Pourquoi le DIF (Droit Individuel à la Formation) ne prend-il pas auprès des travailleurs non qualifiés ?

par Didier Cozin
lundi 8 mars 2010

Quand on travaille sur des dossiers en formation ou avec des spécialistes de la formation (comme nous le faisons tous les jours) il est difficile de se mettre à la place d’une personne peu (ou pas) qualifiée (celles pour qui la réforme de la formation de 2004 étaient principalement destinées). Ces personnes qui ne sont pas présentes sur Internet et représentent encore ce qu’on appelle la main d’œuvre ouvrière.

Dans une grande entreprise (ce sont elles avec qui nous travaillons généralement en tant que consultant et organisme de formation) dans les services du type nettoyage industriel ou sécurité (des centaines de milliers de personnes travaillent dans ces services et nous ne les rencontrerons pas non plus sur les forums évidemment ).

Comment s’y prendre pour demander son DIF quand on gagne le SMIC et qu’on est ouvrier non qualifié ?

Admettons que nous suivions le cheminement d’une personne écrivant et lisant correctement le français (en oubliant donc le 1/3 des salariés de ce secteur qui sans aide ne peuvent même pas remplir un formulaire). Nous partons du principe que le salarié est dans une entreprise qui ne lui facilite pas sa demande de DIF (la majorité encore des entreprises)

Comme nous l’avions démontré précédemment les entreprises ont joué de la complexité, du manque de transparence des démarches et des files d’attente pour décourager leurs salariés non qualifiés de se former.

Encore faut-il comprendre que la situation examinée ici est celle de travailleurs en CDI, mais pour les CDD c’est bien pire encore (il leur faut passer une douzaine d’épreuves autrement plus redoutables puisque l’employeur (du moment) est censé faciliter et soutenir la demande d’un salarié qu’il ne verra plus dans un ou trois mois.

En 2008, dernière année connue, 422 salariés en CDD ont pu réaliser un DIF soit un taux d’environ 1 pour 5 000 personnes !

Les syndicats auraient pu et jouer un rôle de médiateur et de facilitateur dans les entreprises privées. Ce ne fut guère le cas pour des raisons qu’il serait trop long d’énumérer ici (faible représentativité et représentation, manque de dialogue social, méconnaissance de la formation, méfiance traditionnelle envers la formation de la part d’organisations ne voulant pas contribuer à plus ou mieux produire….)  

Notre pays se retrouve donc avec un passif d’un milliard d’heures de DIF(bien plus en fait car dans les administrations la situation est similaire ) non réalisées et une belle marmite sociale dont le couvercle pourrait bien sauter dans les mois qui viennent.

 

Didier Cozin

Auteur des ouvrages "Histoire de DIF" et "Id-Reflex DIF"


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