Politiques ayez le courage de dire que le monde n’est pas un « casino » et intervenez, car les « jamais riches » en ont marre de renflouer les banques !

par menou69
dimanche 21 octobre 2012

Pourquoi faut-il que l'État, c'est-à-dire nous, pourquoi faut-il donner de l'argent public aux banques privées en faillite et pourquoi faut-il en même temps : baisser les salaires, réduire les emplois, augmenter les impôts, fermer des entreprises de plus en plus nombreuses ?

C'est par cette question sans ambiguïté que s'ouvre ce passionnant documentaire "Noire Finance", qui est en deux partie et qui, pendant plus de deux heures, nous entraîne dans les arcanes d'un système financier devenu incontrôlable. Y répondre n'était pas gagné d'avance, tant est opaque l'univers de la finance.

Les auteurs de cet excellent documentaire sont Jean-Michel Meurice et Fabrizio Calvi (1), ils nous ont habitués depuis longtemps à traiter sous une forme accessible des dossiers complexes.

"Noire finance" s'inscrit dans cette veine : un montage très éclairant de propos de spécialistes, émaillé de scènes d'animation, qui retrace l'histoire politique des déréglementations qui ont abouti à la financiarisation de l'économie mondiale, au profit d'une spéculation criminelle. Les banquiers Jean Peyrelevade et Guillaume Hannezo ainsi que les économistes Michel Aglietta et Paul Jorion), nous donnent les clés de ce récit dense afin que nous puissions saisir la folie d’un système que même la crise ne parvient pas à ébranler.

Ce film en deux parties mériterait d’être vu par le plus grand nombre. Alors je me suis autorisé à le mettre en ligne sur le site d'Agoravox afin de permettre à ceux qui n'ont pas eu la possibilité de le regarder sur ARTE d'avoir droit à cette deuxième chance. Tout du moins pour ceux que cela intéressent.

Dans le premier volet intitulé : la grande pompe à phynances les auteurs nous font remonter au fameux jeudi noir d'octobre 1929 à Wall Street, pour montrer comment une crise boursière se transforme en crise bancaire, qui elle-même se développe en crise économique mondiale. Des "barons voleurs" d'hier aux golden boys des années Tapie, des accords de Bretton Woods à la création de l'euro, il retrace ensuite les différentes étapes qui ont conduit à la libéralisation des flux financiers. Assurances, produits dérivés, fonds spéculatifs (hedge funds)… : les dispositifs techniques se succèdent pour accroître les profits, augmentant toujours plus le risque et la fraude systémiques. (regarder le premier volet ci-dessous)

Le deuxième volet intitulé : le Bal des vautours, est centré sur la décennie écoulée et montre comment les logiques boursières ont mené le monde à la crise actuelle. Au cours des années 1980 et suivantes, l'essoufflement des moteurs de croissance a suscité le développement d'une économie du crédit. Lorsque le monde de la finance a ouvert les yeux sur l'irréalité des subprimes, en 2008, le système a commencé à s'effondrer sur lui-même. A la garantie interbancaire a dû se substituer la garantie des États, dont la dette, devenue abyssale, a miné la crédibilité, poussant certains d'entre eux au bord de la rupture. Comment banquiers et hommes d'État ont-ils réagi à la succession d'ébranlements survenus depuis 2008, dont l'économie mondiale ne se remet pas ? (voir le deuxième volet ci-dessous)

Selon les auteurs, ces événements sont loin d'être une fatalité, mais sont souvent la conséquence de pratiques contestables d'individus ou d'institutions financières sans scrupule comme Goldman Sachs.

Ils montrent, également que c'est un défaut de surveillance des boursiers et autres traders qui ont conduit aux récentes catastrophes financières. Une finance qui doit être sauvée par la puissance publique pour éviter l'explosion d'un système que personne n'est prêt à voir disparaître alors qu'il vit en complète décorrélation avec l'économie réelle.

La sophistication de plus en plus grande des produits financiers permet aux principaux acteurs d’imposer leurs normes à la règlementation des états. Cette quasi immunité révèle un système de domination, de corruption des élites, de filiation des classes politiques et financières dont les victimes sont en dernier ressort les peuples (fiscalisation excessive, déflation salariale, chômage de masse, précarisation).

Il faut noter que le gouvernement américains et certains pays européens ont confié leurs finances et aussi la direction de leur gouvernement à des anciens responsables de la banque d'investissement Goldman Sachs. Ils ont fait entrer les loups dans la bergerie ! Jusqu’où cela ira-t-il ? Peut-être jusqu'à ce que les peuples se réveillent….. "Une révolution est un retour du factice au réel " disait Victor Hugo.

Si vous êtes allés jusqu'à la fin de ce vertigineux documentaire, qui est le récit de ces quatre-vingts ans de machinerie financière à base d’effets de levier, de produits dérivés et autres "hedge funds" régnant en maîtres sur l’économie cela, je pense, a dû vous susciter un grand malaise. Car comme si rien n’avait changé depuis les années 30 : ce sont les mêmes qui s’enrichissent et privatisent les profits quand tout va bien et les autres qui paient l’addition quand tout va mal.

Une immunité que résume bien ce chiffre balancé en conclusion : les "banksters" de la finance ont totalisé ces dernières années 95 milliards de dollars de salaires alors qu’ils ont accumulé 1 000 milliards de pertes. On dit stop ou encore ?

En conclusion je reprends la dernière phrase, très explicite, dites dans ce film : "....quand çà gagne c'est pour les riches, les de plus en plus riches qui font des fortunes indécentes et fabriquent rien de bien utile, et quand çà perd c'est toujours pour les mêmes, ceux qui travaillent, les jamais riches et les toujours pauvres. Courage les politiques, réveillez-vous, dites la vérité, dites que le monde n'est pas un casino. On y vit, on y travaille, l'argent c'est pas un jeux, dites le, ça doit servir !

 

(1) Jean-Michel Meurisse
 
Peintre et cinéaste, l’un des artistes majeurs du mouvement Supports/Surfaces, il est aussi auteur, réalisateur et producteur d’un grand nombre de films documentaires. Son travail a été couronné par le Grand Prix National de la Création Audiovisuelle en 1992 et par le Grand Prix de la Société des Auteurs en 2010. Il est aussi à l’origine de la création d’ARTE.

Ses films les plus récents sont Le Vrai Pouvoir du Vatican, et Algérie Notre Histoire.

 Fabrizio Calvi
 Journaliste d’investigation spécialisé dans les affaires de criminalité organisée et les services secrets. Il a à son actif une dizaine d’ouvrages et une vingtaine de films, dont Série noire au Crédit Lyonnais, Elf-une Afrique sous influence, l’Orchestre noir, le FBI.


Lire l'article complet, et les commentaires