que c'est le boulet qui provoque leur perte.
Disciplinairement leur