Moirans : après la justice, l’Etat doit agir
par Laurent Herblay
jeudi 22 octobre 2015
Un délinquant roulant dans une voiture volée se tue sur la route. La justice refuse à son frère, en prison, une permission pour assister aux obsèques. Des membres de leur communauté en profitent pour vandaliser l’espace public. Cette fois-ci, heureusement, la justice n’a pas cédé. Mais l’Etat a du retard.
Inadmissible chantage à la violence
Déjà, fin août, des voyous du voyage avaient bloqué et vandalisé l’autoroute A1 pour faire pression sur la justice afin de permettre à un délinquant de participer aux obsèques de son frère. Si, sur le principe, on peut penser qu’il est humain et normal de le permettre, cela devient inacceptable quand un groupe commet des délits pour l’obtenir. On peut d’ailleurs penser que les évènements de Moirans sont la conséquence directe de cette première séquence puisque la justice avait, dans un deuxième temps, donné sa permission au frère d’assister aux obsèques, après les actes de vandalisme commis sur l’A1. Heureusement, la justice a refusé cette fois-ci. Aussi dur soit le fait de priver un frère de ce moment, les violences de Moirans l’imposaient car une décision inverse aurait été une incitation à la violence.
Même si la mère de la victime a changé de ton mercredi, demandant l’arrêt des violences, elle avait dit avant qu’il y aurait « du grabuge » si son fils n’était pas autorisé à assister aux obsèques de son autre fils : « on a des soutiens dans des camps partout en France. Tout le monde va se révolter ». Toute la colère d’une mère qui perd son fils ne peut pas justifier les scènes de guérilla urbaine à Moirans et ce chantage à la violence dans un Etat de droit. Il était parfaitement possible de protester de manière pacifique et sans la violence qui les a poussé à utiliser des cagoules. Mais parce qu’ils ont utilisé la violence pour se faire entendre et que la mère de la victime l’a légitimé, l’Etat devait refuser cette permission pour éviter de donner l’impression qu’il récompense la violence. Cette fois-ci, la justice a vu juste.
Un Etat aux abonnés absents ?
Mais mardi soir, malgré les violences et le déploiement des forces de police, aucune interpellation n’a eu lieu, donnant un sentiment très dérangeant d’impunité pour les délinquants qui ont brûlé des voitures et vandalisé l’espace public. Assez logiquement, l’opposition s’est emparée du sujet et a dénoncé une faillite de l’autorité de l’Etat à Moirans. Heureusement, le frère de la victime et un autre détenu ont été changés de centre, après les violences de mardi. Et le procureur de la République a tenu des propos à la hauteur de la situation et annoncé hier qu’une enquête était ouverte pour retrouver les auteurs identifiables des émeutes. Malgré tout, il est difficile de ne pas regretter que l’Etat n’ait pas pu interpeller mardi les délinquants qui ont vandalisé la gare et brûlé la bagatelle de 35 voitures !
Le gouvernement a été plus ferme que lors des évènements de l’autoroute A1, François Hollande appelant à « des sanctions à la hauteur » des actes de violence commis et Manuel Valls annonçant que les auteurs de violence seront « implacablement recherchés et poursuivis en justice. Ceux qui veulent tordre le bras à la justice, tordre le bras aux forces de l’ordre, tordre le bras à la République s’exposent à une réponse d’une extrême fermeté ». Mais on ne pourra juger de ces mots qu’une fois que les coupables auront été identifiés et sanctionnés. Malheureusement, il faut rappeler qu’à date, personne n’a été interpellé suite au vandalisme de l’autoroute A1. L’UMP a aussi une part de responsabilité dans la situation, après avoir supprimé la bagatelle de 13 000 postes de policiers en un quinquennat.
Merci à la justice de ne pas avoir cédé au chantage à la violence, ce qui épargnera peut-être de nouveaux dérapages, aussi dur soit-il pour la famille de la victime. Mais ceci n’est pas suffisant et il faut sanctionner les auteurs des vandalismes de mardi soir, durement.