Munich social, la suite, chez General Motors et à l’hôpital Beaujon
par Laurent Herblay
mercredi 21 juillet 2010
Il y a un peu plus de quinze ans, Philippe Séguin dénonçait le « Munich social », ce renoncement de la classe politique à véritablement combattre le chômage, cancer de notre société. Deux évènements récents montrent que rien n’a changé…
GM, ou la victoire du moins-disant social
Lundi, les salariés de l’usine General Motors de Strasbourg ont accepté le plan de reprise qui prévoit une baisse du coût du travail de 10%, par le gel des salaires sur deux ans, l’abandon d’un tiers des jours de RTT et de l’intéressement jusqu’en 2013. Les employés ont répondu à 70% par la positive à "la direction de GM Company (qui) demande aux salariés de faire un effort et de réduire l’écart avec les coûts pratiqués au Mexique". En effet, le site Français est en concurrence avec un site Mexicain…
D’une part, on pourrait souligner le pragmatisme d’employés qui acceptent de faire des efforts pour sauver une société en difficulté, au lieu de refuser tout compromis en comptant sur les indemnités de licenciement et les allocations chômage. Ce comportement peut paraître noble. Malheureusement, elle démontre surtout que la libéralisation consacre la victoire du moins-disant social et augure mal de l’avenir des implantations industriels dans les pays dits développés face à la concurrence des pays émergents.
En effet, tous les industriels peuvent dès demain pratiquer le même chantage et demander à leurs salariés des efforts pour réduire l’écart de coût avec l’Europe de l’Est, l’Amérique Latine ou l’Asie. La pression va être terrible dans les années à venir. Pourtant, quelques barrières douanières et une bonne taxe carbone qui renchérirait le coût du transport permettraient d’éviter de telles comparaisons et sanctuariserait davantage la production de biens industriels dans nos pays…
Quand le service public délocalise
Cette information est encore plus incroyable : l’hôpital Beaujon a décidé de délocaliser une partie de la saisie des comptes-rendus au Maroc. Bien entendu, le discours de la direction de l’hôpital se veut rassurant : Anne Costa, directrice par intérim de l’hôpital explique ainsi qu’il « ne s’agit pas du tout d’un programme de suppression de postes (…) mais d’une aide aux secrétaires médicales en cas de surcharge de travail ou quand plusieurs d’entre elles sont indisponibles ».
Mais comment ne pas y voir une tentation pour le Service Public de réduire ses coûts par la délocalisation à un moment où les financements publics sont sans doute plus difficiles à obtenir ? Sous la pression des nouvelles contraintes budgétaires, les responsables des hôpitaux trouvent dans les délocalisations un moyen plus facile de réduire leur charge que des réorganisations internes. Le problème est que comme toutes les délocalisations, ils détruisent de l’emploi en France.
Bien sûr, l’administration se défend en affirmant qu’il y a un manque de personnel qualifié. Mais cette ligne de défense est trop facile et ce manque peut être corrigé. Il est tout de même incroyable que l’Etat se mette à recourir à des procédés que nos gouvernants condamnent en suivant exactement la logique des entreprises privées. Qui pourra reprocher à des entreprises de délocaliser demain sachant que même l’hôpital public le fait de nos jours ?
Ces nouveaux exemples montrent que la logique du toujours moins l’emporte en matière d’emploi et de salaire. Pourtant, il revient à l’Etat non seulement de montrer l’exemple mais également de créer une fiscalité qui ne pousse pas aux délocalisations et aux baisses de salaire.
Cet article marque le début d’une série d’article consacré au libre-échange et au protectionnisme