M. Darcos réquisitionné pour assurer le service minimum à l’école

par jet
samedi 21 février 2009

C’est en tous cas la proposition séduisante d’un maire du Nord qui réagit aux directives nationales quant à recruter des retraités pour assurer le "service minimum"...

Jacques Michon est un blagueur… Comme la plupart des dizaines de milliers de maires de France, il a reçu un bien curieux courrier de l’Inspecteur de l’éducation nationale (IEN) de sa circonscription. Jacques Michon est maire de Waziers, dans le Nord, en périphérie de Douai.

Nous reproduisons ici l’une de ces missives envoyées par les différents rectorats à d’anciens salariés de l’EN, en premier lieu à “Mmes et MM. les enseignants du 1er dégré partis en retraite en 2006, 2007 et 2008″. Elle émane de l’inspection académique de Loire-Atlantiques, mais la consigne est nationale : du beau langage technocratique pour faire appel aux “réservistes” de l’éducation afin de remplacer les grévistes. On se cache derrière la fameuse loi du 20 août 2008 sur le service minimum (à l’école on l’a rebaptisé “service d’accueil”) pour discréditer les mouvements sociaux. Car, c’est bien connu, rien de mieux qu’une loi pour que la sentence du Grand Conducator Sarko —“quand une grève se déclenche, personne ne s’en rends compte”…— devienne devise républicaine.

 

L’inspecteur prend donc sa plus belle plume pour réquisitionner les nouveaux retraités :

(…) Les communes éprouvent des difficultés à trouver suffisamment de personnel compétent pour l’encadrement d’enfants, et Monsieur le Ministre de l’Education Nationale a demandé aux inspecteurs d’académie de leur apporter leur aide en ce domaine.
Je m’adresse à vous pour vous demander si, compte tenu de votre expérience professionnelle vous accepteriez de participer à l’organisation du service d’accueil, dans votre commune ou dans une autre, dans les conditions définies par la commune.
Si c’est le cas, je vous remercie de me répondre au moyen du coupon réponse ci-dessous. (…)

C’est là que le maire de Waziers, Jacques Pichon (PC, élu à la tête d’une coatition de gauche en 2008) entre en scène. Le 27 janvier, soit la veille de la grève, il écrit à son IEN en ces termes (cf sa missive ci-contre) :

« J’ai pris bonne note que dans 4 groupes scolaires [de ma commune] les grévistes dépassaient les 25%. Les services municipaux étant touchés également par le mouvement de grève, n’ayant qu’une seule dame de service à l’école Gambetta qui n’est pas gréviste et au total plus de 90 % du personnel communal absent à cette date, nous sommes donc dans l’incapacité d’assurer quelque service d’accueil que ce soit. »

Ensuite, prenant soin de rappeler que cette loi, “qui demande aux voisins de régler ses propres conflits de couple, ne m’agréé nullement”, il poursuit :

« Mais dans la même optique je vous saurai gré dû bien vouloir m’adresser par retour, une liste d’enseignants, de personnel de l’Education Nationale non grévistes le 29 janvier 2009 et qui pourraient assurer la continuité du service public en venant tenir les guichets de la mairie, fabriquer les repas à la cuisine centrale, mettre les couverts, servir les enfants, faire la vaisselle et le nettoyage.
Je pense bien évidemment que vous n’aurez aucun mal à trouver ce personnel compétent pour que je puisse assurer la continuité du service public.
Dans le cadre du droit d’accueil, si j’avais un début de liste à faire et à vous soumettre, je mettrai :

- Monsieur l’inspecteur de l’Education nationale Douai-Waziers,

- Le personnel de l’Inspection de l’EN de Douai-Waziers,

- Le Personnel du RASED,

- Monsieur le Sous-Préfet de Douai,
et pourquoi pas Monsieur le Préfet de Région !.. Et pour changer les couches, Monsieur DARCOS, Ministre de l’Education Nationale (*).
Je pense que l’ensemble de ces personnes sont parfaitement qualifiées pour exercer le droit d’accueil dans les écoles de Waziers. »

Ça, c’est envoyé ! M. le maire aurait également été fort inspiré d’inviter le commissaire divisionnaire de Douai, un certain Jacky Maréchal. Ce grand serviteur de l’État s’était distingué en 2003 en prônant, avec ses “citoyens-relais”, la délation institutionnelle (qui, depuis, a fait son chemin grâce au Conducator). Le commissaire avait, pour ces faits d’armes, échappé de peu à un prix Orwell, ces trophées empoisonnés remis tous les ans par les Big Brother Awards aux champions du l’ère sécuritaire… M. Maréchal, le bien nommé, n’est peut-être plus en fonction aujourd’hui. Justement : il pourrait rejoindre la cohorte de retraités réquisitionnés dans les écoles !

(*) A propos des couches et M. Darcos, ce n’est pas seulement une figure de style : se reporter à ses déclarations fracassantes, en septembre 2008, à propos des profs de maternelles.

PS - Lettres qui nous sont parvenues via des enseignants impliqués dans les actuels mouvement sociaux dans l’éducation



Lire l'article complet, et les commentaires